Double cohorte : c’est la cohue
Ironie du sort, les finissants de l'année de la double cohorte, qui seront plus nombreux que jamais auparavant, auront de la difficulté à obtenir à leur école, l'aide et les conseils dont ils auront besoin.
de Lois Browne

DEPUIS quelques années, les conseillers en orientation encouragent les élèves du secondaire qui comptent finir leurs études en 2003 à explorer toutes sortes d’options postsecondaires, y compris rester à l’école plus longtemps, prendre une année de congé, faire leur demande à une université plus éloignée, à l’extérieur de la province ou dans un établissement plus petit où il reste toujours des places.

C’est maintenant que des milliers d’élèves de 12e et des CPO doivent décider s’ils tenteront d’entrer à l’université ou au collège, de gagner le marché du travail ou de se trouver une place comme apprenti. On s’attend à une concurrence acharnée et les élèves, surtout ceux qui ambitionnent d’aller au collège ou à l’université, se font dire de toutes parts qu’ils devraient avoir non pas une mais plusieurs solutions de rechange.

«Il y a beaucoup de renseignements en ligne sur les options possibles et les élèves doivent les trouver», dit Phil Hedges, chef de l’Ontario Guidance Counsellors’ Association (OSCA), dont le site web offre toute la gamme des renseignements sur les collèges, les universités, la formation comme apprenti et l’entrée sur le marché du travail.

«Les élèves doivent faire bien plus de recherche qu’avant», ajoute Hedges. Même si les conseillers en orientation leur donneront toute l’aide possible, dans la plupart des écoles il y aura des limites à leur capacité à répondre aux demandes d’orientation des élèves et des parents.

Hedges poursuit : «Je crois qu’on craint que certains élèves n’effectuent qu’une partie de la recherche et abandonnent parce qu’ils en ont assez ou sont frustrés, au lieu de continuer et de découvrir que l’option suivante pose des conditions qui correspondent davantage à leurs antécédents et représente de meilleures possibilités d’admission.»

Plus tôt que prévu
Après l’expérience de cette année, ce conseil revêt une importance encore plus grande. Tout le monde savait que certains élèves avaient l’intention d’utiliser leurs périodes d’étude et les cours d’été pour ajouter à leurs crédits et finir plus tôt leurs études. Pourtant, bien des gens ont cru que peu d’entre eux se donneraient la peine de le faire.

Alors, grande a été la surprise lorsque tous les collèges communautaires et universités ont reçu beaucoup plus de demandes d’admission que prévu en 2002. Greg Marcotte, directeur du Centre de demande d’admission aux universités de l’Ontario, précise que 10 000 élèves de plus que prévu ont fait leur demande d’admission à des universités ontariennes en septembre. «C’est bien là le début de la double cohorte», s’est-il exclamé.

«On a réparti les demandes par groupes d’âge et constaté que cinq à six mille étudiants avaient un an de moins que ceux des années antérieures, ce qui atteste de leur formation accélérée.» Environ le même nombre d’élèves avaient indiqué qu’ils termineraient le secondaire en quatre ans plutôt qu’en cinq, ce qui confirme la théorie de la formation accélérée. Les collèges ont fait l’objet d’une hausse semblable des demandes d’admission. Au Service d’admission des collèges de l’Ontario (SACO), on accusait en juin une hausse de plus de 17 pour 100 par rapport à l’année dernière.

Si cette augmentation résulte entièrement de la formation accélérée, on devrait donc s’attendre à un taux de demande moindre en 2003. Cependant, les élèves de la double cohorte ne sont pas les seuls à exercer des pressions sur le postsecondaire. Les plus jeunes enfants des baby-boomers terminent leurs études secondaires et on note une augmentation du pourcentage de jeunes qui choisissent de poursuivre leurs études au sortir du secondaire. Même le nombre de demandes provenant du marché du travail, des autres provinces et d’autres pays a augmenté au-delà du nombre escompté.

Toutes ces constatations laissent présager qu’il y aura des milliers d’élèves de plus à faire leur demande d’admission au collège ou à l’université en 2003 qu’on ne le prévoyait il y a seulement six mois. Quant au Centre de demande d’admission aux universités de l’Ontario, dont les projections pour cette année se sont révélées plus justes que toutes les autres, il s’attend à une augmentation des demandes de 50 pour 100 en 2003.

De la place dans les classes
Pour pallier le problème d’espace, le gouvernement ontarien a accordé 1,9 milliard de dollars aux collèges et universités de la province. Même si certains se sont plaints du fait que c’était trop tard pour 2003, la plupart des établissements disent maintenant que leurs installations seront adéquates. Certains sont même déjà prêts.

