Pour parler professionLa revue de L’Ordre des enseignantes et des enseignants de l’Ontario
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Parlement jeunesse

Les conseils scolaires de langue française préparent la relève politique et prévoient même combler la pénurie de députés francophones.

De Véronique Ponce

Du 27 au 31 mars dernier, un joyeux vent de francophonie a envahi les couloirs de Queen’s Park. En effet, cette semaine-là, 55 jeunes représentant les 12 conseils scolaires de langue française de l’Ontario sont venus à Toronto vivre le processus législatif de la province dans le cadre du Parlement jeunesse francophone de l’Ontario (PJFO), une première pour nos écoles de langue française.

Ils sont arrivés de partout en autobus, certains armés de sacs de couchage, d’oreillers et de matelas gonflables, prêts à dormir sur la dure dans les gymnases des écoles d’accueil environnantes. Les autobus étaient partis de Timmins, de Marathon (dans le nord de la province), de Windsor et d’Ottawa, faisant escale dans plusieurs villes, pour emmener tous ces jeunes à Toronto.

Le PJFO est un projet de grande envergure qui exige une planification immense et minutieuse à bien des égards, allant de la logistique du transport au financement, en passant par l’hébergement et l’établissement de liens aux programmes-cadres des écoles secondaires.

Jean-Marc Lalonde, député de Glengarry-Prescott-Russell et président de l’Assemblée parlementaire de la francophonie – section de l’Ontario, a pris l’initiative de mettre en œuvre cette activité provinciale, enthousiasmé par un programme similaire auquel il avait assisté lors d’un voyage à Paris, il y a deux ans. Il s’est rendu compte que les jeunes connaissent très peu le fonctionnement d’un gouvernement, et qu’il faut susciter leur intérêt pour la politique le plus tôt possible afin d’assurer la relève francophone de la province. Le besoin se fait en effet sentir, puisque à l’heure actuelle, il n’y a que trois députés francophones à l’Assemblée législative.

Un projet d’envergure

Ce projet a vu le jour grâce à la collaboration d’un nombre incroyable d’acteurs, dont élèves, parents, enseignants, directions d’école, conseils scolaires, mais surtout de la Fédération de la jeunesse franco-ontarienne (FESFO) et des organismes gouvernementaux. Chacun y a mis du sien pour qu’une cinquantaine d’élèves aient la chance de pénétrer dans l’univers des députés de l’Ontario. Le ministère de l’Éducation a couvert les coûts associés au déplacement et à l’hébergement, tandis que l’Assemblée parlementaire de la francophonie – section Ontario a payé le banquet d’ouverture. Grâce à M. Lalonde, le PJFO aura lieu tous les ans.

Le PJFO a trois objectifs principaux :

  • stimuler l’intérêt et l’engagement des élèves francophones pour la politique et le fonctionnement du gouvernement
  • permettre aux élèves de débattre des idées, d’exprimer des opinions, de défendre une position tout en développant leur capacité de leadership
  • favoriser la construction identitaire et inciter les élèves à s’impliquer dans leur communauté – axes d’intervention du domaine de l’aménagement linguistique.

Les élèves intéressés ont rempli un formulaire d’inscription où ils devaient indiquer, par ordre d’importance, quel rôle ils voulaient jouer dans le système démocratique de l’Ontario, soit député, journaliste ou lobbyiste. La plupart d’entre eux ont vu leur premier souhait exaucé. On leur a aussi posé différentes questions pour déterminer l’idéologie politique (droite, gauche, centre) qui leur convenait le mieux afin de les placer dans un des trois partis politiques du PJFO.

«Dans le formulaire d’inscription, on avait rédigé chaque projet de loi en fonction d’une idéologie, mais l’élève ne savait pas laquelle il représentait, explique Andrew Carricato, coordonnateur du PJFO 2007 pour la FESFO. Les élèves ont donc indiqué dans quel texte ils se reconnaissaient le plus par rapport à leurs valeurs sans savoir si le texte représentait l’idéologie de droite, de gauche ou du centre.»

