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Juin 1998


Enseignants non qualifiés :
l’Ordre maintient sa position


Le nombre d'enseignants qualifiés sans emploi ne laisse aucune excuse pour embaucher des enseignants non qualifiés

de Denys Giguère

L’Ordre des enseignantes et des enseignants a prévenu les conseils scolaires qui envoient des enseignantes et enseignants non qualifiés dans des classes qu’ils pourraient faire l’objet de poursuites judiciaires s’ils ne mettent pas fin à cette pratique.

Margaret Wilson, registrateure de l’Ordre, a expliqué sans équivoque que l’Ordre est prêt à prendre des mesures sévères afin de garantir que du personnel qualifié enseigne aux élèves ontariens. D’après elle, les efforts déployés récemment pour que du personnel qualifié seulement puisse enseigner dans des classes de l’Ontario bénéficient aux parents, aux élèves, ainsi qu’aux enseignantes et enseignants qualifiés.

Veiller à ce que les enseignantes et enseignants des écoles financées par des fonds publics en Ontario soient qualifiés est un élément clé du mandat de l’Ordre. Vis-à-vis du public et du personnel enseignant, il incombe également à l’Ordre de s’assurer que le corps enseignant reçoit la formation nécessaire pour pouvoir dispenser aux élèves ontariens une éducation de qualité, aujourd’hui et demain. L’organisme d’autoréglementation des enseignantes et enseignants établit aussi des normes d’exercice et d’éducation pour la profession agrée les programmes de formation à l’enseignement et les fournisseurs de ces programmes.

Au cours de sa première année d’existence, l’Ordre a dû à maintes reprises s’attaquer à la question des enseignantes et enseignants non qualifiés. Il a dénoncé avec véhémence les articles du projet de loi 160 qui semblaient autoriser le recours à des intervenants non qualifiés et a obtenu gain de cause puisque le gouvernement a retiré les articles en question.

Le mécontentement des parents

Après avoir reçu des appels de parents mécontents d’apprendre que du personnel non qualifié enseigne à leurs enfants, Margaret Wilson a émis une sérieuse mise en garde dans une lettre adressée aux conseils scolaires de toute la province.

Les parents se sont notamment plaints de ce que le Conseil des écoles séparées catholiques de Dufferin-Peel, l’un des plus importants de l’Ontario avec plus de 4 500 enseignantes et enseignants, fait régulièrement appel à du personnel suppléant non qualifié pour enseigner. L’Ordre a demandé une liste du personnel suppléant souvent employé par ce conseil et procède à son examen afin d’être sûr que la loi est bien respectée.

«En tant qu’organisme de réglementation, l’Ordre se doit de protéger l’intérêt du public», déclare Mme Wilson dans une lettre envoyée au Conseil de Dufferin-Peel. «À titre d’employeur, il incombe au Conseil des écoles séparées catholiques de Dufferin-Peel de veiller à ce que toutes les personnes qui doivent devenir membres de l’Ordre pour pouvoir occuper un poste soient en règle avec celui-ci.»

«L’embauchage de personnes non qualifiées est d’autant moins justifié quand on pense au grand nombre d’enseignantes et d’enseignants au chômage, ajoute Mme Wilson. La région du Golden Horseshoe compte trois facultés d’éducation – l’Université Brock, l’Université York et l’Université de Toronto – et des centaines de jeunes enseignantes et enseignants qualifiés qui ne demandent qu’à exercer leur métier.»

À la défence de la profession

Lors du débat entourant le projet de loi 160, l’Ordre a rappelé que les enseignantes et enseignants seulement ont été formés pour enseigner aux enfants et aux adolescents. Informaticiens, musiciens, athlètes et autres spécialistes ne possèdent pas les compétences requises, à moins d’avoir suivi avec succès un programme de formation à l’enseignement.

L’Ordre a également précisé qu’il ne pouvait pas garantir que la formation reçue par les intervenants non qualifiés satisfait aux normes d’exercice de la profession établies par l’Ordre. Il ne peut notamment pas fournir l’assurance que ces personnes respecteront un code d’éthique rigoureux ou feront l’objet de mesures disciplinaires en cas de violation du code.

