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Incertitudes d’un temps nouveau

Le surplus d’enseignants en Ontario, qui aura duré une décennie, est maintenant terminé. L’incidence de l’effectif des classes sur l’emploi des nouveaux enseignants suscite toutefois l’incertitude.

de Frank McIntyre, David Tallo et Elizabeth Malczak

Illustration d’un enseignant désignant un chevalet du doigt. Trois élèves sont assis à leur pupitre derrière lui.

En Ontario, les enseignants en début de carrière ont intégré plus facilement les conseils scolaires de la province au cours de l’année scolaire 2018-2019 qu’à tout autre moment au cours des 12 dernières années. Selon le plus récent sondage de l’Ordre sur la transition à l’enseignement, le taux de chômage des diplômés de l’Ontario en première année de carrière a encore baissé et se situe à seulement 5 %, tandis que celui des enseignants dans leur deuxième à cinquième année de carrière se situe en moyenne à 3 %. Ces taux sont bien inférieurs à ceux de 34 et de 21 % enregistrés aussi récemment qu’en 2014. Le taux de chômage des enseignants en première année de carrière est même inférieur au taux de 7 % enregistré en 2008.

La part des conseils scolaires de l’Ontario dans l’embauche d’enseignants en première année de carrière est en hausse : 86 % de tous les diplômés en enseignement qui commençaient leur carrière en 2018-2019 ont fait leur entrée dans des conseils de langue anglaise ou française de l’Ontario. L’enseignement à l’extérieur de la province est passé de 13 % en 2017 à seulement 6 % en 2019 et, dans les écoles indépendantes de l’Ontario, il est également en baisse, passant de 15 à 6 % sur deux ans.

Bien que le marché du travail ontarien soit plus favorable, les perspectives d’emploi demeurent précaires pour les enseignants en début de carrière, surtout chez ceux qui enseignent en anglais. L’effectif des classes au secondaire et les initiatives d’apprentissage électronique pourraient bien prolonger le temps qu’il faut aux nouveaux enseignants pour trouver un emploi permanent dans les écoles de la province.

Le marché du travail qui accueille les enseignantes et enseignants de l’Ontario interrogés en 2019 est radicalement différent de celui d’il y a cinq ans. Au cours de l’année scolaire 2013-2014, beaucoup plus d’enseignants en début de carrière qu’en 2018-2019 se disputaient des postes de suppléance, des contrats de remplacement à long terme et des emplois permanents. En 2014, près de 33 000 diplômés de l’Ontario ayant obtenu l’autorisation d’enseigner au cours des cinq années précédentes enseignaient ou cherchaient activement un emploi en enseignement dans la province. On estime que 7 700 d’entre eux étaient sans emploi. Cinq ans plus tard, dans un groupe comparable d’enseignants actifs sur le marché du travail, ce nombre a diminué de plus de 30 % pour totaliser environ 22 500. Le taux de chômage moyen avait chuté de 24 à 4 %, et l’on estime que, parmi eux, quelque 800 n’avaient pas d’emploi.


TAUX DE CHÔMAGE DES ENSEIGNANTS ANGLOPHONES
Une description plus détaillée figure ci après.

Graphique à barres intitulé «Taux de chômage des enseignants anglophones» contenant cinq sections et montrant le pourcentage en 2017, en 2018 et en 2019.

La première section s’intitule «Primaire-moyen» et présente les données suivantes :

La deuxième section s’intitule «Moyen-intermédiaire (maths ou sciences) et présente les données suivantes :

La troisième section s’intitule «Moyen-intermédiaire» (sauf maths et sciences) et présente les données suivantes :

La quatrième section s’intitule «Intermédiaire-supérieur» et présente les données suivantes :

La cinquième section s’intitule «Intermédiaire-supérieur» (sauf maths et sciences) et présente les données suivantes :



Des baisses aussi marquées ont été observées chez les enseignants nouvellement certifiés en Ontario et formés ailleurs au Canada ou à l’étranger. En 2019, la taille de ce groupe avait aussi beaucoup diminué; son taux de chômage était en baisse et l’on estime que le nombre d’enseignants sans emploi dans ce groupe est passé d’environ 3 900 en 2014 à moins de 600.