Jouer le jeu, faire naître les passions

Durant le PJFO, les députés en herbe ont appris à formuler des déclarations, à négocier et à défendre des idées; les journalistes ont étudié les différentes particularités des médias (radio, télévision et presse écrite), ont suivi les débats, formulé des questions et mené des entrevues; tandis que les lobbyistes ont appris comment manifester, écrire des lettres, organiser des pétitions et se comporter durant une conférence de presse.

Dans la salle Simcoe du ministère de l’Éducation, où les jeunes ont passé nombre d’heures à se préparer, l’ambiance est au travail, chacun prenant la responsabilité de faire sa part pour respecter un emploi du temps très chargé. Le sérieux de ces adolescents ferait rêver plus d’un enseignant. Les groupes se forment comme par magie sans l’intervention d’adultes, les discussions vont bon train, tout le monde s’affaire à prendre des notes, écoute avec intérêt ce que chacun a à dire avant de prendre la parole à son tour pour faire des suggestions et des remarques ou poser une question de façon respectueuse. Les partis ont pu simuler tous les aspects d’un parlement comme les véritables députés, en faisant preuve, peut-être, d’un peu plus de discipline!

«Le sérieux de ces adolescents ferait rêver plus d’un enseignant.»

Justin Desrochers, de l’école secondaire Georges-P.-Vanier de Hamilton, s’intéresse surtout au processus qui permet l’adoption des projets de loi. Il a été élu représentant de son parti dont le projet de loi concerne les écoles écologiques. Quand il parle politique, ses yeux animent un visage sérieux au-dessus d’un complet sombre agrémenté d’une chemise blanche et cravate : «Moi, j’aime ça les livres de politique. J’ai lu le livre de Jack Layton, celui de Howard Hampton et aussi de Pierre Elliott Trudeau. J’écoute des émissions télévisées comme Politics avec Don Newman et aussi Les Coulisses du pouvoir avec Daniel Lessard.»

À son avis, les jeunes ont beaucoup d’idées préconçues sur le monde politique. Comme nombre d’entre eux, lui aussi pensait que la vie d’un politicien consiste à se faire bien payer pour ne pas faire grand-chose. Il a vite changé d’idée : «J’ai vu que c'est un travail dur, qu’il faut lire beaucoup pour se faire une opinion éclairée et bien représenter ses électeurs. Il ne faut pas croire tout ce qu’on lit dans les médias.»

La salle Simcoe bourdonne d’activité alors que chacun s’affaire à préparer les arguments qui vont permettre aux députés en herbe de défendre le point de vue de leur parti sur les trois projets de loi préétablis, mais surtout de répondre aux questions qui ne manqueront pas de fuser de toutes parts.

Maxime Grégoire, de l’école secondaire catholique Sainte-Marie à New Liskeard, porte lui aussi complet et cravate pour marquer son rôle de leader dans son parti. Les yeux pétillants, il est disposé à répondre aux questions sur son rôle au sein du PJFO comme tout politicien chevronné. Il a été élu par vote majoritaire parmi quatre candidats et représente un parti qui défend un projet de loi concernant l’alimentation dans les cafétérias. Il se dit prêt à défendre son point de vue à la chambre le soir même. «J’ai fait beaucoup de recherches; la malbouffe est un sujet qui me touche particulièrement, ayant eu moi-même une mauvaise alimentation. Une alimentation saine, c'est une valeur importante à apporter dans les écoles.» Maxime parle financement, subvention et lobbying avec l’assurance du politicien qui a fait ses classes. Il est inscrit au programme d’histoire et sciences politiques de l’Université d’Ottawa où il étudiera en septembre, et se destine à une carrière en enseignement, puis plus tard à une carrière en politique.

