CITOYENNETÉ VIRTUELLE


«Peu importe la matière, si l’école est un établissement où l’on enseigne la démocratie, elle est également un lieu où l’on peut enseigner la citoyenneté. Enseigner aux élèves les usages bons et mauvais des médias représente un élément essentiel d’un bon citoyen.»

– John Myers


de Leanne Miller

John Myers est un enseignant exemplaire. Il a enseigné en Ontario, en Colombie-Britannique, à l’élémentaire, au secondaire et à l’université. Myers a commencé sa carrière en enseignant l’histoire et les sciences sociales à Toronto. Dès ses débuts, il a participé à la rédaction d’un curriculum qui avait comme point de départ le multiculturalisme.

Depuis 1994, Myers enseigne à l’Institut d’études pédagogiques de l’Ontario de l’Université de Toronto (IEPO/UT) au département curriculum, pédagogie et apprentissage. Il a largement pratiqué le coenseignement dans une école secondaire du coin et a été évaluateur d’un programme novateur de formation à l’enseignement en Nouvelle-Zélande.

En plus de son travail à plein temps à la formation initiale et en supervision, il fait aussi la critique de nombreux profils de cours du cycle supérieur liés au nouveau curriculum de l’Ontario. Voici ce que Myers avait à dire au sujet des étudiants en formation initiale à l’IEPO/UT : «En moyenne, ils sont moins verts que les étudiants d’il y a 20 ans, grâce à des critères d’admission élargis. Cela signifie qu’ils sont mieux préparés à travailler en classe. En outre, les professeurs à la formation initiale sont aussi mieux préparés. Il est évident que les élèves de l’Ontario tirent profit de ces changements positifs.»

«Si vous voulez vivre longtemps de manière productive, vous vous devez d’être optimiste», ajoute-t-il en parlant des changements qu’il remarque à l’école ces jours-ci. «En règle générale, plus d’enseignantes et d’enseignants mettent à l’essai de nouvelles stratégies d’évaluation. Plus particulièrement, je suis heureux de constater l’utilisation d’évaluations fondées sur le rendement et la sensibilisation au besoin de reconnaître les divers styles d’apprentissage et les intelligences multiples chez les élèves.»


L ’ É C O L E      D E      L A      D É M O C R A T I E

«La sagesse professionnelle est très répandue, précise-t-il, ce qui compte cependant, c’est de trouver les bons éléments et de les diffuser.» Sa philosophie de l’éducation se résume probablement mieux en paraphrasant Churchill : «Peu importe les imperfections du système public d’éducation, il demeure la meilleure solution possible. C’est vraiment l’école de la démocratie.»

Myers a aussi tenu compte des éléments négatifs à l’école. «Bien entendu, il se trouve de nombreux enseignants et enseignantes désillusionnés, mais aucun d’entre eux ne se plaint des enfants. Ils aiment la compagnie des enfants et reconnaissent leurs différences. Ce sont les enfants qui, dans bien des cas, les ont décidés à joindre cette profession. Ce sont aussi souvent eux qui font qu’ils y restent.»

Les charges d’enseignement se faisant de plus en plus lourdes, Myers suggère «de prendre une bouffée d’air et de se concentrer sur ce qui compte, peu importe les pressions externes. Étant donné que nous ne pouvons tout faire, il faut donc choisir ce qui importe et bien le faire. De toute façon, nous n’avons toujours pas atteint l’âge d’or en éducation, il vaut donc mieux s’efforcer de s’améliorer.»

Comment y parvenir? Myers propose une stratégie adaptée d’un ouvrage de Grant Wiggins et Jay McTighe intitulé Understanding By Design et publié par l’Association for Supervision and Curriculum Development. Cette stratégie suggère trois éléments que les enseignantes et enseignants doivent définir pour encadrer leurs leçons.

  1. D’abord, bien comprendre au-delà de la classe et de l’école. Quelles sont les compétences et connaissances les plus importantes qu’un élève peut tirer de ma leçon?
  2. Ensuite, à connaître et à faire. Quelles compétences extracurriculaires et concepts d’importance l’élève doit-il tirer de ma leçon?
  3. Enfin, l’importance de s’y familiariser. Quelles connaissances et compétences peuvent servir d’étapes pour aider mes élèves à bien connaître et bien comprendre?


Voici un exemple pratique de cette stratégie tiré d’une unité d’études de 10e année en histoire sur la Première Guerre mondiale, fondée sur une discussion que Myers a eue récemment avec un groupe d’enseignantes et d’enseignants d’histoire du secondaire.

  1. Comment la Première Guerre mondiale a-t-elle permis au Canada de se définir comme nation? À quoi devrait-on penser au Jour du souvenir?
  2. Comment peut-on reconnaître la propagande? Les gouvernements sont-ils plus ou moins démocratiques qu’à l’époque des guerres? Pourquoi?
  3. Quelles sont les caractéristiques importantes d’une guerre de tranchées? Pourquoi Billy Bishop est-il devenu un héros de guerre célèbre? Myers a fait cette observation. «Si l’enseignant peut concentrer son travail sur la nécessité de relever et d’enseigner les principaux éléments, alors l’élève en tirera profit et nous deviendrons tous plus efficaces. En outre, si l’enseignant peut planifier ses leçons en fonction de ce modèle, les principales questions aux tests et examens lui viendront tout naturellement, ce qui lui fera gagner du temps plus tard.»

