En réponse au défi de l’éducation postsecondaire mondiale


La transformation qui se fait au sein de l’éducation postsecondaire en Ontario est d’importance historique. Mais la quantité de nouvelles options qui s’ouvriront bientôt aux élèves ontariens grâce à ces changements aura un impact encore plus important.

 


de Douglas Auld

Jusqu’à l’an dernier, l’éducation supérieure en Ontario était dispensée par un système universitaire qui conférait des grades et un système collégial qui conférait des diplômes. La seule exception était l’Institut polytechnique Ryerson, qui conférait également des grades d’études appliquées et qui, au milieu des années 90, est devenu une université.

Contrairement à ce qui se passe aux États-Unis, où le grade d’associé s’obtient au terme d’un programme d’études collégiales de deux ans, les collèges de l’Ontario n’avaient pas le droit de conférer des grades.

Tandis que la structure du système postsecondaire ontarien est restée plus ou moins la même, ailleurs au Canada et dans le monde, des changements rapides sont survenus. Les collèges communautaires de l’Alberta ont obtenu le droit de conférer des grades d’études appliquées à certaines conditions. En Colombie-Britannique, cinq collèges communautaires sont devenus des collèges universitaires possédant le droit de conférer des grades de premier cycle. La Nouvelle-Zélande a créé un système d’établissements conférant des grades d’études polytechniques tandis qu’en Grande-Bretagne, plusieurs écoles polytechniques sont devenues des universités.

PROGRAMMES EN ÉVOLUTION

Même si la structure postsecondaire est demeurée la même en Ontario, les programmes collégiaux ont néanmoins évolué pour satisfaire aux nouvelles demandes.

Les changements ont débuté au début des années 90, lorsque plusieurs programmes ont été liés à des programmes universitaires en Ontario, dans les autres provinces, aux États-Unis et dans d’autres pays. Les établissements conférant des grades universitaires ont reconnu qu’une partie importante du curriculum des collèges était suffisamment similaire à celui des universités. Il était donc normal de faire compter les crédits collégiaux pour les grades universitaires.

Le changement officiel de statut des programmes collégiaux est survenu durant les deux dernières années lorsque le gouvernement provincial a enfin été convaincu que les forces uniques et particulières des collèges pouvaient fournir une base aux baccalauréats en études appliquées bien différente de celle qu’offre le secteur universitaire.

ARRIMAGE AVEC LES GRADES UNIVERSITAIRES

Depuis le début des années 90, et encore aujourd’hui, les universités canadiennes et étrangères reconnaissent que la formation postsecondaire des collèges communautaires constitue, dans bien des cas, une excellente base à des études universitaires.

Un certain nombre d’universités ontariennes reconnaissent jusqu’à 100 pour 100 des crédits de certains programmes collégiaux, du moment que les diplômés de ces programmes ont maintenu une certaine moyenne.

Les diplômés en garde éducative du Collège Loyalist qui obtiennent une moyenne d’au moins B+ durant leurs deux années d’études collégiales passent à la troisième année lorsqu’ils s’inscrivent à l’Université de Guelph au programme de quatre ans en études de l’enfant. Cette entente représente une excellente solution de rechange à l’orientation strictement universitaire qui est de tradition. La combinaison de la formation collégiale axée sur une application intense et celle de l’université à caractère plus théorique est une formule imbattable.

GRADES D’ÉTUDES APPLIQUÉES

Quelle est la différence entre le baccalauréat de quatre ans en études appliquées et le baccalauréat universitaire? L’examen des programmes des établissements qui confèrent des grades indique qu’il y a combinaison de cours de gestion et d’acquisition de compétences professionnelles supérieures qui sont souvent relatives à la nature particulière du programme.

Presque tous ces programmes sont d’une durée de quatre ans. Dans certains cas, l’essentiel des compétences professionnelles supérieures est offert durant les deux premières années, ce qui permet à l’étudiant d’obtenir un diplôme au terme de cette période sans avoir à terminer les quatre ans pour obtenir le grade.

Le besoin de tels programmes d’études découle surtout de la nature de plus en plus complexe du travail dans plusieurs industries et entreprises. La gestion de l’environnement, la robotique, l’animation informatique, les systèmes de design industriel et le génie informatique sont des domaines qui se prêtent à un programme de quatre ans à forte composante en compétences professionnelles. Ces grades universitaires intéressent les élèves du secondaire qui visent une approche plus pratique pour développer leur savoir et leurs compétences.