Chacun ses préparatifs

Dans les semaines précédant l’activité, les députés en herbe et les autres joueurs sont restés à l’affût de l’actualité politique et ont cherché à en apprendre davantage sur l’environnement, la malbouffe et le don d’organes, ainsi que sur le travail de différentes figures politiques, dont la ministre de l’Environnement Laurel Broten, la ministre de l’Éducation Kathleen Wynne et George Smitherman, ministre de la Santé et des Soins de longue durée de l’Ontario. Les adolescents ont donc potassé des documents d’information sur l’Assemblée législative et son fonctionnement.

Les enseignantes et enseignants de la 10e à la 12e année étaient aussi de la partie et ont joué un rôle clé dans le programme. Huit membres du personnel enseignant des conseils scolaires de langue française avaient été assignés au programme et chargés de propager l’information dans les écoles par l’intermédiaire des 14 leaders de la PAL (politique d’aménagement linguistique).

«Les enseignantes et enseignants de la 10e à la 12e année ont joué un rôle clé.»

Les directions d’école ont parfois activement pris part au recrutement des candidats. Les enseignants concernés ont reçu un exemplaire du document Liens entre le Parlement jeunesse et les attentes de divers programmes d’études (également disponibles dans le site de la FESFO), conçu pour aider le personnel des écoles à intégrer les concepts du programme dans leur enseignement, notamment au sein des cours sur les études canadiennes et mondiales (Éducation de la citoyenneté et Politique et citoyenneté canadienne), ainsi que des nombreux cours de français. Ils ont également participé au processus de sélection des élèves et, de manière générale, ont assuré la continuité du projet. Angéla Morin, qui enseigne la citoyenneté, l’histoire et le droit à l’école secondaire catholique Thériault de Timmins, dit qu’il a été facile d’intégrer le concept du PJFO dans ses classes. «La politique est un sujet qui change continuellement; on cherche donc toujours à mettre le contenu à jour dans le cours de citoyenneté. J’ai quand même fait plus de préparation, mais cela m'a permis de donner plus de variété au cours.» Elle se dit chanceuse d’avoir pu accompagner les jeunes à Toronto et contribuer au succès du programme. «J’ai surveillé des activités et j’ai participé à la préparation d’ateliers durant les deux premiers jours. La plupart des enseignants ont aussi joué le rôle de pages, ce que les élèves ont vraiment apprécié. C'était nous qui courions de droite à gauche pour passer des notes d’un côté à l’autre de l’opposition au parti au pouvoir. Cela a beaucoup amusé les élèves.» Mme Morin n’a que des louanges pour les organisateurs. «J’ai adoré la semaine. Pour une première, en plus… cela s’est tellement bien déroulé!»

Des élèves qui se démarquent

Pour être choisis, certains élèves ont dû monter un dossier et préparer une présentation orale accompagnée d’une représentation visuelle. D’autres ont été sélectionnés à la suite d’une série d’entrevues avec un membre du personnel enseignant ou de la direction de l’école. Nombre des élèves assumaient déjà un rôle de leader dans leur école ou leur communauté, ou avaient déjà démontré de l’intérêt pour la politique.

La FESFO était responsable de l’élaboration de la formation, des ateliers et d’autres activités et du déroulement général du programme, tandis que le ministère de l’Éducation s’occupait de l’aspect pédagogique. Andrew Carricato admet que tout ne s’est pas toujours passé comme prévu et qu’on a dû recruter certains élèves à la dernière minute. Il est confiant que la plupart des incidents de parcours auront été résolus d’ici l’année prochaine. «Les participants de cette année, ces jeunes leaders, sont les meilleurs ambassadeurs du programme. J’aimerais les voir faire des présentations aux élèves de première année du secondaire afin d’éveiller leur intérêt pour le PJFO dès le début», fait-il remarquer.

«On est tous déjà des leaders ici, a déclaré Melissa Sullivan de l’école secondaire catholique l’Horizon de Val Caron, alors qu’elle prend une pause pour répondre à quelques questions. C'est pourquoi on nous a approchés pour jouer un rôle dans le Parlement jeunesse. J’ai moi-même participé au camp de leadership Forum Jeunesse de Rouyn-Noranda, au Québec.» L’année prochaine, Melissa ira étudier le droit et la justice à l’Université Laurentienne pour devenir avocate.

