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Yvonne Dufault

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Vincent Lam parle de Stephen Durnin

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Vincent Lam

«Il conduisait une fourgonnette Volkswagen orange. C'est l’image que j’ai dans la tête, dit Vincent Lam au sujet de Stephen Durnin, son enseignant d’anglais au secondaire. Il était passionné, extravagant et comique. Sa classe devenait parfois un chaos semi-contrôlé. Les discussions et débats étaient houleux. Maintenant, je me rends compte que c'était là son but.»


Vincent Lam est médecin et l’auteur de Bloodletting & Miraculous Cures.

En novembre dernier, il est devenu le plus jeune auteur à remporter le prestigieux prix Giller (le prix littéraire pour œuvres de fiction le plus important au Canada), et le premier à y arriver avec son premier ouvrage, un recueil de nouvelles intégrées sur Ming, Fitz, Chen et Sri, de jeunes docteurs et étudiants en médecine.

M. Lam est né en 1974 à London, en Ontario. Sa famille s’est établie à Ottawa lorsqu’il avait quatre ans. À l’école secondaire St. Pius X, il faisait partie du groupe de jeunes gens dynamiques du programme pour élèves doués. Il se souvient de plusieurs bons enseignants, mais dit que c'est Stephen Durnin qui lui a le plus ouvert l’esprit.

«Je l’ai eu pendant trois ans. Il nous laissait toute latitude d’explorer ce qui nous intéressait. Il nous disait de ne pas avoir peur de suivre notre propre voie, de voir ce qui arriverait. Il nous incitait à l’étude indépendante, se rappelle M. Lam.

«Il a eu une profonde influence sur moi. L’école nous apprend surtout à maîtriser les outils de base indispensables pour faire des études ou entrer dans le monde du travail. Mais il nous a poussés à penser de façon indépendante. “Usez de sérieux et d’esprit critique, disait-il. Soyez votre juge le plus sévère.”»

Stephen Durnin, enseignant d’anglais, bibliothécaire et propriétaire de la «fourgonnette hippie», se souvient de Vincent comme d’un élève tranquille, aimable, studieux et très discipliné, d’un penseur à l’esprit vif et souple. D’une grande curiosité intellectuelle, il voulait tout savoir.

«Il donne l’impression d’être un peu fragile, mais il a beaucoup d’assurance. C'est agréable de se retrouver avec des gens comme ça.»

«M. Durnin n’avait pas peur d’intervertir les rôles entre lui et ses élèves.»

M. Durnin n’avait pas peur non plus d’intervertir les rôles entre lui et son jeune élève.

«Un ami m'avait donné un violon. Je jouais de la guitare et je pensais pouvoir maîtriser le violon, raconte M. Durnin. Alors, quand Vincent était en 9e année, j’allais chez lui le vendredi après l’école et il me donnait des leçons de violon à 10 $ de l’heure.»

Mais M. Lam n’était peut-être pas fait pour l’enseignement.

«Cela n’a pas duré. Il était trop exigeant, rapporte M. Durnin en riant. Je joue encore de la guitare, mais le violon, ce n’est pas mon truc.»

Le talent de M. Lam pour l’écriture était cependant bien évident. Il a écrit une nouvelle, l’a présentée à un concours pour jeunes auteurs et a gagné. «Le prix s’est avéré très formateur, car il m'a permis d’aller passer une semaine à l’Université Queen’s pour suivre un atelier d’écriture donné par Jane Urquhart. J’avais alors 15 ou 16 ans, la moitié de l’âge des autres participants. Quelle expérience palpitante!»

C'est pendant qu’il était à l’école secondaire que M. Lam s’est intéressé à l’écriture et à la médecine.

(photo)

Stephen Durnin, vers 1986-1987 

«Tout en voulant être écrivain, je me suis dit que ce serait une bonne idée d’avoir un emploi stable. Parce que tous les écrivains que j’admirais avaient aussi fait des choses concrètes dans le monde. J’avais le sentiment que c'était quelque chose d’important à faire. Dans mon esprit, le processus était tout simple : je devais choisir un métier où je pourrais apprendre des choses sur les gens. La solution parfaite? Devenir médecin! Je n’avais aucune idée du travail incroyablement ardu que cela exige.»

M. Lam a fait ses études de médecine à Toronto et s’est spécialisé en médecine d’urgence. Pendant les deux ans qu’il a mis pour écrire Bloodletting & Miraculous Cures, il travaillait à temps plein au service d’urgence du Toronto East General Hospital.

Il trouve intensité et stimulation dans la médecine d’urgence et un horaire propice à l’écriture.

«Il nous laissait toute latitude d’explorer ce qui nous intéressait.»

Au milieu de l’effervescence du Giller, M. Lam a envoyé un exemplaire de son livre à Stephen Durnin avec une carte lui disant ce que son enseignement avait représenté pour lui.

«C'était comme si j’avais moi-même gagné le Giller, s’exclame M. Durnin. J’étais tellement content pour lui. C'est la chose la plus gratifiante qui me soit arrivée de toute ma carrière. J’étais fou de joie.»

«Il m'a répondu par un gentil mot, ajoute M. Lam, et une feuille de notes d’un travail sur la nouvelle que j’avais effectuée dans sa classe.» Il est d’ailleurs satisfait de voir qu’il avait bien réussi.

M. Lam espère «que tous les enfants seront incités à garder leur esprit libre pour explorer des choses qui ne sont pas nécessairement pratiques ou axées sur la carrière. Voilà mon message aux enseignants, dit-il. On peut être bon à faire quelque chose de pratique tout en menant une vie super créative.»


«Félicitations! Vous savez écrire.»

Lorsqu’il travaillait comme médecin à bord d’un bateau de croisière dans l’Arctique, Vincent Lam a eu la chance de rencontrer la célèbre auteure Margaret Atwood. Elle a accepté de lire ses nouvelles et lui a plus tard envoyé un courriel lui disant : «Félicitations! Vous savez écrire.» La romancière a, par la suite, conseillé le jeune auteur et joué un rôle clé dans le rapport que M. Lam a établi avec la maison d’édition Doubleday Canada, qui a publié son ouvrage.

Mme Atwood a présenté le livre à la cérémonie de remise des prix Giller.

«Les médecins et les auteurs de fiction parlent d’événements extrêmes, a-t-elle dit. Les deux groupes tâtent le pouls de la vie et de la mort, et ni l’un ni l’autre n’a dédain du sang sur le plancher.

«D’un style direct, d’un regard à la fois sévère et compatissant, et avec une émotion subtile et un humour parfois terrifiant, Bloodletting & Miraculous Cures suit quatre étudiants en médecine aux antécédents bien différents tandis que leurs histoires s’entrelacent, qu’ils perdent leurs illusions et que la vie de bien des gens qui les entourent prend de nouvelles dimensions.

«La bonne nouvelle, c'est que les médecins sont des êtres humains. La mauvaise nouvelle, c'est que les médecins sont des êtres humains. L’autre bonne nouvelle, c'est que ce livre marque les débuts de l’auteur de façon tout à fait remarquable.»

Source : www.vincentlam.ca


Vincent Lam écrit maintenant son premier roman, Cholon, Near Forgotten, qui relate la vie d’un Chinois, directeur d’une école anglaise et joueur compulsif, dans Saigon durant la guerre du Vietnam.

Shaftesbury Films est en train d’adapter Bloodletting & Miraculous Cures pour en faire une série dramatique qui sera télévisée au Movie Network. M. Lam agira à titre de consultant tout en continuant de travailler comme urgentiste à Toronto où il habite avec sa femme et son fils.