POSSIBILITÉ D’INSTITUTS POLYTECHNIQUES

En plus de considérer la possibilité d’accorder aux collèges le pouvoir de décerner des grades, le gouvernement provincial a présenté à l’Assemblée législative une nouvelle loi sur la régie des collèges communautaires de l’Ontario. La première lecture de la Loi concernant l’ouverture et la régie de collèges d’arts appliqués de technologie s’est faite le 4 décembre 2001.

Des collèges obtiennent le droit de conférer des grades

Le 27 mars dernier, neuf collèges ont obtenu l’autorisation du gouvernement ontarien de conférer des grades pour les programmes suivants (offerts en anglais seulement) :

• Collège Algonquin – Bachelor of Applied Business (E-Business Supply Chain Management)

• Collège Centennial – Bachelor of Applied Information Science (Computer and Communication Networking)

• Collège Conestoga – Bachelor of Applied Technology (Integrated Advanced Manufacturing Technologies), Bachelor of Applied Technology (Integrated Telecommunication and Computer Technologies)

• Collège George Brown – Bachelor of Applied Business (Financial Services)

• Collège Georgian – Bachelor of Applied Business (Automotive Management)

• Collège Humber – Bachelor of Applied Business (E-Business), Bachelor of Applied Arts (Paralegal Studies)

• Collège Mohawk – Bachelor of Applied Technology (Process Automation)

• Collège Seneca – Bachelor of Applied Business (Financial Services Management), Bachelor of Applied Technology (Environmental Site Remediation)

• Collège Sheridan – Bachelor of Applied Arts (Animation).

La loi contient une clause sur la possibilité de faire quelque chose de bien différent avec les collèges et le débat actuel porte sur leur transformation en instituts polytechniques. Pendant des dizaines d’années, Ryerson a été le seul institut polytechnique de l’Ontario et, pendant un certain temps, peut-être même le seul au Canada.

Dans d’autres parties du monde, les instituts polytechniques sont chose commune et, dans certains cas, des lieux de recherche et d’études supérieures importants. Fondé en 1824, l’Institut polytechnique Rensselaer aux États-Unis est l’un des établissements les plus importants à décerner des grades. L’Institut polytechnique de Milan offre des programmes universitaires; certains d’entre eux sont même de cinq ans. La Nouvelle-Zélande et l’Allemagne offrent aussi de la formation polytechnique.

Pour le diplômé du secondaire qui compte exercer une profession pratique dans des domaines tels que la gestion de l’environnement, les sciences de la construction, le design industriel de pointe ou la gestion des ressources humaines, une formation polytechnique de quatre ans est le choix idéal. Même à l’heure actuelle, un pourcentage important – 15 à 20 pour cent – des diplômés du secondaire qui possèdent assez de crédits pour aller à l’université choisissent un programme collégial. Une formation polytechnique serait tout indiquée pour ces élèves.

QUATRE COLLÈGES SONT INTÉRESSÉS

En ce moment, quatre collèges ontariens, Loyalist, Conestoga, Humber et Sheridan, ont exprimé publiquement leur volonté de se transformer en institut polytechnique. Y aurait-il une différence entre ces établissements et les autres collèges ontariens offrant un ou deux grades d’études appliquées?

Un bref examen de la philosophie guidant trois instituts technologiques réputés de trois pays fournit une partie de la réponse. L’Institut polytechnique de Worcester (WPI) aux États-Unis est un petit établissement qui compte 2 700 étudiants de premier cycle et 1 000 étudiants de 2e et de 3e cycle à temps plein ou à temps partiel. La mission de Worcester est de «fournir [...] aux étudiants une base conceptuelle solide en génie, en gestion, en sciences humaines et en sciences sociales. Chaque étudiant du WPI doit se qualifier en réalisant un projet d’importance majeure et [...] démontrer sa capacité d’appliquer les compétences, méthodes et connaissances du domaine à la résolution d’un problème représentatif d’une situation concrète.»

Le curriculum est unique en son genre, car il y a peu de cours d’une heure ou de laboratoires de trois heures structurés. La majeure partie du curriculum est à base de projets, le travail étant exécuté individuellement ou en équipe.

