De la confiance à revendre


Une enseignante exemplaire offre aux enfants un moyen d’acquérir de la confiance et d’aimer l’art.

de Leanne Miller

«Les enseignantes et les enseignants peuvent donner deux choses à leurs élèves : le désir d’apprendre et un sentiment de confiance.» C’est ce principe qui guide Lucie Legault-Shrider dans son enseignement.

Pendant 17 ans, elle a enseigné au primaire pour le Conseil scolaire de district du centre-sud-ouest et le Conseil scolaire catholique de district du centre-sud. Depuis deux ans, elle enseigne les 4e et 5e années à l’école Corpus Christi à Oshawa. L’an dernier, le Toronto Sun l’a choisie parmi les 1 200 candidats en lice pour faire partie des «Dix enseignants de l’année».

À propos de l’enseignement, Legault-Shrider dit que son travail est de «susciter chez les élèves un sentiment de réussite et de fierté. Je veux qu’ils soient contents d’eux-mêmes et de ce qu’ils font. Comme ça, ils aimeront l’école et voudront apprendre.»

«Je ressens beaucoup d’enthousiasme à propos de ce qu’ils apprennent, poursuit-elle, et je m’efforce de transmettre cet enthousiasme à mes élèves. Je veux qu’ils n’aient pas peur de faire des erreurs, comme tant d’autres enfants. Je ne veux pas qu’ils se découragent. J’insiste sur le fait qu’ils peuvent apprendre de leurs expériences, des mauvaises comme des bonnes. Il y a un règlement dans notre classe qui oblige chacun à se sentir important. Je favorise cela en vantant ce qu’ils font de bien, même les petites choses. Je donne à chacun l’occasion de réussir, en offrant une variété d’activités d’apprentissage qui font appel aux divers modes d’apprentissage.»

LES ÉLÉMENTS NÉGATIFS AUSSI

Legault-Shrider montre son affiche murale sur le conseil coopératif où paraissent les règles de l’harmonie en classe. Elle enseigne ces règles au début de l’année et les révise au besoin. À la hauteur des enfants, il y a quatre enveloppes étiquetées : Bravo! (les compliments à faire), Merci! (les remerciements à faire) Je n’aime pas (les problèmes en classe) et J’aimerais (les souhaits).

Lorsque des problèmes surviennent en classe ou dans la cour, elle encourage ses élèves à en prendre note sur un bout de papier et à le déposer dans l’une des enveloppes. «Le vendredi après-midi, nous nous mettons en cercle pour discuter des problèmes — jamais des personnes — et des stratégies de résolution possibles. Nous effectuons un remue-méninges sur des stratégies susceptibles d’améliorer les comportements indésirables et ça marche. L’objectif du conseil coopératif est de ne jamais laisser de problème en suspens à lafin de la semaine pour que nous puissions tous travailler dans une atmosphère positive.»

À titre d’exemple, elle mentionne le cas d’un garçon qui posait des problèmes à tout le monde. «Son nom ne finissait plus d’apparaître dans les enveloppes et il est vite devenu un obstacle à l’apprentissage. On a discuté de son hyperactivité, et lorsque les élèves ont compris qu’il était incapable de contrôler son comportement et qu’il n’agissait pas par malveillance, ils ont voulu l’aider. Quelqu’un a suggéré qu’on lui donne une balle anti-stress chaque fois qu’il se mettrait à se conduire mal. Les enfants ont travaillé ensemble à lui rappeler de mieux se conduire et on a bientôt pu constater des signes d’amélioration. Parce qu’ils avaient tous participé à la solution, ils avaient à cœur qu’elle fonctionne.»

LES BEAUX-ARTS

«La 4e année est le bon endroit pour introduire les élèves aux beaux-arts, ajoute Legault-Shrider. L’unité couvre la recherche, l’écriture, la lecture, ainsi que les études sociales, les sciences, les mathématiques, la langue et les arts. Ce qui est formidable, c’est que les enfants prennent le projet en charge et qu’ils ont la possibilité d’exercer leur créativité. Je les laisse décider de ce qu’ils veulent produire comme activité finale, ce qui les pousse à prendre en charge leur apprentissage et à produire un travail exceptionnel.»

L’unité de trois semaines commence par une introduction à l’art. Legault-Shrider prend appui sur leurs connaissances et stimule leur intérêt en leur demandant qui sont les artistes dont ils ont entendu parler. Elle leur demande ensuite pourquoi les gens dessinent et pourquoi il y a des œuvres d’art. Les objectifs sont de personnaliser le sujet et de faire participer les élèves.

Elle présente ensuite un aperçu de l’art, en commençant par ce qui s’est fait dans les cavernes par les premières civilisations. Capsule, un texte de 4e année, est une ressource extraordinaire pour débuter l’unité. Plus tard, les élèves font un tableau chronologique des artistes et des périodes dont ils ont parlé.

Legault-Shrider utilise aussi la populaire série Où est Charlie? et compare l’une des illustrations au tableau de Bruegel, Jeux d’enfants. Les deux images présentent le monde du point de vue des enfants. Elle amène les élèves à les analyser en leur posant des questions sur ce qu’ils voient dans les images, ce qu’ils pensent qu’était la vie du temps de Bruegel, ce que les enfants font pour s’amuser, le réalisme des activités, les vêtements, les jeux qu’ils reconnaissent. Elle encourage les enfants à comparer les images à leur propre monde, puis ils discutent du réalisme en art.

