|
MandatAudiences disciplinaires – protéger l’intérêt du publicNous sommes un lundi matin du début d’octobre. Il est 9 h 30. Partout dans les écoles de la province, les cours sont commencés. Tout va bien. Sauf pour un enseignant en particulier. Il fait face à un sous-comité formé de ses pairs et se défend en public contre des allégations de faute professionnelle. La salle d’audience du sixième étage des bureaux de l’Ordre, au 121 de la rue Bloor Est à Toronto, est austère, simple mais sérieuse, à l’instar des salles d’audiences criminelles. L’audience est officielle, menée tel un procès devant un sous-comité formé de trois membres du conseil élus par les enseignants et nommés par le gouvernement. Leur travail consiste à écouter les discussions, à soupeser les preuves, à déterminer si le membre en cause a manqué de professionnalisme et à ordonner une sanction appropriée, et ce, dans l’intérêt de la protection du public. À côté du membre en cause, à une table faisant face au sous-comité et à la droite d’un podium, est assis son conseil juridique (celui qui défend le cas contre les avocats de l’Ordre qui, eux, représentent le public). La partie plaignante est assise à la gauche du podium. Aujourd’hui, le membre en cause est présent. Ce n’est pas toujours le cas. Bien qu’ils reçoivent un avis d’audience, certains membres choisissent de ne pas être présents et de laisser quelqu’un d’autre (un avocat) défendre leurs intérêts. Dans certains cas, le membre est incarcéré à la suite d’une décision de la cour criminelle et ne peut donc se présenter. À la table située à la droite du sous-comité est assis le coordonnateur ou la coordonnatrice des audiences, qui veille à ce que l’audience se déroule bien et que toutes les participantes et tous les participants aient les documents nécessaires pour juger de l’affaire. La conseillère ou le conseiller juridique indépendant (généralement un avocat chevronné ou un juge à la retraite) est assis à côté du coordonnateur des audiences. Son rôle est de fournir des conseils au sous-comité et d’aider à interpréter et à clarifier les questions juridiques. De l’autre côté de la salle, un sténographe inscrit chacun des mots prononcés pendant l’audience. Les trans-criptions ne sont généralement fournies aux membres du sous-comité ou aux avocats que si l’audience s’étend sur plusieurs jours ou si l’accusé souhaite porter la décision en appel devant la Cour divisionnaire de l’Ontario. Les transcriptions sont aussi en vente au Service de sources documentaires juridiques. À la gauche du sous-comité (en face de la table de sténographie) et bien visible par tous, se trouve un siège pour toute personne qui serait appelée à témoigner par la partie plai-gnante ou le membre en cause. Les places réservées au public sont limitées et attribuées selon l’ordre d’arrivée. Bien que le public soit le bienvenu, les appareils d’enregistrement ne le sont pas. Les participants à l’audience et le public se lèvent à l’arrivée des membres du sous-comité et ne s’assoient qu’au moment où ils sont invités à le faire. Le président du sous-comité présente les motifs de l’audience et demande au membre en cause s’il plaide coupable ou non coupable, ou s’il ne conteste pas les allégations. Si l’on demande des copies de l’avis d’audience, de l’énoncé conjoint des faits ou des décisions du comité (en général, ce sont les représentants des médias qui le font), le coordonnateur des audiences les présente au sous-comité. Une fois que les membres du sous-comité ont lu la demande au dossier et que les conseils juridiques des deux parties sont informés, les documents peuvent être distribués. Les énoncés conjoints des faits paraissent dans la décision finale écrite, laquelle est disponible à la bibliothèque de l’Ordre en écrivant à biblio@oeeo.ca. Les avocats de l’Ordre présentent le cas au nom du public. La défense réfute. Les membres du sous-comité peuvent poser des questions en tout temps ou se tourner vers le conseil juridique indépendant, au besoin. La plupart des audiences ne durent pas plus de quelques heures. «Un très faible pourcentage des 220 000 pédagogues agréés et qualifiés de l’Ontario commet une faute professionnelle, déclare la directrice des Enquêtes et des audiences de l’Ordre, Francine Dutrisac, EAO. Notre but est de veiller à ce que les membres en cause aient droit à une audience juste et en temps opportun, et aussi à ce qu’ils aient le droit de fournir des réponses complètes et de se défendre.» L’audience d’aujourd’hui est une des quelque 75 qui sont menées chaque année. «Les pédagogues travailleurs, honnêtes et ayant un bon sens de l’éthique peuvent parfois trouver difficile de voir le processus disciplinaire de l’Ordre comme un privilège de l’autoréglementation, confie le président du comité de discipline, Jacques Tremblay, EAO. Nous traitons ces questions avec grand respect, et diligence. Pour chaque cas, nous faisons ce que nous croyons être dans le meilleur intérêt des Ontariennes et Ontariens, et des élèves de la province.»
Le sous-comité soupèse toutes les preuves, soumissions, énoncés conjoints des faits (le cas échéant), le plaidoyer et les conseils juridiques avant de rendre sa décision. Parfois, on rend les décisions rapidement, après une courte pause pour permettre aux membres du sous-comité de délibérer dans une autre salle. En d’autres occasions, il faut plus de temps pour analyser la situation et même des réunions séparées pour permettre aux membres du sous-comité de discuter davantage de l’affaire. Le sous-comité peut ordonner des sanctions comme la réprimande, l’admonestation ou la réception de conseils, ou encore enjoindre au registrateur de suspendre le certificat de compétence et d’inscription du membre jusqu’à 24 mois, voire de le révoquer. Dans d’autres cas, si le sous-comité trouve que le membre est incompétent, on lui ordonne souvent de suivre des cours menant à une qualification additionnelle ou à une qualification de base additionnelle, ou encore des cours en gestion de classe. Le sous-comité de discipline peut aussi imposer des conditions particulières et des restrictions à un certificat de compétence et d’inscription. Par exemple, dans les cas de non-respect des limites physiques ou éthiques, on peut ordonner à un membre coupable de faute professionnelle de suivre, à ses frais, un cours préalablement approuvé par le registrateur. On peut aussi lui imposer de régler une amende allant jusqu’à 5 000 $ ou les frais de l’audience. Aujourd’hui, le sous-comité rend une décision orale : suspension et conditions. Une décision écrite suivra et comprendra les allégations, les faits pertinents soutenus par les preuves et les raisons de la décision, ainsi que la sanction. Le sous-comité a aussi ordonné la publication d’un sommaire de la décision dans la revue officielle de l’Ordre, Pour parler profession. M. Tremblay ajoute : «La publication permet de rassurer le public pour qu’il sache que tous les membres de l’Ordre ont à cœur la sécurité des enfants et l’intégrité de notre système d’éducation. Nous faisons cela en démontrant que la profession enseignante traite les cas de faute professionnelle de façon appropriée.» |