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Enseignants remarquables

Marnie McBean, médaillée d’or olympique, souriante et portant des médailles d’or olympiques autour du cou. Elle est debout, les mains sur les hanches.

La réussite : un travail d’équipe

Une équipe de rêve formée de quatre enseignants a eu une grande influence sur l’adulte que Marnie McBean allait devenir : athlète primée, mentore et chef de mission d’Équipe Canada aux Olympiques de 2020.

De Richard Ouzounian
Photo : ANDREW LAHODYNSKYJ/TEAM CANADA; COURTESY OF MARNIE MCBEAN

Il n’est pas surprenant que l’éducation de Marnie McBean se soit faite par le sport d’équipe. L’un des athlètes les plus accomplis de l’histoire canadienne et l’un des deux seuls Canadiens à avoir gagné trois médailles d’or aux Olympiques d’été, Mme McBean a récemment été nommée chef de mission par Équipe Canada aux Olympiques de Tokyo en 2020; prochaine étape logique de la carrière de cette leadeure, entraineure pour les Jeux olympiques et motivatrice née. Son livre The Power of More résume son point de vue sur l’automotivation.

D’une sincérité désarmante, Marnie McBean admet que nombre des qualités qui lui ont permis d’atteindre le sommet lui ont été inculquées alors qu’elle était toute jeune, avant même que l’aviron devienne sa principale activité.

C’est la Park Lawn Junior Middle School, à Etobicoke en Ontario – école qu’elle a fréquentée jusqu’en 1982 – qui a, dit-elle, contribué à la façonner et à la modeler, et c’est là qu’on lui a montré comment devenir la personne qu’elle est devenue.

Ce n’est pas un enseignant en particulier de Park Lawn qui l’a guidée, mais plutôt une véritable «équipe de rêve» composée de pédagogues qui l’ont aidée à trouver sa voie. «Si vous m’aviez demandé qui a changé ma vie, j’aurais eu du mal à répondre en nommant une seule personne, confie-t-elle. Au Canada, je ne pense pas qu’on fabrique un héros comme ça. Nous puisons ici et là parmi les gens qui nous ont aidés le long du chemin.»

D’une certaine façon, il a fallu un certain temps à Marnie McBean pour trouver sa voie. Fervente athlète dès son jeune âge, c’est toutefois à l’âge de 16 ans que les Olympiques l’ont attirée pour la première fois. En regardant les Jeux d’été de Los Angeles en 1984, elle a été conquise par la camaraderie et la joie des athlètes.

«Elle rendait la musique amusante sans la banaliser. Bien au contraire. Elle parlait de théorie. Elle nous aidait à comprendre le mécanisme de la musique, puis nous faisait faire des travaux de recherche.»

C’est plus tard, cette année-là, après avoir vu Oxford Blues, un film mettant à l’affiche Rob Lowe et montrant une image dramatique et enthousiaste de l’aviron de compétition, que l’aviron est devenu son sport de prédilection.

Bien que cette révélation se soit produite peu de temps après l’école intermédiaire, ce sont ces années d’école qui l’ont préparée à tout ce qui allait lui arriver, se souvient-elle.

Quand on lui demande comment elle était à cette époque, Mme McBean s’esclaffe : «J’avais une forte personnalité! J’avais une certaine assurance, bien ou mal placée. Bien sûr, j’avais aussi des doutes et je me posais des questions. Je ne suis pas parfaite! Et je m’attirais parfois des petits ennuis.»

L’un des enseignants qui l’a beaucoup influencée durant ces années-là était Barb Abbott, qui lui a enseigné la santé en 6e année. «Je me souviens d’avoir eu des conversations “normales” avec elle. Peut-être que j’étais une enfant mature, une vieille âme en sorte, et je pense qu’elle l’a perçu.»

Mme McBean se presse d’ajouter : «J’ai toujours su que mes enseignants étaient mes enseignants. Je n’ai jamais senti qu’ils étaient mes amis ou mes copains, mais ils me parlaient comme on parle à une personne à part entière, et c’est ce qui a fait toute la différence.»

John Armstrong l’a fortement impressionnée au cours de ces années. «C’était un enseignant remarquable. Je l’ai eu comme titulaire de classe, et il m’a enseigné les maths et l’histoire. Je me souviens qu’il était ferme : il ne tolérait jamais le laisser-aller.»

Mais c’est pendant les activités parascolaires que M. Armstrong a laissé la plus forte impression sur la jeune Marnie : «Il était entraineur d’échecs et y excellait. Il avait formé des ligues et nous faisait jouer de façon compétitive. C’est ce qui m’a plu, la compétition. J’étais parmi les 25 meilleurs joueurs de moins de 16 ans au niveau national», raconte Mme McBean. Elle dit que c’est M. Armstrong qui lui a enseigné à penser stratégiquement, une compétence qui lui a servi plus tard pour l’entrainement et la compétition. «Aux échecs, je connaissais tous les premiers mouvements et je savais où ils menaient. Je me souviens que M. Armstrong disait : “Ça, c’est l’ouverture Kasparov. Apprends-la.” Et c’est ce que j’ai fait.»

