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Enseignants remarquables

Photo de Megan Follows, actrice, dans le rôle de Catherine de Médicis. Elle porte un diadème, des bijoux en argent aux doigts et une robe somptueuse du XVIesiècle.

Construction d’une identité

L’icône canadienne Megan Follows nous parle de ses années passées sur les bancs de l’Institute of Child Study, et surtout de ses enseignants remarquables qui l’ont encouragée à explorer son talent pour jouer la comédie.

De Richard Ouzounian
Photo : Frank Ockenfels 3/The Cw©

Alors que, pour la plupart, nous avons passé notre adolescence à apprendre les premières leçons de la vie, Megan Follows a passé la sienne à maîtriser bien d’autres matières encore. Enfant actrice, l’icône canadienne (reconnaissable à sa chevelure rousse) a fait ses débuts dans le monde du spectacle il y a 35 ans et a récemment repris la place qui lui revient sous les projecteurs. Contre toute attente, et dans une industrie impitoyable, plusieurs diraient que la chance lui a souri. Mais si vous posez la question à Mme Follows, le secret de sa longévité à l’écran est dû aux nombreuses années passées sur les bancs de l’Institute of Child Study (l’«institut»), le premier centre de recherche multidisciplinaire de l’Université de Toronto – aufourd’hui appelé leDr. Eric Jackman Institute of Child Study.

«Tant de personnes un peu partout m’ont aidée à façonner ma vie; je leur en suis reconnaissante, affirme l’actrice de 46 ans, étoile du théâtre, du spectacle et de la télévision. Cependant, le temps que j’ai passé à l’institut, de la maternelle à la 6e année, fut le plus important de ma vie.»

Mme Follows est reconnue pour avoir joué le rôle d’Anne Shirley, une orpheline fougueuse dans l’adaptation de 1985 d’Anne… la maison aux pignons verts. Trente ans plus tard, elle attire une nouvelle génération d’admirateurs dans le rôle de Catherine de Médicis, la reine de France au caractère impétueux, dans la série télévisée La reine, tirée d’un roman historique.

Si on jetait un regard en arrière aux années de formation de l’actrice primée, il serait difficile de la reconnaître. «J’avais tendance à m’effacer, en raison d’un instinct de survie particulièrement bien développé. J’étais la plus jeune de quatre enfants – mon frère et mes sœurs connaissaient déjà une vie artistique. Et puis, il y avait ma mère et mon père (acteurs Dawn Greenhalgh et Ted Follows), qui n’étaient pas timides.»

Mme Follows a contribué à l’industrie familiale pour la première fois à l’âge de neuf ans et a fréquenté la classe de Diane Wicks un an plus tard. «Je la vois encore. Elle était une toute petite fille, dit l’enseignante de 5e année de l’artiste en herbe. Megan était intelligente et brave; elle prenait des responsabilités que peu d’enfants doivent assumer. Elle tournait une série télévisée à cette époque. On a donc essayé de concilier les deux principales facettes de sa vie : l’école et le travail. L’institut avait l’habitude d’accommoder les horaires atypiques des élèves.»

Mme Follows se souvient de Mme Wicks et la revoit se promenant dans la cour d’école pendant la récréation, une tasse de thé brûlant à la main. «Elle était toujours si calme, si rassurante. Quelles que soient les tempêtes qui faisaient rage dans ma vie, à la maison, à l’école ou sur le plateau, elle apaisait mon anxiété et me donnait à penser que tout allait s’arranger.»

Selon Mme Wicks, une façon efficace d’aider les élèves à canaliser leur énergie était d’exercer leur imagination fertile grâce à un long travail de rédaction. «Certains de mes élèves ont écrit des nouvelles à l’âge de dix ans», confirme l’enseignante. Megan possédait un immense talent pour tisser des intrigues fantastiques et donner naissance à des héroïnes élégantes, mais elle reconnaît que la grammaire n’a jamais été une de ses matières fortes. Néanmoins, elle se souvient de la délicatesse que son enseignante lui a témoignée. « Mme Wicks applaudissait mon énergie et mon imagination, puis elle m’invitait gentiment à m’exprimer avec les bons mots.»

Ted Hunter, enseignant de 6e année, a facilement pris la relève de Mme Wicks en exploitant le côté théâtral de Megan. Il nourrissait la passion de ses élèves pour la littérature par des mises en scène saisissantes.