L’Université Carleton est en avance sur la construction d’une résidence de 400 lits. «Notre nouvel immeuble sera ouvert en septembre 2002, a annoncé Susan Gotheil, vice-présidente adjointe de la gestion de l’inscription. Le campus sera peut-être un peu boueux, nous serons prêts non seulement pour l’automne 2003, mais plusieurs de nos installations le seront un an plus tôt.»

Les fonds de fonctionnement ont donné lieu à de nombreuses contestations. Le gouvernement avait promis des fonds pour chaque étudiant, mais leur attribution n’a pas été proportionnelle à l’augmentation des inscriptions.

Pourtant, tout juste en mai dernier, le Conseil des universités de l’Ontario a prévenu le gouvernement que les inscriptions dans les universités avaient augmenté de plus de la moitié du pourcentage prévu en 2001-2002 et qu’il en serait de même en 2002-2003.

En juin, le gouvernement a réagi aux inquiétudes des universités en leur accordant 70 millions de dollars de plus au titre du fonctionnement, après quoi elles se sont empressées d’essayer de calmer les craintes des étudiants. «Je crois qu’il importe de signifier aux élèves que le gouvernement a fait sa part et que les universités feront la leur», dit Sheldon Levy, vice-président des relations gouvernementales et inter-établissements de l’Université de Toronto. «Il est temps de rassurer les élèves et leurs parents et de leur dire que le problème, autant que nous sachions, est réglé.» L’Université de Toronto avait déclaré en avril qu’elle serait incapable de répondre à la hausse de la demande et d’augmenter le nombre de ses inscriptions en 2002. Elle se dit maintenant capable d’accueillir un nombre additionnel de 1 000 élèves.

Mais la nouvelle n’a pas pour autant réjoui les collèges, dont la part du budget de juin a été bien moindre. Même s’ils subissent les mêmes pressions que les universités, les 25 collèges ontariens, qui comptent 140 000 étudiants, n’ont reçu que cinq millions de dollars de plus au titre du fonctionnement. La diminution constante des fonds de fonctionnement malgré la hausse des inscriptions a entraîné la détérioration des installations des collèges et la hausse des ratios étudiants/professeur.

Notes d’admission
La question des notes d’admission à certains programmes universitaires ou collégiaux n’est pas facile à résoudre. En même temps que l’augmentation de la demande, on a vu la note d’admission monter pour certains programmes, surtout ceux qui sont populaires et contingentés.

Le programme de commerce fort prisé de Queen’s, offrant 210 places de première année, a fait l’objet de près de 3 800 demandes en 2002. En 2001, la note d’admission avait été de 94 pour 100 et des offres d’admission sélectives — le terme signifiant que cette note ne garantit pas de place — avaient été faites à d’autres étudiants possédant une moyenne de 86 ou plus. Cette année, il n’y avait pas de note d’admission. L’Université a fait des offres sélectives à ceux qui avaient une moyenne de 87 ou plus.

«La sélection se fait selon les formulaires de renseignements personnels qui constituent une composante cruciale du processus d’admission », précise la registraire Joanne Brady. Cette déclaration corrobore la crainte de bien des gens — crainte que le gouvernement provincial rejette d’emblée — que les étudiants de la double cohorte risquent d’être exclus de programmes pour lesquels ils possèdent la note qu’il leur aurait fallu pour être admis les années passées.

Levy admet que la note d’admission à certains programmes montera peut-être d’un point ou deux, mais maintient qu’il n’y aura pas grand différence. «Si la note d’admission était de 80 pour 100, elle ne montera pas à 90, explique-t-il. Mais si elle était de 79, elle montera sûrement à 80 ou 81 ».

Cette différence pourrait toutefois s’avérer néfaste pour une famille comme les Vicente dont nous parlions dans le numéro de mars 2001 de Pour parler profession. Philippe, qui débute ses CPO, et Alexandre, sa 12e année, veulent étudier le génie. Ils ont tous les deux une moyenne dans les 80. Ils ne sauront pas avant le printemps 2003 si leur note suffira vu la concurrence accrue.

La note d’admission en génie à Queen’s cette année était de 84 et des offres sélectives ont été faites à des élèves qui avaient aussi peu que 77 pour 100. «Mais dans tous les autres programmes de Queen’s, on n’est pas allé aussi bas, a déclaré Brady, et je doute fort que la chose se reproduise.»