L’ambiance était au travail. Les jeunes ont passé nombre d’heures à se préparer tout en respectant un emploi du temps très chargé.

«Les participants de cette année, ces jeunes leaders, sont les meilleurs ambassadeurs du programme.»

Cassandra Poitras, de la même école, aimerait travailler avec des enfants et se dirige vers la médecine ou le travail social. Elle n’avait vraiment aucune connaissance de la politique; la courbe d’apprentissage a donc été très raide. «Je suis la sous-ministre de mon école, chargée d’organiser des danses, des ralliements et des festivals, et de souhaiter la bienvenue aux 8e années. C'est pour cela que le directeur de l’école m'a approchée.» Elle est très nerveuse à l’idée d’entrer dans le feu de l’action le soir même à la chambre, mais elle est prête à prononcer sa déclaration.

Elle affirme avoir déjà appris plein de choses auxquelles elle n’aurait jamais pensé auparavant. «Cela me donne envie de continuer. J’aime ça.»

Tess Chevrier, de l’école secondaire catholique Champlain de Chelmsford, est également très impliquée dans sa communauté et son école. Avec la FESFO, elle organise des activités dans l’école afin d’y faire vivre la culture franco-ontarienne et d’y développer une identité culturelle. «Je vais probablement être enseignante, dit-elle. Je voudrais également m'impliquer dans l’animation culturelle.»

Josée Pilon, de l’école secondaire de Hanmer, travaille pour le même parti que Melissa, Cassandra et Tess. Le directeur de son école et son enseignant de biologie l’avaient tous deux nommée comme participante potentielle au Parlement jeunesse. «Ils ont pensé à moi car je m'en vais en droit l’année prochaine; j’espère éventuellement devenir juge.» Bien qu’elle ait beaucoup entendu parler politique dans sa famille, elle n’avait pas une idée très claire du processus législatif. «On a appris comment l’Assemblée fonctionne, ce que représente chaque parti. On fait un travail intéressant», dit-elle.

«J’aurais vraiment aimé vivre cette expérience enrichissante lorsque j’étais au secondaire, a déclaré Ginette Prévost, animatrice culturelle pour l’école secondaire St-François-Xavier de Sarnia et l’école secondaire Monseigneur Bruyère de London, et qui a participé au PJFO pour son conseil. Qui sait… je serais peut-être maintenant en politique! Les relations publiques et la communication étaient deux de mes forces. Mais je n’avais jamais envisagé cela comme carrière.»

Des figures illustres à l’appui

Durant la semaine du PJFO, on a pu voir quelques figures illustres, dont Gilles Morin, ancien parlementaire de l’Assemblée législative de l’Ontario, qui est venu répondre aux questions des jeunes, mais qui leur en a posé lui-même quelques-unes. Durant la réception d’ouverture, le premier ministre Dalton McGuinty a fait un discours. Parmi les politiciens qui étaient au rendez-vous ce jour-là, citons Howard Hampton, chef du NPD, Kathleen Wynne, ministre de l’Éducation, Madeleine Meilleur, ministre des Affaires francophones, Mike Brown, président de l’Assemblée législative, et d’autres qui sont venus montrer leur appui au PJFO et rencontrer les participants. Cette activité sociale a donné l’occasion unique aux élèves de discuter en français avec des politiciennes et politiciens.

«On a appris comment l’Assemblée fonctionne, ce que représente chaque parti.»