Son enseignante de musique, Mary Matsui, a aussi eu une grande influence sur la jeune Marnie. «Elle était petite et menue et avait un style bien particulier. Elle portait des pantalons à pattes d’éléphant, de grands cols, des trucs comme ça, se souvient Mme McBean. Elle rendait la musique amusante sans la banaliser. Bien au contraire. Elle parlait de théorie. Elle nous aidait à comprendre le mécanisme de la musique, puis nous faisait faire des travaux de recherche. J’avais choisi le groupe The Police. J’ai dû chercher à comprendre tout ce que Sting mettait dans ses chansons.»

Marnie McBean et son ancienne enseignante Mary Matsui, souriantes. Marnie McBean porte des médailles d’or olympiques autour du cou.
En visite à son école intermédiaire en 1992 après sa victoire aux Jeux olympiques, Marnie McBean a pris une photo
avec son ancienne enseignante, Mary Matsui.

Mme McBean réfléchit à ses enseignants de Park Lawn et à leurs contributions durables. «J’aimais les enseignants qui enseignaient du concret, qui pouvaient faire des analogies qui me parlaient, affirme-t-elle. Si un enseignant présentait une analogie qui m’accrochait, je ne l’utilisais pas seulement dans la matière en question, je m’en servais aussi dans la vie, dans l’aviron. Et je m’en sers encore aujourd’hui!»

Elle se souvient d’un enseignant de maths au secondaire qui insistait sur la résolution de problèmes, technique qui lui a beaucoup servi à l’université dans ses cours en biométrie. «Vous savez, dans le genre : “Si a égale b, alors c égale quoi?” Il nous montrait à prévoir stratégiquement les prochaines étapes, à revenir sur une équation et à comprendre le principe sous-jacent, et non pas à chercher simplement la réponse au problème immédiat.»

Mme McBean a toujours recours aux processus d’analyse dans sa vie et dans la compétition. D’ailleurs, elle en parle dans son livre The Power of More :

«Avant chaque régate, pour nous donner une idée réaliste de ce qui s’en vient, mon entraineur, mon partenaire d’aviron et moi-même utilisons les données sur nos compétences et notre vitesse, et les comparons à celles de nos adversaires, puis nous créons un profil de prédiction de la course. Nous ne tenons pas pour acquis que cette prédiction va se concrétiser exactement, mais nous gardons en tête que ça pourrait être le cas.» [notre traduction]

À l’école, toutes ces grandes leçons de vie faisaient partie des interactions quotidiennes en classe. «À l’époque, je le faisais sans y penser. Quand on utilise ces outils, on ne sait pas vraiment d’où ça vient. Mais c’est bien de s’arrêter et de se poser des questions qui nous obligent à fouiller notre mémoire. Avec le recul, on peut vraiment reconstituer le puzzle», raconte Mme McBean.

Elle se souvient aussi d’un autre aspect de sa vie qui s’est beaucoup développé à cette époque-là. «Comme j’étais une bonne lectrice en 1re et en 2e année, on m’a demandé de travailler avec des élèves dont l’anglais n’était pas la langue maternelle. Je suis devenue bonne à aider les autres.» Ces expériences à aider les autres dans leur apprentissage ont pu planter la graine qui l’a aidée à réussir plus tard en tant qu’entraineure et mentore.

Après qu’une blessure l’a empêchée de participer aux Olympiques de 2000 et l’a abruptement obligée à abandonner l’aviron compétitif, le Comité olympique canadien l’a embauchée en tant que spécialiste de la préparation et du mentorat d’athlètes olympiques. Elle travaillait alors de près avec cinq équipes olympiques canadiennes dans différents sports et elle travaille maintenant avec une sixième.

Il est évident que les enseignants de Marnie McBean ont eu une grande influence sur elle. En 1992, elle est revenue à Park Lawn pour parler aux élèves et au personnel. Voici le message qu’elle leur a livré : «Essayez tout, choisissez ce que vous aimez le plus et travaillez-y très, très fort.»

Mme McBean garde en mémoire un autre moment de cette année-là. Elle venait tout juste de descendre de l’avion qui la ramenait des Olympiques de Barcelone en 1992. Elle revenait avec deux médailles d’or autour du cou et blaguait avec un journaliste en lui disant qu’elle se demandait où elle allait les garder, étant donné qu’elles étaient «un peu lourdes pour des boucles d’oreilles». Puis, en levant les yeux sur la foule, elle a aperçu John Armstrong, cet enseignant sincère qui lui avait enseigné l’art de la stratégie et qui était venu la saluer dans ce moment de gloire.

«C’est un moment que je n’oublierai jamais.»

Cette rubrique met en vedette des personna- lités canadiennes qui rendent hommage aux enseignantes et enseignants qui ont marqué leur vie en incarnant les normes de déontologie de la profession enseignante (empathie, respect, confiance et intégrité).