«Le plus difficile dans ce travail, c’est que tout le monde aime catégoriser les autres.»
Voilà ce qui vient à l’esprit de Kevin Zegers derrière le volant de sa voiture, en route pour la première de son plus récent film. Âgé de 28 ans, il est considéré comme étant l’un des acteurs canadiens les plus prometteurs de sa génération. Il a séduit les critiques et les spectateurs dans des films aussi différents que Transamerica et The Jane Austen Book Club, et on a pu le voir à maintes reprises dans des émissions de télévision comme Titans et Gossip Girl, sans oublier son rôle de premier plan dans la récente minisérie Titanic: Blood and Steel.

Ce natif de Woodstock, acteur depuis l’âge de six ans, ne se laisse pas impressionner par les projecteurs et le tapis rouge. «On me dit “Tu n’as qu’à t’asseoir là et à dire tes répliques. On s’occupe du reste et on te paiera très bien.” Mais je ne me sens pas comblé de cette manière, explique-t-il. J’aime travailler fort; c’est comme ça que je me sens utile.»

L’éthique de travail de M. Zegers lui a été inculquée, en très grande partie, par son père, Jim, qui travaille dans une carrière de calcaire depuis plus de 30 ans, et sa mère, Mary-Ellen Zegers, EAO, qui enseigne à la Blessed Kateri Catholic School à London. Il admet cependant que la personne qui l’a le plus influencé est son enseignant de 6e et 7e année, Luc Renaud, EAO, à la St. Rita’s Catholic Elementary School à Woodstock.

«Le premier souvenir que j’ai de Luc, c’est d’avoir trouvé à quel point il avait l’air jeune, s’exclame M. Zegers en riant. Il était très dynamique et toujours heureux. Il déplaçait beaucoup d’air dans l’école. Il cherchait constamment à comprendre ce dont ses élèves avaient besoin pour s’épanouir et poussait chacun de nous à se dépasser.

«C’était un enseignant exigeant. Il m’a fait comprendre que j’en avais plus à offrir que je croyais. À l’époque, mon but était simplement d’avoir des résultats assez bons pour que mes parents ne me grondent pas. Il m’a élevé à un tout autre niveau.»

Remarkable Teacher

M. Renaud, qui a récemment fêté sa 21e année en enseignement et qui travaille aujourd’hui à la Bishop Macdonell Catholic High School à Guelph, ne peut s’empêcher de rire en entendant dire à quel point son ancien élève le trouvait jeune.

«J’avais 22 ans à l’époque et la classe comptait beaucoup de garçons, affirme M. Renaud. Je devais garder la cadence. J’ai remarqué Kevin assez tôt. Il avait le sourire accroché aux lèvres, toujours vaillant et heureux. Poli aussi, et respectueux : ses parents le lui ont enseigné. Il avait de l’énergie à revendre, mais jamais de manière à déranger la classe.»

Il n’a pas fallu longtemps à M. Renaud pour comprendre que l’élève devant lui était destiné à une belle carrière au cinéma et à la télévision, surtout en raison du fait que M. Zegers manquait souvent l’école en raison de ses occupations professionnelles.

«Les trois enfants des Zegers étaient tous très occupés, se remémore M. Renaud. Les filles faisaient du patinage artistique et jouaient dans des annonces publicitaires, tandis que Kevin participait à des émissions de télévision et à des tournages de films.

On dit qu’avec de la chance, un enseignant nous marquera à vie. Dans mon cas, ce fut Luc. Il est clairement né pour enseigner.Il m’a élevé à un tout autre niveau.

«Toutefois, à l’école, Kevin voulait être comme tout le monde, explique M. Renaud. Il avait un petit groupe d’amis. Il adorait le sport, surtout le hockey. C’était un garçon ordinaire d’une ville ouvrière. Quand il a commencé à faire du tournage, il a plongé dans un monde qui lui était complètement étranger.»

M. Zegers apprécie la manière dont M. Renaud s’est accommodé de ses obligations professionnelles. «J’ai toujours senti qu’il comprenait que mon horaire pouvait être parfois bien étrange, dit-il. D’autres enseignants ont été moins compréhensifs, mais Luc m’a beaucoup soutenu, et j’ai travaillé deux fois plus fort et obtenu des résultats deux fois meilleurs.»

Remarkable Teacher

Durant une tournée médiatique en Europe pour promouvoir un de ses films, Air Bud, les parents de M. Zegers ont demandé à M. Renaud de se joindre à eux. Même si leur fils n’était plus dans sa classe, ils voulaient à tout prix qu’il reçoive le soutien que seul M. Renaud pouvait lui offrir.

M. Renaud se souvient de l’expérience qu’il qualifie de spéciale. Mais il tient à préciser que, même en présence d’une vedette du cinéma, il traitait M. Zegers comme tous ses élèves de classe.

«J’encourage toujours mes élèves à réaliser leur plein potentiel, autant sur le plan personnel que scolaire, dit M. Renaud. »

La belle influence de M. Renaud a été d’une aide toute particulière pour M. Zegers lorsqu’il a dû prendre des décisions importantes pour sa carrière.

«Je m’étais toujours dit que je ferais du cinéma dans ma jeunesse seulement, pour éviter de m’endetter à l’université, affirme-t-il. Je me voyais aussi en médecine, mais, le jour venu, j’ai pensé aux questions que Luc m’aurait conseillé de me poser : “Qu’aimerais-je réellement faire dans la vie? Quelle est ma vraie passion?” Ma vraie passion, c’était le cinéma.»

L’industrie cinématographique a confirmé son choix de carrière. Au Festival de Cannes de 2006, M. Zegers a reçu le prestigieux trophée Chopard, ainsi que de nombreux prix de jeunes artistes. Mais ce qu’il apprécierait le plus, c’est de savoir ce que pense son ancien enseignant des décisions qu’il a prises en cours de route. «Je le vois dans d’excellents films comme Transamerica et son talent m’impressionne, dit M. Renaud. Je n’ai pas de parti pris : il est objectivement très, très bon.»

Le temps n’a en rien altéré la relation entre M. Renaud et son ancien élève. L’acteur a d’ailleurs récemment fait un voyage de plusieurs heures pour aller jouer au golf avec M. Renaud à Guelph, comme dans le bon vieux temps.

Ce n’est là qu’un simple exemple du dévouement de M. Renaud dans sa carrière d’enseignant. «J’aime toujours découvrir comment mes élèves se sont débrouillés dans la vie, dit-il. Je pense qu’ils savent que ce qu’ils font me tient à cœur, même longtemps après la fin des cours.»

Et c’est exactement l’impression que M. Zegers avait de son enseignant.

«On dit qu’avec de la chance, un enseignant nous marquera à vie. Dans mon cas, ce fut Luc. Il est clairement né pour enseigner.»