Il a ajouté que «lorsqu’un groupe d’enseignantes et d’enseignants d’un secteur se livrent ensemble à un exercice de la sorte, ils ont bien plus de chance d’atteindre une certaine uniformité. Ce type de discussion précise aussi les questions pédagogiques et d’évaluation tout en favorisant la collaboration, soit un élément important dans une école qui fonctionne bien et pour lequel le personnel enseignant n’a plus le temps.»


P L A N      D E      L E Ç O N

Généralités et contexte

Cette leçon fait partie d’une unité sur l’analyse de questions publiques relatées et interprétées par les médias. «Cible du jour» est une leçon basée sur les actualités se servant de l’Internet. Bien que le contenu abordé fasse partie du nouveau cours d’éducation à la citoyenneté, la méthode et les compétences nécessaires peuvent servir à une variété de matières.

Étant donné que le cours ouvrant droit à un demi-crédit est enseigné par de nombreux enseignants et enseignantes qui ne sont pas spécialistes en la matière, Myers a choisi un plan de leçon qui pourrait servir à plusieurs.

Attentes générales de l’unité et de la leçon
L’élève est en mesure de :

  • démontrer sa capacité de faire une recherche sur des questions d’importance dans le domaine de la citoyenneté
  • faire un examen critique et créatif de ces questions.
Attentes spécifiques de l’unité et de la leçon

L’élève est en mesure de :

  • formuler des questions
  • trouver de l’information à partir de divers types de sources (textes, références spéciales, médias, cartes géographiques, ressources communautaires, Internet, etc.)
  • relever les idées principales, les détails, les points de vue et préjugés sur ce matériel
  • bien organiser l’information (sommaire, notes, échéance, présentoir, carte, tableau comparatif, etc.).

Preuve de la compréhension
L’enseignant sait que l’élève comprend ce qui a été enseigné et qu’il répond aux attentes quand il démontre qu’il peut :
  1. déterminer des critères de comparaison entre journaux qui ont couvert la même affaire le même jour
  2. voir des ressemblances et des différences dans la sélection des faits qui ont servi à présenter une nouvelle.
Question essentielle
Quelle est la question essentielle obligatoire qui ressort de cette leçon? «Peut-on toujours croire ce qu’on lit dans les journaux?» Une fois cette leçon terminée, l’élève reconnaît la nature sélective des reportages dans les journaux.

Activités d’enseignement et d’apprentissage
Déterminez la date de Cible du jour. Cela peut être n’importe quel jour ou une journée près d’un événement spécifique, comme une élection. Cette version en ligne de Cible du jour tient pour acquis que les élèves ont accès à des ordinateurs et qu’ils savent chercher de l’information précise dans le web. Elle tient aussi pour acquis que le journal local est de l’extérieur de Toronto. Les enseignantes et enseignants de la région de Toronto peuvent remplacer leurs journaux par le Ottawa Citizen, le Hamilton Spectator, le Windsor Star, le Kingston Whig-Standard, le London Free Press et ainsi de suite. La version en ligne de ce plan de leçon peut se terminer en une séance de 75 minutes, recherche comprise.

  1. L’enseignant organise la classe en équipes égales de trois ou quatre élèves.

  2. Les élèves choisissent au sort la version électronique de l’un des journaux suivants. Ce sont-là des exemples de journaux canadiens en ligne dont les sites web sont volumineux; il en existe bien d’autres.

    • Vancouver Sun
    • Calgary Sun
    • Regina Leader-Post
    • Winnipeg Free Press
    • Toronto Star
    • Montreal Gazette
    • Halifax Chronicle-Herald
    • St. John’s Telegram

  3. Les élèves trouvent la page d’accueil du journal qu’ils ont choisi et la parcourent.

  4. Les élèves répondent à des questions sur cette page d’accueil.

    • quelles sont les manchettes ?
    • combien d’entre elles sont de nature locale, provinciale, nationale, internationale?
    • combien d’entre elles sont de nature politique? non politique?

  5. Une fois la classe réunie, les élèves déterminent divers critères de comparaison des journaux avant de discuter de leurs réponses au no 4.

  6. De retour en équipe, sur une échelle de 1 (totalement différent) à 10  (identique), les élèves tentent de prévoir le degré de comparaison entre les journaux de tout le pays. Ils doivent justifier ou expliquer leurs prévisions. Enfin, ils écrivent leurs réponse au no 4 sur papier quadrillé ou au tableau pour que le reste de la classe puisse comparer les journaux en fonction du contenu de leur édition électronique.

