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Mars 1998

Les Centres et Réseaux
Les Centres et
Réseaux

La profession-
nalisation de l'enseignement


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Des programmes de formation accessibles et offerts par des professionnels

Les Centres et Réseaux de formation de l’Ontario ont été créés pour répondre aux besoins du personnel enseignant des écoles de langue française.

de Jacqueline Pelletier

Comment offrir des services de perfectionnement professionnel à moins de 10 000 enseignantes et enseignants répartis sur l’ensemble du territoire ontarien quand les ressources se font rares? Comment s’assurer que la qualité des services offerts soit la même partout?

La communauté franco-ontarienne a trouvé la réponse en créant les Centres et Réseaux de formation de l’Ontario.

Tout comme les «teacher centres» d’autrefois, les Centres et Réseaux trouvent leur fondement dans le principe «pour et par les enseignants». Ils élaborent des programmes et en assurent la prestation dans leur région respective, et fournissent des programmes de formation requis pour mettre en œuvre les directives du ministère de l’Éducation et de la Formation.

Diane Chénier, présidente de l’Association des enseignantes et des enseignants franco-ontariens (AEFO), souligne que «…l’efficacité d’un programme de formation est directement liée au degré de participation des enseignantes et des enseignants au processus d’élaboration. Tant que les Centres et Réseaux respecteront ce principe dans l’identification des besoins et la prestation de leurs services, ils demeureront un outil de formation très valable pour les enseignantes et les enseignants de la province.»

Fondés entre 1992 et 1995, les Centres et Réseaux de formation de l’Ontario sont des consortiums régionaux de conseils scolaires catholiques et publics, d’associations professionnelles et de partenaires divers, nommément les universités, les collèges et TFO. Il en existe six, soit un pour chaque région de l’Ontario : le sud-ouest, le centre, le centre-nord, le nord-ouest, le nord-est et l’est. Tous ont pignon sur rue, mais ce qui les caractérise, c’est qu’ils œuvrent sur l’autoroute, virtuelle ou de bitume.

Contrairement aux «teacher centres», il ne s’agit donc pas de lieux de rassemblement. «Nos lieux de formation sont les 129 écoles et les sièges sociaux des conseils scolaires», déclare avec enthousiasme Lise Charland, coordonnatrice du Réseau de l’est.

Bref, on se déplace ou on se branche, car les enseignantes et les enseignants du système scolaire de langue française de la province ont accès à des programmes de perfectionnement professionnel de qualité, conçus pour eux et offerts en français.

Le modèle : les «Teacher Centres »

Longtemps, les programmes de perfectionnement professionnel offerts aux enseignantes et aux enseignants du système scolaire de langue française n’existaient tout simplement pas. Il fallait suivre des cours en anglais ou se rendre au Québec. En 1986, avec l’adoption de la loi sur les services en français, le besoin de programmes s’est accru encore davantage.

Denyse Brisson, aujourd’hui surintendante de l’éducation, est reconnue comme l’instigatrice des Centres et Réseaux. Dans les années 80, elle travaillait au Centre d’animation pédagogique (CAP) du Conseil des écoles séparées d’Ottawa.

Selon Denyse Brisson, le CAP représente «…les premiers balbutiements des Centres et Réseaux». Son expérience au CAP et son inquiétude face à la pénurie des ressources l’avaient convaincue de l’urgence de créer de nouvelles structures axées sur la mise en commun par les enseignantes et les enseignants de leurs connaissances, de leur expertise et de leurs besoins.

En 1990, Brisson participe à Toronto à la Conférence internationale sur les centres d’enseignants. «Il existait à cette époque un réseau pancanadien, le Network of Canadian Teacher Centres, mais dans le monde éducatif français de l’Ontario, rien. Pour en savoir plus, j’ai donc entrepris une tournée de centres d’enseignants en Angleterre, pays d’origine du concept.»

Denyse Brisson revient de cette aventure plus convaincue que jamais : il faut inventer un modèle où les éducatrices et éducateurs sont à la fois apprenants et experts. Avec quelques collègues et fortement appuyée par Raymond Chénier, alors sous-ministre adjoint au ministère de l’Éducation, elle multiplie ses efforts de promotion : conférences, ateliers, forums, articles publiés dans les revues professionnelles, rencontres avec les décideurs; rien n’est négligé.

Ce travail porte fruit dès 1992 où elle conclut avec le ministère la première de six ententes qui donne naissance aux Centres et Réseaux de formation de l’Ontario. Denyse Brisson dirigera le tout premier : celui du centre de l’Ontario.

Au cours des trois ou quatre années suivantes, chaque région a reçu des fonds allant de 500 000 à 560 000 $. En 1996, le ministère a intégré les Services consultatifs de langue française (SCLF) dans les Centres et Réseaux. Cela représentait entre quatre et onze conseillères et conseillers pédagogiques par centre.

Comme l’explique Robert Arsenault, coordonnateur des projets spéciaux à l’Office de la qualité et de la responsabilité en éducation : «L’intégration des SCLF permet de mieux arrimer les priorités provinciales aux priorités régionales. Ainsi les forces sont multipliées, ce qui permet de mieux cibler la formation à offrir et de poursuivre les objectifs locaux et ceux du ministère.»