Interrogés plus tard sur leur expérience, Brandon Clim, de l’école secondaire catholique Sainte-Marie de New Liskeard, et Gabrielle Bolduc, de l’école secondaire catholique de La Vérendrye de Thunder Bay, se sont dit vraiment ravis d’avoir participé au Parlement jeunesse. Gabrielle représentait un membre d’un organisme gouvernemental et a appris l’art et la manière d’influencer les politiciens en arrière-scène des débats. «C'était intéressant de voir que l’on peut s’impliquer en politique sans devenir ministre ou député.» Quant à Brandon, il a adoré les débats en Chambre. En tant que ministre de la Formation et des Collèges et Universités, il a eu l’honneur de présenter le projet de loi de son parti concernant l’alimentation dans les cafétérias scolaires. Il a aussi énormément apprécié l’occasion de réseauter avec des jeunes de partout dans la province : «Plusieurs participants de 12e année iront, comme moi, à l’Université d’Ottawa à l’automne. C'est formidable, car ces amitiés vont continuer de fleurir pendant plusieurs années!»

Lui aussi a pu remettre les pendules à l’heure après avoir vécu le processus parlementaire. «Je me suis rendu compte que le but des débats n’était pas seulement de défendre notre point de vue en tant que parti sans écouter ni négocier avec les autres. Au contraire! Il fallait coopérer si l’on voulait mettre toutes les chances de notre côté lors du vote.»

Un tournant dans la vie

Plus de trois mois plus tard, Ginette Prévost était déjà témoin de l’effet du PJFO sur les élèves. «À l’école secondaire Monseigneur Bruyère de London, l’élève qui s’est rendue au Parlement jeunesse a démontré tellement d’engagement depuis son retour [qu’elle] sera la présidente du sénat l’année prochaine. Elle est un très bon modèle d’engagement pour ses pairs. Je sais aussi qu’à Windsor, la personne qui a représenté son école s’est présentée cette année comme élève membre du conseil. Il va donc siéger aux réunions du conseil pour être la voix des élèves. Quel engagement! Je n’avais personnellement jamais vu ce jeune impliqué auparavant dans des activités de ce genre. Je crois que son séjour au Parlement jeunesse lui a vraiment donné goût à la politique et il s’est rendu compte qu’il pouvait faire une différence.»

Angéla Morin, enseignante à l’école catholique secondaire Thériault de Timmins, se dit chanceuse d’avoir pu accompagner les jeunes au PJFO, à Toronto.

«Il fallait coopérer si l’on voulait mettre toutes les chances de notre côté lors du vote.»

Daniel B. Dalcourt, directeur adjoint de l’école secondaire catholique Champlain de Chelmsford, a également remarqué combien les élèves ont été touchés par leur expérience. «Les élèves ont aimé l’expérience et sont revenus ravis, extasiés», témoigne-t-il.

L’expérience a profité à tous les élèves, mais pas toujours dans le sens escompté. Avant de participer au PJFO, Gabrielle Bolduc voulait suivre le programme de sciences politiques à l’Université d’Ottawa pour devenir avocate et, plus tard, ambassadrice du Canada à l’étranger. Elle a changé d’idée après le PJFO. «Pour moi, le changement est quelque chose que j’ai besoin de vivre, de ressentir dans ma communauté et dans mes gestes de tous les jours. Les décisions prises à Queen’s Park sont très importantes et touchent toute la population de l’Ontario, mais le processus par lequel celles-ci sont prises peut être un peu long et frustrant pour quelqu’un comme moi.» Elle a décidé qu’elle n’a pas besoin de conquérir le monde politique pour faire sa marque. «Je compte étudier en éducation pour plus tard enseigner dans une petite école secondaire francophone en Ontario, et ainsi donner l’occasion aux jeunes qui vivent dans une communauté majoritairement anglophone de s’épanouir et d’accroître leur sentiment d’appartenance à la culture franco-ontarienne, comme j’ai eu la chance de le faire.»

À entendre des jeunes comme Brandon, on est amené à penser que le projet a véritablement atteint son objectif. «J’espère bien que ce projet deviendra une activité annuelle afin de permettre à d’autres de vivre cette expérience inoubliable. Je crois que la jeunesse francophone jouera un grand rôle, à l’avenir, au sein du gouvernement tant au niveau provincial que fédéral», dit-il.