  7. Les équipes comparent leurs conclusions pour chacun des journaux à l’aide des critères qu’ils ont déterminés, nommément :
  8. • ressemblances
    • différences
    • point de vue régional ou local de l’article.

  9. Les élèves jugent le degré de ressemblance entre les journaux sur l’échelle de 1 à 10, comparent ces résultats par rapport à leurs prévisions, disent pourquoi leurs prévisions étaient correctes ou erronées et expliquent les différences.

Instruments d’évaluation
L’enseignant observe et commente :

  • les critères déterminés par l’équipe pour comparer les journaux
  • le sommaire de chaque équipe (au tableau ou sur papier)
  • la qualité de l’analyse et du raisonnement des élèves.
Suivi
L’enseignant peut demander aux élèves de poursuivre l’activité en explorant le journal en ligne et en cliquant sur un article précis sur la politique et de le lire. Quand des équipes se servant de journaux différents trouvent des articles en commun, elles devraient poursuivre la comparaison en répondant aux questions suivantes :
  • de quels faits chacun des journaux s’est servi pour exprimer son point de vue?
  • ces journaux se servent-ils des mêmes faits ou de faits différents?
  • comment peut-on expliquer ces différences?
Modifications (version non Internet)
L’enseignant devrait demander aux élèves d’écrire une lettre à d’autres villes de l’Ontario, du Canada ou d’Amérique du Nord afin d’obtenir une copie papier de leurs quotidiens publiés à une date précise. Bien que la classe doive attendre avant de recevoir les journaux demandés, la version imprimée peut servir à de nombreux usages et pour de nombreux cours, ce qui donne d’autres possibilités de faire du travail plus poussé. Un autre avantage d’utiliser la version imprimée tient dans le fait que de nombreux journaux ont un site web peu développé. Toutefois, cette situation change constamment.

Se servir de diverses formes de médias imprimés et autres comme ressources pendant ce cours peut aussi permettre aux élèves de répondre à d’autres attentes du cours, notamment :


A T T E N T E S      G É N É R A L E S

L’élève est en mesure de :

  • faire la preuve qu’il comprend les défis inhérents à la gestion d’une communauté ou d’une société dans laquelle co-existent divers systèmes de valeurs, diverses perspectives et divers objectifs civiques.

A T T E N T E S      S P É C I F I Q U E S

L’élève est en mesure de :

  • comparer les diverses croyances, valeurs et perspectives des citoyens canadiens sur les questions d’intérêt public (la vie privée, la réduction de l’âge de voter, l’accès à l’information, le service militaire obligatoire, l’autogestion des Autochtones, la souveraineté du Québec, etc.)
  • expliquer comment différents groupes (groupes d’intérêt, groupes ethnoculturels, etc.) définissent leur citoyenneté et déterminent les croyances et valeurs qui se reflètent dans cette définition
  • analyser une question d’actualité dans laquelle s’opposent des croyances et valeurs contradictoires, tout en décrivant et en évaluant les positions en conflit
  • décrire comment leurs croyances et leurs valeurs, et celles des autres, peuvent se lier pour en arriver à des objectifs civiques communs et à des types privilégiés de participation.
U T I L I S A T I O N      P O U R      D ’ A U T R E S      M A T I È R E S

La méthode et les compétences requises pour cette leçon peuvent s’utiliser dans une variété de matières de la 6e à la 12e année; en voici des exemples :

  • classe de sciences de 7e année où les élèves explorent des articles et des chapitres de livres pour déterminer les facteurs dont il faut tenir compte pour prendre une décision éclairée sur l’utilisation du terrain et expliquer leur importance (p. ex., incidences environnementales de divers modes de gestion de la forêt)
  • classe d’anglais du secondaire où les élèves explorent la critique de littératures nationales (comparaison entre les perspectives indiennes, iraniennes et canadiennes sur le rôle et l’image de la femme en littérature ou encore critiques comparées sur La servante écarlate de Margaret Atwood)
  • classe d’études supérieures en histoire où les élèves explorent diverses interprétations d’un événement, comme les causes ou les conséquences d’une guerre (comparaison entre les points de vue des États-Unis et du Canada sur la Guerre de 1812 ou encore comparaison entre les points de vue des Russes et des Anglais sur les événements et les conséquences des guerres mondiales).
Si vous avez des questions ou des commentaires sur ce plan de leçon ou sur d’autres éléments de cet article, n’hésitez pas à communiquer avec John Myers par courriel à jmyers@oise.utoronto.ca . Aussi, il recommande fortement de visiter www.media-awareness.ca, le site du réseau du groupe Canadian Media Awareness.

Leanne Miller a enseigné l’anglais, l’histoire et les sciences sociales dans des écoles secondaires de Peel, ainsi qu’à la formation initiale à l’IEPO/UT. Elle continue d’enseigner à temps partiel au Collège Humber. Elle aimerait que les membres de l’Ordre lui parlent d’autres enseignantes et enseignants exemplaires qui voudraient présenter un plan de leçon. Communiquez avec elle à lmiller@istar.ca .

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