L’Institut polytechnique Waikato de Hamilton en Nouvelle-Zélande compte des programmes d’études de premier cycle donnant droit à un certificat, un diplôme ou un grade. Les programmes menant à un grade «visent une formation professionnelle et pratique basée sur l’acquisition de compétences de haute qualité.» Une partie importante de tous les programmes porte sur l’acquisition de compétences en gestion et le lien existant entre les compétences professionnelles et gestionnaires.

L’Institut de technologie de la Colombie-Britannique à Vancouver est l’un des plus grands au Canada. Pour élaborer les programmes, l’Institut a sollicité la participation des employeurs de la Colombie-Britannique afin que les programmes avancés répondent aux nouveaux besoins de la main-d’œuvre. La plupart des programmes menant à un grade sont une combinaison de ce qu’on pourrait appeler des cours universitaires traditionnels et de formation pratique avancée et basée sur des compétences particulières. Plusieurs cours traitent des défis techniques réels du monde du travail.

Ces divers établissements ont plusieurs caractéristiques en commun : acquisition de compétences professionnelles avancées, application des connaissances au monde du travail, défis réels du monde du travail, participation des employeurs à l’élaboration des programmes et proportion des programmes menant à des grades d’études appliquées.

Alors, qu’est-ce qu’un institut polytechnique? Sans prétendre à une définition normative, on pourrait dire qu’il s’agit d’un établissement d’éducation postsecondaire où une portion importante des programmes d’études fournissant une formation générale et professionnelle avancée mènent à un grade qui s’applique directement au travail.

On pourrait également qualifier l’institut polytechnique d’établissement dont l’approche par rapport au milieu d’apprentissage est la même pour tous les programmes menant à un grade d’études appliquées. Ces programmes bénéficieraient probablement de l’appui de la recherche appliquée.

ÉDUCATION DU XXIe SIÈCLE

L’avènement d’ententes d’arrimage de toutes sortes entre les collèges et les universités de l’Ontario et d’ailleurs représente un tremplin extraordinaire pour les diplômés du secondaire qui aspirent à un grade. En Ontario, le College University Consortium Council (CUCC) donne aux élèves un guide des transferts en ligne.

L’attribution de grades d’études appliquées par les collèges communautaires ontariens et la création dans la province d’un nombre limité d’instituts polytechniques amèneront l’Ontario plus loin dans le XXIe siècle en matière d’éducation supérieure.

Les grades d’études appliquées donnent aux étudiants l’occasion d’acquérir des compétences et des connaissances dans des domaines où l’application des connaissances au travail domine le curriculum. La nouvelle économie, quelle que soit la définition qu’on lui donne, engendre des emplois qui exigent des résultats d’apprentissage associés aux grades d’études appliquées.

L’existence de grades d’études appliquées dans les collèges donnera également aux étudiants qui possèdent deux ans de formation collégiale la possibilité d’ajouter à cette expérience en étudiant pour obtenir un grade d’études appliquées et ainsi satisfaire leurs nouvelles aspirations ou répondre aux changements du monde du travail.

L’émergence des instituts polytechniques en Ontario – ou collèges universitaires à certains endroits – permettra à la province d’aligner son éducation supérieure sur celle d’autres provinces et pays. Enfin, les établissements qui confèrent des grades d’études appliquées et adoptent une philosophie de l’éducation supérieure reliant l’apprentissage et le travail attireront davantage de fonds pour des projets de recherche nouveaux et uniques en leur genre.


Douglas Auld est président du Collège Loyalist de Belleville. Avant d’occuper ce poste, il a été professeur et président du département d’économie à l’Université de Guelph. Il a également enseigné à l’Université de Colombie-Britannique, à l’Université Duke et à l’Université Trent.

Accueil | Bloc générique | Archives

Mot du président  |   Mot du registrateur  |   Des professeurs remarquables  |   Pages bleues
...en terminant  |   Lu, vu, écouté  |   Calendrier  |   Cyberespace  |   Questions fréquentes  |   Courrier des lecteurs

Ordre des enseignantes et des enseignants de l'Ontario
121, rue Bloor Est,
Toronto ON  M4W 3M5
Téléphone : 416-961-8800 Télécopieur : 416-961-8822  Sans frais en Ontario : 1-888-534-2222
www.oct.ca
revue@oct.ca