Parmi les nouveaux enseignants, le taux de chômage devrait rester faible au cours des prochaines années, et ce, pour plusieurs raisons. Tout d’abord, le n riptions à l’élémentaire et au secondaire augmente graduellement dans la province. Ensuite, beaucoup moins de nouveaux enseignants entrent dans la profession chaque année maintenant, comparativement aux grandes cohortes qui ont entrainé un surplus d’enseignants par le passé. Et, finalement, le nombre de départs à la retraite sera un peu plus élevé au cours des prochaines années qu’il ne l’a été depuis plus d’une décennie.

Les conseils scolaires de l’Ontario peuvent s’attendre à une pénurie persistante d’enseignants francophones et d’enseignants de français langue seconde. Les difficultés de recrutement se corseront pour les conseils scolaires qui tentent de remplir les listes de suppléance à la journée pour enseigner en anglais. Il risque aussi de manquer d’enseignants pour pourvoir des postes de remplacement à long terme et des postes permanents dans une région ou une matière précise.

En 2019, les diplômés de l’Ontario de tous les cycles ont signalé d’autres gains en matière d’emploi. Le taux de chômage des enseignants en première année de carrière, tous cycles confondus, se situait à près de 15 % en 2017. En 2019, le taux de chômage chez les enseignants qualifiés pour enseigner aux cycles primaire-moyen, moyen- intermédiaire et intermédiaire-supérieur a diminué pour atteindre 6, 3 et 4 % respectivement. Quant aux enseignants d’éducation technologique, ils déclarent le plein emploi pour la deuxième année consécutive.

Le taux de chômage varie selon la langue d’enseignement chez les enseignants en première année de carrière. Pour la troisième année consécutive, aucun diplômé d’un programme en français ne déclare être au chômage. Les enseignants de français langue seconde sont également tous employés. Le taux de chômage chez ceux qui enseignent en anglais s’élève à 7 %, une baisse considérable par rapport au taux de 19 % enregistré en 2017.

Les différences sont évidentes entre les cycles et les qualifications des enseignants qui travaillent en anglais. Ceux qualifiés pour enseigner aux cycles primaire-moyen signalent un taux de chômage de 9 %. Aucun enseignant des cycles moyen- intermédiaire qualifié pour enseigner les mathématiques ou les sciences ne signale de chômage pour la deuxième année consécutive. Les enseignants des cycles intermédiaire-supérieur qualifiés en mathématiques ou en sciences signalent un taux de chômage d’à peine 4 %. Les qualifications dans ces matières continuent de donner un avantage sur le marché du travail; en comparaison, les autres enseignants des cycles moyen-intermédiaire et intermédiaire-supérieur signalent un taux de chômage de 7 et de 8 % respectivement.


NOUVEAUX ENSEIGNANTS ET DÉPARTS À LA RETRAITE ANNUELS
Une description plus détaillée figure ci après.

Graphique à barres intitulé «Nouveaux enseignants et départs à la retraite» comparant le nombre de nouveaux enseignants par rapport aux départs à la retraite, de 2006 jusqu’aux prévisions de 2022.



Les Ontariens qui ont obtenu un diplôme en enseignement dans d’autres pays et les enseignants formés dans d’autres provinces canadiennes déclarent un taux de chômage moins élevé en 2019 qu’auparavant. Toutefois, les enseignants nouvellement arrivés au Canada et formés dans d’autres pays signalent un taux de chômage de 40 % en 2019, ce qui représente une hausse par rapport au taux de 35 % une année plus tôt.

Malgré que le milieu de travail soit généralement positif pour les futurs diplômés en enseignement de l’Ontario, nombre d’enseignants éprouvent encore des difficultés à passer d’un emploi précaire à un poste permanent. Le parcours professionnel des enseignants francophones et anglophones varie considérablement. Les enseignants anglophones employés par les conseils scolaires de l’Ontario sont ceux qui mettent le plus de temps à obtenir un emploi permanent.

De nombreux répondants à notre sondage 2019 ont exprimé des inquiétudes quant à l’incidence de la taille des classes au secondaire et des initiatives obligatoires d’apprentisage électronique sur les perspectives d’obtention d’un poste permanent dans les années à venir.

Les enseignants embauchés par les conseils scolaires de langue française décrochent rapidement un poste permanent. Plus de la moitié d’entre eux l’obtiennent au cours de l’année qui suit l’obtention de l’autorisation d’enseigner et plus de quatre sur cinq, avant la fin de la troisième année de carrière. De même, plus d’un diplômé sur trois qualifié pour enseigner le français langue seconde qui travaille dans les conseils scolaires de langue anglaise obtient un poste permanent au cours de sa première année de carrière. Avant la fin de leur cinquième année de carrière, plus de quatre de ces enseignants francophones sur cinq détiennent un emploi permanent.

