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Juin 1998

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Des professeurs remarquables :

Farley Mowat

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«Depuis toujours, j’ai su qu’elle était responsable plus que quiconque, sauf mes parents, de ma décision de devenir écrivain», dit Farley Mowat pendant sa pause du midi. Il est en voie d’écrire une histoire spéculative des origines du Canada intitulée The Far Farers.

Elle s’appelait Edna Izzard et a enseigné l’anglais à Mowat de 1937 à 1940 à la Richmond Hill High School à Richmond Hill.

«Mademoiselle Izzard était plus ou moins une vieille dame, ajoute Mowat. Elle était très sévère, un peu une dure à cuire. Et quel sens de l’humour sardonique merveilleux. Presque tout le monde à l’école en avait peur. Elle ne mâchait pas ses mots et faisait preuve d’une honnêteté totale dans ses évaluations.»

Sur le ton du conteur, Mowat enchaîne : «Je me rappelle la première dissertation que je lui ai remise. J’avais pris note de tout ce qui s’était dit à son sujet et était d’avis, comme tout le monde, qu’elle était une vieille pincée. J’ai donc pris des libertés avec mon texte et lui ai donné une tournure satirique.

«Elle m’a fait venir à son bureau et, me regardant droit dans les yeux, m’a dit que j’avais échoué.

«Je ne savais plus quoi penser. Puis elle a ajouté : "Vous avez échoué quant à l’objet de votre texte. Savez-vous quel devait être l’objet du texte?"

«C’était d’être intelligent, je crois.

«Elle a ajouté : "Eh bien! Vous êtes passé à côté. Vous n’étiez même pas drôle. Vous savez que vous êtes capable d’écrire. Vous l’ignorez sans doute, mais vous en avez le don. Alors, si vous voulez écrire, écrivez correctement."»

Mowat a pris cette critique comme un signe. «C’était le type d’encouragement nécessaire, pas que de simples bons mots, mais une critique sévère.»

Mademoiselle Izzard n’a jamais poussé Mowat, mais lui a toujours rappelé qu’il pouvait faire mieux. «Elle prenait une phrase et disait : "Si tu voulais lui donner plus de force, comment t’y prendrais-tu? Et j’y pensais et je proposais de changer la phrase. Elle m’appuyait toujours."»

À l’extérieur de l’école, Mowat consacrait presque tout son temps à la poésie. «Après avoir écrit ce qui me semblait plutôt bon, je le lui faisais lire. Elle disait que les idées étaient bonnes et l’approche juste, mais que je ne maîtriserais jamais l’art de la poésie. "Mais il ne faut pas te décourager, me disait-elle, car la poésie constitue la meilleure préparation avant de passer à la prose."»

«Je n’ai jamais oublié cela, a-t-il ajouté, si on peut condenser son matériel, se discipliner pour y donner forme, soit écrire à l’ancienne des vers qui riment, on en apprend davantage sur l’usage de la langue. J’ai continué à écrire de la poésie pendant longtemps, rien de publiable toutefois. Et j’en ai appris beaucoup sur l’art d’écrire.»

Mademoiselle Izzard ne s’attardait pas qu’au talent de Mowat. Elle encourageait quiconque s’intéressait à la lecture ou à l’écriture.

Comme l’a dit Mowat : «Elle était une personne extraordinaire.»