Les centres sont de plus en plus soutenus par les conseils scolaires de leur région : «Un conseil assume les frais du loyer, un autre s’occupe de notre comptabilité et un troisième assure la supervision de nos activités, explique Danielle Lemieux, coordonnatrice dans la région du centre-nord. La collaboration est grande.»

Collaboration à l'échelle provinciale

Cette collaboration se remarque aussi à l’échelon provincial. En effet, les membres de l’association provinciale des Centres et Réseaux se réunissent régulièrement, que ce soit en personne ou par téléconférence. Cette association analyse les besoins et élabore des stratégies de perfectionnement professionnel.

Chaque année, les Centres et Réseaux se partagent les dossiers d’envergure provinciale, comme l’éducation physique et la santé ou les arts. Chacun conçoit des programmes et les diffuse dans l’ensemble de la province. Par exemple, un cours de physique conçu en vertu d’une entente de partenariat, notamment avec les centres du sud-ouest et du centre de l’Ontario et Contact Nord, est actuellement mis à l’essai sur l’Internet.

«L’esprit de partenariat est très fort entre les régions, ce que nous faisons, nous le mettons en commun, raconte Danielle Lemieux. Nos échanges produisent une synergie que j’ai rarement vue, et ça prend de l’ampleur.»

La mise en commun élimine le dédoublement; Constance Legentil, coordonnatrice du centre du sud-ouest, explique : «Lorsque le nouveau bulletin a été introduit, notre centre a conçu un guide détaillé portant sur la gestion de l’aspect électronique du bulletin. Puis, on a offert une formation à distance à laquelle a participé un conseiller pédagogique de chaque région.»

La coordonnatrice du centre de l’est confirme : «On ne dédouble pas. Quand une région offre un service, dans la mesure du possible, on le partage. Notre mission est de maintenir la qualité de l’éducation et il faut collaborer et déployer tous les moyens pour y parvenir.»

Services variés et sur mesure

Les services proposés par les Centres et Réseaux comprennent des ateliers thématiques, l’observation du personnel de direction d’une école et des tables de réflexion pédagogique. Les thèmes abordés sont variés : leadership, administration des tests provinciaux, planification du curriculum, stratégies d’enseignement, etc. Si possible, les centres recrutent du personnel enseignant d’expérience de la région pour élaborer et mettre en œuvre les programmes.

Parfois, la demande vient directement d’une enseignante ou d’un enseignant qui la présente à sa direction qui, en retour, l’achemine vers le Centre ou le Réseau de la région et négocie les modalités de prestation. S’il le faut, on crée une formation sur mesure.

Il arrive aussi qu’en effectuant sa planification, un conseil scolaire identifie un besoin de formation pour l’ensemble de son personnel enseignant. Le centre crée alors un plan de formation ciblé qui peut comprendre des modules existants ou nouveaux.

Enfin, à une enseignante ou à un enseignant ayant un besoin particulier, on offre un appui personnalisé ou on l’oriente vers un service existant, dans une université de la région par exemple.

Pas étonnant donc si plusieurs reconnaissent d’emblée que depuis l’entrée en scène des Centres et Réseaux, la qualité, la diversité et le nombre des programmes de formation se sont grandement améliorés. Cours d’été, formation du samedi, séries d’ateliers thématiques s’étalant sur quelques soirées ou sur plusieurs semaines; d’année en année, le dédoublement des services disparaît devant la montée d’une programmation orchestrée.

Les défis de l'avenir

La création de douze conseils de langue française constitue un défi de taille pour les Centres et Réseaux. Ces conseils embrasseront-ils l’esprit de concertation qui anime ces organismes? Choisiront-ils de consacrer les ressources financières requises pour assurer un appui solide au perfectionnement professionnel?

Selon Robert Arsenault, il le faudrait, car la prochaine étape, au-delà de la mise en commun des ressources, c’est la conception d’un plan de formation pour chaque district. Ce sont les mêmes écoles, les mêmes enseignantes et enseignants, les mêmes besoins qu’avant, répète-t-on d’un bout à l’autre de la province. Il suffit que les douze conseils collaborent pour que les Centres et Réseaux puissent poursuivre leur mission. Que chaque conseil se dote d’un secteur de formation est peu probable et non souhaitable. Après tout, la concertation a fait ses preuves.

Pour lui, la mise sur pied des Centres et Réseaux est arrivée à point. Sans eux, les programmes de formation offerts au personnel enseignant des sections et des petits conseils de langue française seraient rares et mal répartis.

L’Ordre des enseignantes et des enseignants de l’Ontario sera en mesure d’agréer les programmes de formation et les organismes qui les offrent. Danielle Lemieux exprime sans doute le souhait de tous ses collègues en disant : «Il faut démontrer que nos Centres et Réseaux sont les mieux outillés pour offrir les programmes, et que nos services sont de la plus haute pertinence et d’une qualité impeccable.»

Les Centres et Réseaux sont connus – une culture d’apprentissage moderne et dynamique est née. L’isolement géographique s’estompe devant l’ampleur de la collaboration provinciale et l’efficacité des technologies de communication. Le vaste territoire de l’Ontario s’est en quelque sorte transformé en un village de l’apprentissage au service des enseignantes et enseignants francophones.

Plus que jamais, les enseignantes et enseignants francophones ont accès à des services de perfectionnement professionnel de qualité, dans leur langue, qu’ils œuvrent en milieu urbain ou rural, dans les petits comme dans les grands conseils scolaires, catholiques et publics.