Photo du personnel enseignant de l’Institute of Child Study, prise pendant l’année scolaire 1977-1978. Entre autres, Ted Hunter et Diane Wicks y figurent.
À gauche : Ted Hunter et Diane Wicks avec le personnel de l’Institute of Child Study, année 1977-1978; à droite : Dorothy Medhurst et deux de ses élèves, au temps où ils enseignaient à Megan Follows.

Photos : avec l’aimable autorisation du Jackman Institute of Child Study

«M. Hunter montait une scène comme personne d’autre; il aurait fait un directeur artistique formidable pour le film ou la télévision, déclare Mme Follows. Pendant un certain temps, on lisait beaucoup d’ouvrages d’Arthur Conan Doyle (aventures de Sherlock Holmes), puis on est tombé sur Le chien des Baskerville : il s’est éclaté.

«Je n’oublierai jamais le jour où il a tiré les rideaux afin d’obscurcir la pièce et nous a lu ce récit d’une voix merveilleusement riche et sinistre. Pour moi, l’intrigue a pris vie instantanément et, à vrai dire, M. Hunter m’a vraiment terrorisée! Mais il m’a fait comprendre le pouvoir que possèdent les mots d’une page quand quelqu’un les anime et ça, je ne l’ai jamais oublié, surtout comme actrice.»

Après 35 ans, M. Hunter se souvient de Megan comme un de ces élèves qu’un enseignant ne rencontre qu’une fois dans sa carrière. Bien qu’elle dût s’absenter souvent pour ses répétitions, elle ne passait pas inaperçue quand elle était en classe. Depuis, son ancien enseignant a suivi les progrès de l’actrice avec un vif intérêt.

M. Hunter a exploré inlassablement de nouvelles façons d’ajouter couleur et vie à sa pratique et aux cours d’art à l’institut. Quand John McInnes, ancien directeur d’école, lui a demandé ce qu’il avait fait de passionnant à ce jour, M. Hunter a perçu la question comme un signal : sors des sentiers battus, aussi souvent que possible. En fait, il a fréquemment fait équipe avec Dorothy Medhurst, enseignante d’art maintenant décédée, qui a également exercé une forte influence sur Mme Follows.

«Ils m’ont donné le courage d’utiliser mon imagination. À un certain stade de la vie, c’est le plus grand don qu’un enfant puisse recevoir de ses enseignants.»

«Mme Medhurst nous a appris que l’art venait de partout, explique l’actrice. Elle nous a proposé un projet où il fallait ramasser la charpie du filtre de la sécheuse, la filer comme de la laine et en faire un macramé!»

Son collègue, M. Hunter, se fiait entièrement au sens aigu du visuel de Mme Medhurst quand il élargissait les activités de sa classe en incluant des films produits par les élèves; il transformait un milieu scolaire ordinaire en plateaux de tournage fantaisistes.

M. Hunter et Mme Medhurst précisaient que tout ce qu’ils entreprenaient avait de profondes racines dans le programme d’études, mais cela ne voulait pas dire que les élèves ne pouvaient pas s’amuser à apprendre. «Ils m’encourageaient à explorer mon intérêt pour la comédie, dit Mme Follows en riant. Je me souviens d’avoir fait une série de sketches avec ma meilleure amie. On recréait les grands duos de la comédie tels Abbott et Costello, Laurel et Hardy. Mais il ne s’agissait pas seulement de s’amuser. On apprenait à travailler en équipe, à choisir le bon moment et à se connaître.»

Mme Wicks résume l’esthétique de ces occasions particulières. «On avait d’excellents enseignants; ils étaient toujours prêts à intégrer les arts dans leur salle de classe. Le tout a pris forme de façon plutôt naturelle – une chose suit l’autre, mais on a toujours pris soin de travailler avec les enfants à leur propre rythme.»

Les leçons que Mme Follows a apprises pendant ses premières années sont restées en elle à ce jour. Elle pense souvent à Mme Wicks, à M. Hunter et à Mme Medhurst. «Ils m’ont appris bien des choses, mais ce que j’apprécie le plus, c’est qu’ils m’ont donné le courage d’utiliser mon imagination. À un certain stade de la vie, c’est le plus grand don qu’un enfant puisse recevoir de ses enseignants.»

Cette rubrique met en vedette des personnalités canadiennes qui rendent hommage aux enseignantes et enseignants qui ont marqué leur vie en incarnant les normes de déontologie de la profession enseignante (empathie, respect, confiance et intégrité).