Toujours en utilisant le texte, Legault-Shrider fait un survol des techniques artistiques et les initie aux œuvres de Monet, Matisse, Picasso, Gauguin, Van Gogh et Munch. «C’est formidable, dit-elle, lorsque les enfants reconnaissent les peintures ou le nom des artistes. On discute ensuite des conditions sociales dans lesquelles vivaient ces artistes, puis on explore les techniques employées par ces artistes. Enfin, j’incite les élèves à choisir la technique qu’ils préfèrent et à dire pourquoi.»

PEINTURE ET POÉSIE

«Ils peignent ensuite quelque chose dans le style de leur choix. Il faut y travailler, mais les enfants s’y mettent à fond et produisent d’excellents résultats. Puis, nous parlons de poésie pour qu’en fin de compte, les élèves écrivent un poème sur leur peinture, sur ce qui les inspire ou sur quelque chose qui se rapporte à ce qu’ils ont peint.»

«L’introduction à la poésie débute par une association de mots. Je choisis un mot comme neige, ce qui donne lieu à un remue-méninges pour trouver des mots créateurs et descriptifs. J’enseigne ensuite les caractéristiques principales d’un poème : la structure, le fait qu’un poème porte essentiellement sur une idée ou un concept et que la poésie fait appel à des techniques linguistiques particulières : rime, rythme, son ou jeu de mots. Puis, on écrit un poème ensemble. Je les encourage alors à écrire leur propre poème en complément de ce qu’ils ont peint. On parle de rime, mais les élèves ne sont pas tenus de rimer leur poème. Je veux qu’ils aient du plaisir à manier la langue, non pas des difficultés.»

Après, les élèves travaillent par paires à un travail de recherche sur l’artiste de leur choix. Legault-Shrider structure le travail en leur donnant une liste de ressources et de questions. Ils montent une mini-biographie à laquelle ils ajoutent un texte sur la façon dont l’artiste vivait et sur le sujet de ses œuvres. «Les enfants adorent apprendre ce qui est arrivé à l’oreille de Van Gogh ou découvrir ce qu’était le jardin de Monet, ajoute-t-elle.

«Quant je leur donne le travail à faire, je fournis également les critères d’évaluation pour qu’ils sachent comment je les noterai. Les élèves préparent un rapport écrit et le présentent devant leurs camarades de classe. Je les encourage aussi à faire le lien entre la vie des artistes et la leur et ce qui a motivé le sujet de leurs peintures.»

EXPOSITION

Legault-Shrider veut que ses élèves fassent l’expérience du processus artistique au complet. «Leur défi, explique-t-elle, est d’organiser et de présenter une grande exposition, habituellement dans le gymnase. Je les laisse décider de l’endroit et de l’ampleur de l’événement, ainsi que de la liste d’invités (famille, autres classes, reporters du journal de l’école, artistes locaux, etc.). Je les laisse aussi décider de l’installation de l’exposition. Ils apprennent à déterminer les éléments nécessaires au succès d’une exposition, puis se divisent en équipes pour travailler dans cet objectif. Parfois même, ils ont de la nourriture à vendre, le tout présenté de façon artistique, bien sûr.

«Ils veulent habituellement encadrer leur peinture. Je fais souvent appel à des parents qui ont du talent en construction et ils sont toujours ravis d’aider l’équipe d’encadrement. Il y a aussi la grande aventure qu’est l’installation de l’exposition. Les enfants décorent le gymnase, montent l’installation et exposent les œuvres, créent des affiches (Défense de fumer, Grimaces interdites, Bâillements interdits). Souvent, ils souhaitent contrôler la circulation au moyen de flèches et de panneaux indicateurs. À côté de chaque peinture, il faut une étiquette donnant le nom de l’artiste, ainsi que le titre et une brève description de l’ouvrage. Il y a beaucoup à faire.»

«L’exposition a généralement lieu fin octobre ou début novembre, et un peu avant les vacances de Noël, je les emmène au Musée des beaux-arts de l’Ontario. Au début, j’ai eu peur qu’ils s’ennuient. Mais ils sont tellement imprégnés de ces artistes qu’ils ne s’ennuient pas du tout. En fait, ils sont fascinés et enchantés de pouvoir reconnaître les artistes et les originaux. La visite les amuse énormément et je suis tellement fière de les entendre discuter de l’artiste ou de la technique. Les guides du musée aussi sont impressionnés.»

INTÉGRATION FERTILE

Legault-Shrider commente l’intégration de l’unité. «Elle englobe une variété de sujets et de compétences. En science, on parle de spectre et de mélange de couleurs. La recherche, l’écriture et la poésie sont du domaine de la langue. Les enfants acquièrent aussi du vocabulaire et font même des maths quand ils calculent le temps qui les sépare des artistes. L’examen de la vie à l’époque des artistes leur fait faire des sciences sociales, et la recherche et le travail en équipe qu’ils font sont des facteurs de succès importants. Il y a, bien sûr, les arts visuels auxquels on n’accorde pas assez de temps. Les enfants aiment s’exprimer par les moyens différents que sont la poésie et la peinture. Le sens de l’organisation et la pensée critique se développent aussi chez les enfants tandis qu’ils élaborent et réalisent l’exposition. Ils s’acquittent fièrement de leurs responsabilités et font toujours un travail extraordinaire. Cette unité est l’événement majeur de la 4e année, pour mes élèves et pour moi-même.»

Qui sait? Le prochain Jean-Paul Riopelle dira peut-être un jour que Lucie Legault-Shrider lui a ouvert le chemin de la grandeur artistique.

Lucie Legault-Shrider recommande les ressources suivantes : Discovering Great Artists. Hands-On Art for Children in the Styles of the Great Masters de M.F. Kohl et K. Solga, Bright Ring Publishing Inc.

Light and Colour. Straightforward Science de P. Riley. Franklin Watts
Quand revient septembre… Guide sur la gestion de classe participative,
série de Jacqueline Caron

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