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Première intervention

De Jennifer Lewington

L’internet et les médias sociaux ont peut-être changé la façon dont nous communiquons dans une situation de crise et la vitesse à laquelle les informations circulent, mais les principes fondamentaux demeurent les mêmes.

Photo illustrée d’un enseignant occupé à prendre des notes dans un cahier. À l’arrière-plan, une école et des symboles qui représentent des maisons.

Récemment, lors d’une agression violente entre élèves à l’extérieur de l’école — qui aurait pu avoir des répercussions à l’intérieur —, des responsables du Lambton Kent District School Board ont envoyé un message téléphonique informatisé aux parents afin de les informer des mesures prises pour assurer la sécurité des élèves.

Ce conseil scolaire figure parmi les premiers en Ontario à offrir aux parents et aux membres du personnel une application pour appareils mobiles qui leur permet de recevoir communiqués de presse, avis de fermeture de l’école et autres renseignements essentiels.

«Notre première obligation est la sécurité des élèves», affirme Jim Costello, EAO, directeur du Lambton Kent District School Board. Au cours de ses 18 années d’expérience en administration d’école et de conseil scolaire, M. Costello a connu des suicides, des incidents violents, des alertes à la bombe et une panoplie de fausses alarmes. Selon lui, une intervention rapide, le bon sens, l’honnêteté et le «plus grand égard» pour la sécurité des élèves sont les principes fondamentaux de la gestion de crises.

Communication instantanée

L’émergence des médias sociaux, tels que Facebook, Twitter et la messagerie texte, a transformé la gestion des crises.

«La vitesse à laquelle on se déplace et communique a changé», de dire M. Costello, avis que partagent les agents de communication chevronnés des conseils scolaires et les experts en gestion de crises.

En septembre dernier, conformément aux règles établies, une école secondaire du conseil scolaire a verrouillé ses portes après avoir eu vent que deux jeunes hommes s’étaient pointés dans le stationnement d’une école armés d’un pistolet. Brian Woodland, directeur des communications du Peel District School Board, est immédiatement passé à la vitesse grand V pour appuyer les premiers intervenants (hauts représentants du conseil scolaire, administration de l’école, police régionale de Peel), répondre aux médias et aux parents inquiets, et démentir les fausses informations dans Facebook et Twitter.

Dans le court moment qu’il a fallu à la police pour conclure que les deux hommes n’étaient armés que d’un appareil-photo en forme de L, «on avait déjà indiqué dans Twitter que la police avait trouvé un pistolet», se souvient M. Woodland.

Même dans le cas d’une fausse alarme, les responsables de l’école ne peuvent pas garder le silence.

«Que vous le vouliez ou non, votre histoire sera racontée. La question est de savoir si vous voulez qu’elle soit fondée sur des faits ou sur le ouï-dire», affirme M. Woodland.

Ross Parry, ancien chef des communications et des affaires publiques du Toronto District School Board, consacre aujourd’hui la moitié de son temps à Enterprise Canada, où il est directeur de la gestion des communications en situation de crise pour des clients du domaine de l’éducation, du secteur privé et du secteur industriel.

«L’internet et les médias sociaux ont entraîné un important changement de paradigme dans les communications en situation de crise, dit-il. Tout le monde est journaliste et photojournaliste, et les médias se servent de Facebook et de Twitter pour raconter leur histoire et créer un nouveau sentiment d’urgence.»

Toutefois, les règles de base de la gestion de crises n’ont pas changé : tisser des liens solides avec les intervenants avant qu’advienne une urgence, concevoir un plan d’intervention et le suivre.

Photo illustrée d’une école, de symboles de communication et d’un ordinateur portable qui affiche le logo de premiers soins.
Illustration : Katy Lemay/ Anna Goodson

Ne vous attendez pas à établir une relation avec les intervenants (parents, médias, organismes communautaires) au beau milieu d’une crise, explique M. Woodland, qui compte 20 ans d’expérience au sein du Peel District School Board.

L’année dernière, lors d’arrêts de travail, le Lambton Kent District School Board a organisé une téléconférence chaque semaine avec les directions d’école et les responsables des systèmes scolaires «pour tenir notre personnel au courant», affirme M. Costello. Il affichait aussi des bulletins d’information dans son site web.

Selon M. Woodland, si un élève apporte un couteau à l’école, «on a naturellement tendance au sein du système à se dire qu’il ‘‘ne faut pas parler du couteau.’’ Cependant, nous dirons qu’il a apporté un couteau.»

Répondre aux médias

Lorsqu’une école vit une crise, les médias sont parmi les premiers à s’informer auprès de la direction.

Malgré la protestation de certains membres des médias, M. Woodland utilise son Service des communications comme tampon entre les journalistes et la direction de l’école. De plus, les responsables des communications du conseil scolaire rédigent les lettres qu’envoie l’école aux parents et parlent au nom de la direction.

«Le personnel des communications va-t-il former 250 directions d’école sur les questions juridiques complexes? Non, et c’est là que les besoins de l’école et des médias diffèrent», déclare M. Woodland.

Toutefois, M. Parry fait remarquer que les attentes croissantes des médias poussent les conseils scolaires à rendre les directions d’école disponibles pour des entrevues, comme ce fut le cas en septembre dernier lorsqu’un directeur du Toronto District School Board s’est adressé aux journalistes après qu’un élève de 19 ans a été mortellement poignardé dans le hall d’entrée de son école secondaire. «[Les médias] veulent parler directement à la direction, explique M. Parry. Ils veulent sa réaction et savoir ce qu’elle pense.»

Désamorcer une crise

Même s’ils disposent d’un manuel de procédures, les dirigeants scolaires veulent garder une longueur d’avance en situation de crise.

«La communication et la gestion sont invariablement liées, de dire M. Parry. On ne peut gérer une réaction tardive à une crise par un bon plan de communication, et un mauvais plan de communication aura de sérieuses conséquences sur une réaction rapide.»

À la fin des années 1990, à North York, une bagarre a éclaté sur un terrain de basketball entre deux équipes d’écoles rivales, révélant, entre autres, des tensions raciales. À l’époque, le North York Board of Education, où M. Parry était chef des communications, a immédiatement annulé la saison de basketball, a organisé une formation pour les entraîneurs et a convoqué une réunion sur la violence dans les sports au secondaire. Cette combinaison de mesures à court et à long terme a permis de désamorcer la crise.

Mais surtout, comme le fait remarquer M. Parry, il faut mettre les plans d’intervention en cas de crise à l’essai au moyen de simulations, comme on le fait lors d’un exercice d’évacuation, pour s’assurer que les coordonnées des personnes-ressources sont à jour et que le personnel comprend bien la procédure à suivre.

«Il ne faut pas avoir peur d’une crise, dit-il, mais il faut se préparer, sinon, quand elle éclate, la peur prend le dessus et on a de la difficulté à y faire face.»