Seulement 6 % des enseignants au sein d’un conseil scolaire de langue anglaise, non qualifiés pour enseigner le français langue seconde, obtiennent un poste permanent la première année de leur carrière, et moins de la moitié d’entre eux en obtiennent un avant la fin de leur cinquième année de carrière. Cette très lente progression professionnelle est le résultat d’un surplus beaucoup plus important et plus long d’enseignants anglophones au cours de la dernière décennie. Le surplus d’enseignants francophones a été, quant à lui, de très courte durée et remplacé par une nouvelle pénurie il y a plusieurs années.


ENSEIGNANTS EN DÉBUT DE CARRIÈRE AYANT UN POSTE PERMANENT
Une description plus détaillée figure ci après.

Graphique à barres intitulé «Enseignants en début de carrière ayant un poste permanent» contenant trois sections et montrant le pourcentage en 2017, en 2018 et en 2019.

La première section s’intitule «Conseils scolaires de langue française» et présente les données suivantes :

La deuxième section s’intitule «Enseignants qualifiés pour enseigner le FLS dans les conseils scolaires de langue anglaise» et présente les données suivantes :

La troisième section s’intitule «Enseignants anglophones dans les conseils scolaires de langue anglaise» et présente les données suivantes :



Un autre facteur contribue à la lenteur de la progression professionnelle des enseignants anglophones : le processus d’embauche par étapes dans les conseils scolaires de langue anglaise, qui exige que l’on ait une longue expérience de suppléance avant de pouvoir être admissible à postuler un contrat à long terme ou un poste permanent.

L’admissibilité à l’embauche n’est pas transférable d’un conseil scolaire à l’autre. Ainsi, les enseignants inscrits sur les listes de suppléance et ceux qui détiennent un contrat de remplacement à long terme doivent attendre qu’un poste permanent, pour lequel ils possèdent les qualifications, se libère au sein de leur conseil scolaire où ils ont suffisamment d’ancienneté. Même les suppléants très expérimentés ne peuvent poser leur candidature dans d’autres conseils scolaires, et même à des postes pour lesquels ils possèdent les qualifications.

De nombreux répondants à notre sondage 2019 ont exprimé des inquiétudes quant à l’incidence de la taille des classes au secondaire et des initiatives obligatoires d’apprentisage électronique sur les perspectives d’obtention d’un poste permanent dans les années à venir.

Une enseignante nous a dit : «J’ai été agréablement surprise au cours de ma première année de carrière en enseignement. J’ai posé ma candidature pour obtenir un contrat de remplacement à long terme la première semaine de septembre, et j’ai commencé à travailler tout de suite. Les changements apportés à l’effectif des classes auront certainement une incidence sur ma capacité d’obtenir un emploi permanent dans un proche avenir, mais je reste optimiste.»

TAUX DE CHÔMAGE EN PREMIÈRE ANNÉE DE CARRIÈRE
Une description plus détaillée figure ci après.

Section intitulée «Taux de chômage en première année de carrière» contenant quatre graphiques circulaires et montrant le pourcentage en 2017, en 2018 et en 2019.

Le premier graphique circulaire s’intitule «Primaire-moyen» et présente les données suivantes :

Le deuxième graphique circulaire s’intitule «Moyen-intermédiaire» et présente les données suivantes :

Le troisième graphique circulaire s’intitule «Intermédiaire-supérieur» et présente les données suivantes :

Le quatrième graphique circulaire s’intitule «Éducation technologique» et présente les données suivantes :



Les estimations du gouvernement varient grandement quant au nombre de pertes d’emploi en enseignement qui résulteront des plans visant à ne pas remplacer un certain nombre de départs à la retraite sur une période de quatre ans. De nombreux enseignants en début de carrière seraient limités à des contrats précaires de suppléance et à des contrats de remplacement à long terme beaucoup plus longtemps que prévu. Au secondaire dans les écoles de langue anglaise, les pénuries se manifesteraient beaucoup plus graduellement que ne le prévoient les données démographiques sur l’offre et la demande.

L’augmentation de l’effectif des classes est en cours en 2019-2020 et a déjà des répercussions sur les contrats des enseignants en début de carrière, comme le prévoyaient de nombreux répondants au sondage. Des discussions se tiennent actuellement au sujet de l’ampleur des pertes d’emploi au cours des prochaines années, et l’incertitude règne quant au plein effet sur les enseignants en début de carrière.