«Le métier d’enseignant revêt un caractère sérieux et distinctif, explique Mme Wilson. Les enseignantes et enseignants qualifiés sont les seuls à posséder l’expérience et le savoir-faire requis pour comprendre le contenu du curriculum et savoir comment l’enseigner aux élèves.»

La registrateure a également exprimé ses préoccupations sur cette question lors de diverses réunions avec des directrices et des directeurs de l’éducation qui ont eu lieu au cours de la première année d’existence de l’Ordre. Elle a à nouveau insisté sur cette question dans des lettres adressées aux conseils scolaires de toute la province, à la mi-février, quand le tableau de l’Ordre indiquait que quelque 2 200 enseignantes et enseignants de l’Ontario n’étaient pas membres en règle.

«Ces personnes ne sont pas membres de l’Ordre pour des raisons multiples, précise Mme Wilson. Certaines d’entre elles ont fait l’objet d’une suspension de leur carte de compétence parce qu’elles n’avaient pas payé leur cotisation, d’autres ne se sont jamais inscrites et d’autres encore détiennent une carte de compétence temporaire qui est arrivée à expiration. Un petit nombre d’entre elles n’ont jamais possédé les qualifications requises pour enseigner en Ontario.»

Près de la moitié des 2 200 enseignantes et enseignants qui ne figuraient pas sur le tableau de l’Ordre sont à présent inscrits. L’Ordre poursuit sa collaboration avec les conseils scolaires afin d’être sûr que ceux qui ne sont pas encore membres en règle le deviennent, renouvellent leur carte de compétence temporaire ou reçoivent la formation nécessaire pour répondre aux normes de l’Ordre, selon le cas.

La Loi sur l’éducation est sans équivoque à propos du personnel non qualifié. Elle stipule que «nul ne doit être employé dans une école élémentaire ou secondaire pour y enseigner ou y exercer des fonctions pour lesquelles l’adhésion à l’Ordre est exigée par la présente loi s’il n’est pas membre de l’Ordre des enseignantes et des enseignants de l’Ontario».

Cette disposition s’applique également aux directrices et directeurs de l’éducation, aux surintendantes et surintendants, aux conseillères et conseillers scolaires, au personnel de direction des écoles, au personnel enseignant à temps plein, à temps partiel et suppléant, ainsi qu’aux nouveaux diplômés des facultés d’éducation embauchés comme suppléants peu de temps après l’obtention de leur diplôme.

«Cet aspect est très important pour la profession, affirme Mme Wilson. Si les conseils scolaires peuvent faire appel à du personnel non qualifié pour enseigner dans des cas de force majeure, ils doivent néanmoins prouver qu’ils ont essayé par tous les moyens de trouver des enseignantes et enseignants qualifiés pour combler ces postes. En revanche, il peut y avoir une pénurie d’enseignants possédant des compétences particulières et des circonstances particulières qui justifient l’embauchage temporaire d’autres enseignantes et enseignants après avoir reçu l’autorisation du ministère de l’Éducation et de la Formation.»

La reconnaissance professionnelle

La reconnaissance professionnelle est un privilège que le personnel enseignant attend depuis longtemps, souligne Mme Wilson. Alors que médecins, infirmières, avocats, architectes et ingénieurs jouissent depuis plusieurs décennies d’une reconnaissance professionnelle en Ontario, les enseignantes et enseignants ont dû patienter plus de 30 ans, soit jusqu’en 1996, avant de l’obtenir.

Mme Wilson poursuit : «La plupart des gens n’iraient pas voir un médecin, un avocat ou un ingénieur s’il n’était pas reconnu par un ordre professionnel. L’éducation des enfants est tout aussi importante. Des enseignantes et enseignants qualifiés connaissent les besoins de leurs élèves, leurs styles et leurs antécédents d’apprentissage, et leurs aptitudes, ce qui leur permet de déceler les difficultés d’apprentissage, de définir les besoins et d’adapter le programme en conséquence.

«Les élèves sont en droit de s’attendre que du personnel qualifié et responsable leur dispense un enseignement.»