L’Université Western Ontario compte aussi un programme de génie de renom. La note d’admission à tous les programmes de l’université est montée de 2,5 pour 100 en 2002 par rapport à 2001 et montera probablement l’année prochaine, selon Marcia Danier, agente des relations avec les médias.

«Je crois que la note d’un bon nombre de jeunes se situera tout près de la note d’admission», remarque Michael Hoy, conseiller en orientation à la Clark Road Secondary School au Conseil scolaire de district Thames Valley. Hoy s’emploie activement à faire pression pour que le financement de l’orientation de Thames Valley revienne à ce qu’il était avant les compressions budgétaires.

Greg Marcotte voit cependant une lueur d’espoir. Il dit qu’un examen des notes du Centre de demandes d’admission aux universités de l’Ontario de cette année par rapport à celles de l’année dernière n’indique aucune différence statistique importante. «Certains croient même que les notes du nouveau curriculum sont plus basses, mais nos données ne confirment pas cette hypothèse.»

Certaines universités ont intégré la demande accrue de places dans leurs plans d’expansion. Diane Crocker de l’Université York souligne que la croissance faisait partie des visées de l’établissement et que l’augmentation de 20 pour 100 des demandes d’admission ne se traduira pas par une hausse de la note d’admission par rapport à l’an dernier.

L’Université Carleton comptait aussi prendre de l’expansion. Susan Gotheil a révélé qu’ils pensaient avoir de la difficulté à atteindre leur objectif de 4 300 étudiants de première année en 2002, mais, qu’au contraire, ils en auront au moins 4 600 et seront prêts à en accueillir davantage l’an prochain.

Réduction des services d’orientation
Voilà donc le contexte du retour en classe des élèves de la promotion 2003. Deux tâches principales les attendent. La première est de faire une recherche approfondie sur toutes les options postsecondaires qui s’offrent à eux, de voir quels établissements ont des exigences qu’ils peuvent satisfaire et d’envoyer leur demande à temps. La deuxième sera d’obtenir les notes que laissent présager leurs demandes d’admission, car les offres dépendent souvent des notes finales.

Mais ils devront davantage se débrouiller tout seuls que par le passé.

«Le problème résulte en partie du mode de financement qui permet, sans garantie aucune, l’affectation de 2, 6 conseillers en orientation par 1 000 élèves», explique Phil Hedges. Aux prises avec des problèmes budgétaires, nombre de conseils scolaires ont choisi d’affecter leurs conseillers à l’enseignement et de supprimer ainsi des postes en orientation.

Le Conseil scolaire de district Thames Valley a effectué pour 2002 des compressions de l’ordre de 43 pour 100 dans ses postes en bibliothéconomie et en orientation. L’année dernière, Clark Road avait un peu moins de 1 300 élèves et quelque 600 d’entre eux étaient des finissants. Les postes de conseillers en orientation sont passés de trois à temps plein à 1 2/3 conseiller pour l’année de la double cohorte. «Certaines écoles du district comptent 500 élèves au secondaire et ne bénéficient que d’un conseiller à mi-temps», souligne Hoy.

«Les files d’attente vont se faire longues chez les conseillers. Je vois ça venir», dit Hoy. Il prévoit des ateliers en classe pour expliquer aux élèves le processus d’admission en ligne et les aider à remplir les formulaires d’admission. «Mais à part cela, ajoute-t-il, ils devront se débrouiller tout seuls.»

Certains conseils essaient de trouver des ressources supplémentaires. Le Conseil scolaire de district catholique de Toronto, quoique son ratio élèves-conseiller en orientation soit conforme aux normes, envisage d’en embaucher davantage parce que l’année prochaine sera difficile pour les élèves.

Linda Langero, coordonnatrice des programmes d’orientation et d’apprentissage expérientiel, a déclaré que le conseil songe à donner aux écoles les ressources nécessaires pour embaucher, au besoin, des conseillers en orientation qui ont récemment pris leur retraite pour les aider à répondre à la demande en 2003.

Les universités aussi useront probablement de franchise en communiquant aux élèves les notes d’admission et autres exigences. «Queen’s s’attend à être inondée l’année prochaine, dit la registraire Joanne Brady, et compte gérer le processus le mieux possible.» L’université affichera la note d’admission à tous ses programmes dans son site web dans le but d’éviter les demandes d’élèves qui n’ont aucune chance d’être acceptés. «C’est le moyen le plus juste possible, tant pour nous que pour les élèves du secondaire», dit Brady.

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