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Les enseignantes remarquables de Bruce Cockburn Ruth Sutherland, Trudy Janowski et Elsie Beauchamp
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C’est avec bonheur que Bruce Cockburn se remémore les années passées
à la Broadview Public School à Ottawa, se rappelant avec aise les enseignantes
qu’il a admirées. Elles semblaient avoir un réel plaisir à se trouver dans
une classe et à enseigner.
Ruth Sutherland lui a enseigné en 3e et 4e années. Le souvenir qu’il en a n’est pas lié à une matière en particulier, mais à l’énergie qu’elle dégageait dans la classe. «Elle inspirait le désir et l’enthousiasme d’apprendre. Elle embrassait la vie, dit-il, et son dynamisme se transposait chez ses élèves par le goût de l’apprentissage.» Cockburn se rappelle affectueusement d’une autre enseignante, Trudy Janowski — la seule d’ailleurs qu’il ait rencontré à nouveau après être devenu musicien accompli. Elle lui a enseigné le français au secondaire. «Mademoiselle Janowski a été l’une des meilleures enseignantes que j’ai eues, se rappelle-t-il. Elle nous traitait avec respect et nous faisait tous sentir intelligents. Cette attitude faisait toute la différence.» Pour Cockburn, le système scolaire de l’époque s’attendait à ce que les élèves apprennent et voulait qu’ils apprennent. Les élèves recevaient une formation plus complète et «il semblait plus facile d’apprendre et de devenir quelqu’un. Je doute qu’il en soit ainsi aujourd’hui.» Cockburn a revu Trudy Janowski alors qu’il donnait un spectacle au Centre national des arts d’Ottawa. L’ancienne enseignante de français était mariée à Hugh La Caine, inventeur du premier synthétiseur électronique et organisait des événements au Centre. Elle a rappelé à Cockburn leur passé. «Elle m’a dit qu’elle avait toujours cru que je réussirais dans la vie parce que je remettais en question tout ce qui m’entourait», se rappelle Cockburn. «J’ai aimé tous ceux qui m’ont enseigné à l’élémentaire, ajoute Cockburn, mais Elsie Beauchamp me faisait une peur bleue.» Elsie Beauchamp enseignait à la 5e année à l’école Broadview en 1955; Cockburn avait dix ans à l’époque. «Elle imposait une discipline de fer, ce que je n’aimais pas du tout», précise-t-il. Il appréciait son intérêt pour l’histoire, qu’il partageait d’ailleurs. «Madame Beauchamp avait un sens inné de l’histoire. C’était bien plus qu’une collection de dates à retenir. Elle se passionnait pour les événements de l’histoire.» Elsie Beauchamp a également incité Cockburn à passer une audition pour la chorale de l’école, même s’il ne voulait pas. Pendant les auditions, elle et une autre enseignante circulaient entre les élèves pour les écouter chanter. «J’avais évité que l’on me choisisse en chantant totalement faux», ajoute Cockburn. Aujourd’hui, il croit qu’elle a été la première à l’initier à l’idée d’action politique. C’était à l’époque du maccarthysme et Cockburn se rappelle qu’Elsie Beauchamp avait parlé du chanteur et pacifiste Pete Seeger. À cette époque, Seeger avait été contraint de paraître devant le Comité des activités anti-américaines du Congrès, mais avait refusé de répondre aux questions sur ses allégeances politiques et de nommer ses associés, précisant que ces questions violaient ses droits rattachés à l’article 1 de la constitution. D’après Cockburn, il fallait beaucoup de courage pour parler de cette question à l’école. La chasse aux communistes n’était pas aussi virulente au Canada qu’aux États-Unis, mais l’influence du maccarthysme a suffi pour que l’on perçoive les sympathisants aux activistes comme posant un danger pour la paix sociale et la stabilité politique. D’autres propos tenus par Elsie Beauchamp sont restés gravés dans la mémoire de Cockburn. En relatant une nouvelle sur les troubles politiques en Turquie, elle avait demandé à ses élèves s’ils connaissaient la signification du terme radical. Bien entendu que non. Et elle leur a expliqué. Cockburn ne se rappelle plus des mots qu’elle avait utilisés, mais il a un souvenir très clair du sens de son explication : un radical, c’est quelqu’un dont la conscience l’oblige à ne pas accepter le statu quo sans le remettre en question et qui travaille en vue de modifier les choses qui sont injustes. La conscience sociale de Cockburn et son intérêt pour les événements internationaux ont commencé à faire surface à la fin des années 70 avec Where the Lions Are, ce qui l’a motivé à écrire certaines de ses chansons les mieux connues, dont bon nombre paraissent sur son nouveau disque intitulé Anything Anytime Anywhere, qui compte en plus deux nouveaux titres. Cockburn s’est par la suite lié de près à des causes sociales comme la préservation environnementale et l’action politique autour des luttes pour les libertés démocratiques en Amérique latine et en Afrique du Sud. «Je ne crois pas avoir été influencé directement par quoi que ce soit, mais indirectement, oui, j’ai été influencé. Tout ce qui nous arrive pendant notre jeunesse a une influence sur ce que l’on devient et fait partie de notre vie.» Si les premiers jalons de l’action politique ont été posés à cette époque, qu’est-ce qui a fait que vous avez emprunté la voie que l’on sait? Trois événements ont joué un rôle majeur dans ma vie. Le premier est la naissance de ma fille. «Comme tout le monde, devenir parent a changé ma façon de voir le monde qui m’entoure.» Ensuite, ce sont les voyages — il a commencé à voir ce qui se passait ailleurs dans le monde. Puis, c’est la participation de son frère, Don Cockburn, dans le soulèvement politique au El Salvador. «Mon frère essayait toujours de m’intéresser à ce qui se passait là-bas et j’ai voulu voir à quoi pouvait ressembler de près une révolution étant donné que cela ne semblait pas ressembler à ce que je m’attendais.» Cockburn a appris que des enseignantes et enseignants de l’Ontario intègrent dans leur programme ses écrits, tout particulièrement les paroles de ses chansons. Même s’il se sent très flatté par ce geste, il croit quand même qu’ils feraient mieux d’étudier quelqu’un comme T.S. Eliot.
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