Gerry Dee a mis autant d’énergie dans sa carrière d’enseignant que dans celle de comédien. Son enseignant de 8e année, Joseph Onorati, EAO, lui a appris l’art de combiner rigueur, objectivité et humour, une leçon de vie.
De Bill Harris
Photos : Raina & Wilson
Même si l’humour est son gagne-pain, Gerry Dee fait une grande distinction entre l’enseignant qu’il était autrefois et celui qu’il incarne au petit écran. «Je n’étais pas le personnage que vous voyez dans Mr. D, affirme le créateur et la vedette de la comédie de situation à l’affiche depuis longtemps sur la CBC, dans laquelle il joue un enseignant dont l’égo vient souvent contrecarrer ses meilleures intentions. Quand j’enseignais, j’essayais, de bien des façons, d’imiter un enseignant que j’admirais.»
M. Dee, dont le parcours professionnel a été atypique mais rempli de succès, a enseigné pendant neuf ans avant de canaliser son énergie dans son autre passion : la comédie.
De qui a-t-il appris son approche pédagogique? De Joseph Onorati, EAO, son enseignant de 8e année à la St. Gabriel Catholic School, à Toronto.
«Avec du recul, je me dis que Joe était vraiment quelqu’un de formidable, même si je ne m’en étais pas rendu bien compte quand j’étais élève, se souvient M. Dee qui, à l’époque, était connu sous son vrai nom (Donoghue). Joe représentait un juste équilibre entre trois choses. Premièrement, on l’admirait et il était source d’inspiration pour beaucoup. Deuxièmement, il avait le sens de l’humour et savait quand s’en servir. Et troisièmement, il était strict et faisait ce qu’il y avait à faire. Comme j’ai pu l’apprendre en enseignant, il est rare d’incarner ces trois qualités.»
M. Dee se souvient du respect qu’il éprouvait pour M. Onorati. Quelle que soit l’approche rigoureuse ou enjouée, son enseignant savait gérer toutes les situations avec justesse et finesse.
«Joe n’était pas toujours tendre. C’est lui qui menait la barque, mais il était aussi le genre d’enseignant qu’on ne voulait pas décevoir, souligne M. Dee. Par moments, il a fallu qu’il me réprimande, mais je l’appréciais toujours autant. Je savais qu’il m’aimait bien et j’étais conscient que, parfois, j’en faisais un peu trop.»
Ces paroles font sourire M. Onorati.
«Quand Gerry dit que je l’aimais bien, il a tout à fait raison», affirme l’enseignant à la retraite.
Ayant travaillé en éducation pendant plus de 35 ans, M. Onorati a côtoyé des centaines d’élèves, tant dans la salle de classe qu’en tant que directeur adjoint et directeur d’école au sein du Toronto Catholic District School Board. Durant cette période, il a aussi occupé des postes à temps partiel en tant qu’instructeur du programme menant à la qualification de direction d’école à la faculté d’éducation de l’Université York de 2005 à 2010, puis en qualité de superviseur de stage faisant office de mentor de 2011 à 2017.
Après toutes ces années, M. Onorati se souvient encore très bien de M. Dee, et ce, pour une raison bien particulière.
«Gerry était dans ma toute première classe; je me demande s’il le sait. Je me rappelle même l’endroit où il s’asseyait. Il était très sociable, comme vous pouvez l’imaginer, dit M. Onorati, qui admet avoir compensé son manque d’expérience par son enthousiasme. Je crois que j’étais suffisamment humble et bienveillant pour que les élèves sachent que je voulais qu’ils apprennent.»
M. Dee se souvient d’avoir été un élève «pas mal bon». Selon M. Onorati, la vedette se sous-estime : «Croyez-moi, Gerry était un très, très bon élève.» C’est même lui qui a prononcé le discours d’adieu de sa promotion – un honneur que le comédien attribue davantage à ses compétences d’orateur qu’à ses prouesses scolaires. Pour M. Onorati, ce qui faisait la force de l’adolescent, c’était la somme de ces talents.
«Gerry voulait réussir, déclare son ancien enseignant. Je me souviens qu’il était extrêmement ordonné. Ses livres étaient toujours si bien rangés; il cochait les choses au fur et à mesure qu’il les faisait.» Ayant travaillé assez souvent comme entraîneur à l’époque, M. Onorati garde aussi en mémoire que Gerry était un bon athlète polyvalent ayant d’excellentes habiletés.
M. Dee doit bien reconnaître que, en classe, sur le terrain de jeu ou au gymnase, quel que soit l’endroit, il ne savait pas toujours quand lever le pied. Et c’est pour cette raison qu’un jour, se souvient-il, M. Onorati a dû s’entretenir sérieusement avec lui.
M. Onorati s’en souvient vaguement; il a eu ce type de conversation avec un certain nombre d’élèves tout au long de sa carrière. «Gerry apprenait vite, dit l’enseignant retraité. Il était le premier à finir les travaux et, quand on finit avant les autres, on se met à faire le clown.
«Cela dit, c’était peut-être à moi de lui donner autre chose à faire ou quelque chose de plus stimulant.»
Néanmoins, les méthodes pédagogiques de M. Onorati s’avéraient fort stimulantes pour M. Dee, et ce, de maintes façons et sous bien des formes.
Ni M. Dee ni M. Onorati n’en était conscient, mais, déjà à cette époque-là, le jeune élève emmagasinait de l’information qui lui serait utile non seulement en tant qu’enseignant, mais aussi, par la suite, en tant que comédien.
Plus tard, M. Onorati a appris que son ancien élève s’était orienté vers l’enseignement. Puis, au moment où M. Dee faisait le grand saut dans le monde de la comédie, leurs chemins se sont croisés à un évènement athlétique de fin d’année lors duquel M. Dee était le conférencier. Ils ont eu une brève conversation avant que l’acteur ne monte sur scène. «Gerry m’a mis en boîte, sans pitié; en bon comédien, il a parlé de mon style de discipline», raconte M. Onorati en riant.
«La réussite des élèves me remplit de fierté. Je ne parle pas de réussite financière, mais plutôt du fait qu’ils sont heureux, qu’ils font quelque chose d’épanouissant et qu’ils agissent comme de bons citoyens, explique M. Onorati. Je suis fier de Gerry, comme je le suis de tous mes élèves, et je crois que cette soirée-là nous a vraiment rapprochés.»
M. Dee admet qu’il lui a été difficile de choisir son pédagogue préféré, car il avait l’embarras du choix, que ce soit à St. Gabriel ou à De La Salle College, son école secondaire, à Toronto. Il se considère chanceux d’avoir fréquenté deux écoles qu’il a absolument adorées.
Mais Joe Onorati occupe une place de choix pour la vedette du petit écran.
«Joe me laissait faire le plaisantin, mais il savait aussi quand y mettre un terme, souligne M. Dee. En classe, c’était sérieux. Il était strict, très strict. Même à 12 ou 13 ans, j’avais compris pourquoi c’était si important. Nous [les élèves] avons fait travailler notre matière grise, nous avons beaucoup appris. Il nous a bien préparés pour l’école secondaire.
Je garde un excellent souvenir des cours de Joe. Tantôt strict, tantôt drôle, il faisait toujours ce qu’il y avait à faire. Pour moi, c’est la meilleure façon d’apprendre.»
Cette rubrique met en vedette des personnalités canadiennes qui rendent hommage aux enseignantes et enseignants qui ont marqué leur vie en incarnant les normes de déontologie de la profession enseignante (empathie, respect, confiance et intégrité).