Cette année, M. Lalonde, le ministère de l’Éducation et la FESFO ont collaboré pour trouver les sujets des trois projets de loi. L’année prochaine, les sujets seront choisis par les représentants d’élèves élus par leurs pairs à partir des suggestions tirées des formulaires d’évaluation des participants de 2007.

Daniel Dalcourt, directeur adjoint de l’école catholique secondaire Champlain de Chelmsford et quatre participants au PJFO. Il a remarqué combien les élèves ont été touchés par leur expérience.

«Les adolescents embarquent dès qu’on touche au monde des adultes.»

Jacques Tourangeau, qui enseigne le droit et la politique canadienne et internationale au Collège français de Toronto, a maintes fois remarqué à quel point les adolescents embarquent dès qu’on touche au monde des adultes. L’année prochaine, il aimerait voir les sujets sortir du domaine scolaire. «Dès qu’on veut organiser des activités pour ados, on a tendance à leur donner des sujets d’ados, et je pense que c'est une erreur.» Il est toujours surpris, dans ses cours, de voir à quel point les élèves sont capables d’analyser un jugement de la Cour suprême assez complexe de 30, voire 40 pages, et combien ils sont captivés par les faits. «On ne les prépare pas à devenir des ados. On les prépare à devenir des citoyens.» Cela dit, il a trouvé que le PJFO était une entreprise extrêmement intéressante pour les élèves, qui cadrait très bien avec ses cours.

Angéla Morin a également quelques suggestions pour améliorer la sélection des candidats. Elle aimerait que les élèves soient sélectionnés par leurs pairs dans chaque école. «Cela permettrait à toute l’école d’embarquer dans le processus électoral, pas seulement le candidat. On assisterait ainsi à une vraie mise en pratique du programme. Je tiens des élections au niveau de ma classe, mais si on pouvait le faire au niveau de l’école, ce serait excellent», suggère-t-elle.

Le PJFO était un véhicule de communication et c'est vraiment ce que les élèves ont le plus aimé. Nombreux sont ceux qui ont dit avoir apprécié le fait que, du moins cette semaine-là, on les écoutait, leur voix se faisait entendre et les rôles étaient inversés puisque les quelques adultes présents jouaient surtout le rôle d’appui et d’observateur.

Parlement jeunesse fait d’une pierre deux coups puisqu’il s’inscrit très bien dans le programme de la politique d’aménagement linguistique. En effet, il permet aux élèves du secondaire d’un peu partout dans la province de vivre une expérience inoubliable en français, de s’exprimer en français et de réseauter avec d’autres francophones pour mener à bien un projet de grande envergure. M. Dalcourt exprime cela très bien : «Les élèves ne se réjouissaient pas forcément à l’idée de rencontrer le premier ministre, mais plutôt à l’idée d’avoir la chance unique de vivre une expérience entre jeunes francophones pendant une semaine entière.»


Si vous désirez participer au programme l’année prochaine ou simplement en savoir plus sur le premier Parlement jeunesse francophone de l’Ontario, consultez le site de la FESFO.

Le PJ québécois

Les simulations parlementaires ne sont pas nouvelles au Canada puisque le Québec a déjà un Parlement jeunesse depuis 1949 où les participants, âgés de 18 à 25 ans, reproduisent chaque année le fonctionnement de l’Assemblée nationale du Québec (www.pjq.qc.ca).

Le Parlement jeunesse de l’Ontario est différent de celui du Québec sur plusieurs points importants. Tout d’abord, il cherche les élèves des classes secondaires, ce qui donne la chance aux enseignants d’influencer ces jeunes et d’ouvrir leur esprit au monde politique avant qu’ils ne quittent les bancs d’école. Ensuite, il permet d’enrichir les cours et de préparer les participants par le truchement des programmes-cadres. Enfin, contrairement au modèle québécois, les jeunes députés ne représentent pas leur circonscription, mais bien leur école, laquelle équivaut à leur comté.