Andrew Schmitt de Brent Butt
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«Je crois au désordre de l’apprentissage», déclare Andrew Schmitt. C’est une idée que lui a inculquée Patricia Palulis, chargée de cours à l’Université d’Ottawa, alors qu’il étudiait en vue d’obtenir son B. Éd. «Il est acceptable de laisser se produire un désordre quand on essaie de nouvelles approches avec ses élèves. En autant que l’on garde ses objectifs en tête, le manque de structure et le désordre importent peu.» En fait, aucun désordre ne règne dans la salle de classe de 4e et 5e année de M. Schmitt, à la Joyce Public School du Toronto District School Board. En revanche, tant les élèves que les enseignants y mettent à l’essai de nouvelles méthodes, de façon intensive. L’an dernier, M. Schmitt a remporté le Prix du premier ministre pour l’excellence dans l’enseignement dans la catégorie «Nouvel enseignant de l’année». On a dit de lui qu’il inspirait les élèves et les pédagogues, tant ceux de son école que des 14 écoles élémentaires affiliées à la sienne, à approfondir leurs connaissances et à intégrer la technologie à l’apprentissage et à l’enseignement des mathématiques. En plus d’être le titulaire d’une classe à années multiples de 25 élèves, M. Schmitt donne des conférences sur les mathématiques et la technologie dans son conseil scolaire et dans le cadre de congrès, et il fait équipe avec des chercheurs et des entreprises afin d’obtenir des bourses et de gagner des prix ayant trait à la technologie. Il travaille avec une équipe de chercheurs de l’Université York qui étudient les littératies multiples et est enseignant associé. Il est la personne-ressource de son école en matière de technologies de l’information et de la communication, il joue du piano pour les chorales et les concerts de son école, et il organise le programme de sport intramural après les heures de classe. C’est beaucoup pour un pédagogue, et c’est particulièrement impressionnant pour une personne qui est membre de la profession depuis peu. En effet, M. Schmitt a commencé sa carrière en enseignement à la Joyce Public School en janvier 2005. «Il a démarré à toute allure et n’a jamais ralenti», confie la directrice d’expérience, Cheryl Paige. La fierté et l’admiration qu’elle voue à son collègue sont évidentes. «Andrew possède la fantastique capacité de voir l’ensemble de la situation, ce qui est peu commun pour un jeune professionnel.» Depuis qu’elle travaille à Joyce, Mme Paige a présenté la candidature de nombreux pédagogues, mais celle de M. Schmitt est la première que tous les membres du personnel ont signée. «Je veux leur donner les compétences dont ils ont besoin pour former des amitiés saines.» «C’est un enseignant impressionnant et dévoué, tant auprès de ses élèves que de ses collègues», ajoute Mme Paige. La gestion de classe est très importante pour tous les pédagogues, et surtout pour ceux qui commencent leur carrière. Quel est le secret de M. Schmitt? «Je fais deux mètres de haut. Ça aide!», dit-il, en souriant. Même si sa stature l’aide probablement, ce n’est pas la seule chose. La manière dont il s’y prend avec les élèves lui permet de gérer sa classe et le programme en douceur et sans effort. Et c’est un aspect de sa pratique sur lequel il a travaillé. Un jour, vers la fin de sa première année d’enseignement, M. Schmitt a eu une surprise en lisant le carnet de bord d’une élève. Elle excusait le mauvais comportement de la classe ce jour-là. «Elle a écrit que je parlais toujours très fort, se rappelle-t-il. Elle avait interprété le ton avec lequel je parlais aux 33 élèves de cette classe à années multiples comme un signe de colère contre les élèves.» Ce commentaire l’a marqué. Aujourd’hui, il est calme et posé. En fait, son ton est très doux, ce qui semble ne pas être compatible avec sa taille. Contrairement à sa première année d’enseignement, il a maintenant confiance en son programme et en ses activités pédagogiques. Il sait comment élaborer une leçon et l’enseigner d’une façon motivante, car il sait capter et maintenir l’attention des élèves. Il n’a donc pas besoin de lever le ton; d’ailleurs, il le fait rarement. Mais alors, que se passe-t-il quand on le pousse trop loin? «Parfois, nous le décevons, comme quand nous avons un suppléant, murmure Valeriya. On ne se rappelle pas toujours de nos qualités. Quand ça se produit, on mérite de se le faire dire», dit-elle, d’un air penaud. Ces qualités sont très importantes pour M. Schmitt. En septembre, il prend le temps d’établir ce qu’il appelle «un fondement solide en formation du caractère». Il intègre directement l’honnêteté, la fiabilité, l’équité, la compassion, le respect, l’autodiscipline et la loyauté à ses leçons. Aussi, il n’oublie jamais que ses gestes, dans la classe et à l’extérieur, doivent refléter ce qu’il enseigne. Les enfants parlent de la façon d’être un bon public tout en se préparant avec enthousiasme à des présentations orales. Tous les yeux se tournent vers l’arrangement visuel qui sert à la formation du caractère et ils déterminent quelles sont les qualités d’un bon public. Puis, ils donnent des exemples de ces qualités. «Si on est respectueux, on n’interrompt pas.» «On fait preuve de compassion en donnant du renforcement positif.» Les enfants comprennent. «Comment puis-je les aider à devenir de bons citoyens?», demande M. Schmitt. C’est l’un des principaux objectifs qu’il garde en tête pendant le glorieux désordre qu’est l’apprentissage dans sa classe. Il est sensible au fait que ses élèves changeront d’école après la 5e année. «Je veux leur donner les compétences dont ils ont besoin pour former des amitiés saines. Ce sont des aptitudes de vie importantes.» Bien entendu, le gros désordre, celui que M. Schmitt et ses élèves préfèrent, c’est la technologie. En tant que chef de la Technologie de l’information et des Communications, M. Schmitt s’occupe du perfectionnement en informatique du personnel régulier après les heures de classe et pendant la pause du midi, du système intranet du conseil scolaire, de la présence des technologies de l’information et de la communication dans le curriculum, ainsi que des séances de perfectionnement en informatique. Il participe aussi aux programmes en partenariat parents-enfants en lecture, en recherche et en musique. Dans le cadre de ces séances fort populaires, on a recours aux ressources informatiques de l’école pour aider les parents, le personnel et les élèves à apprendre ensemble. La collaboration est de première importance, tant à Joyce que pour M. Schmitt. «Sans elle, je ne serais pas l’enseignant que je suis. J’ai un groupe de collègues fantastiques vers qui je peux me tourner en tout temps pour obtenir un conseil, avoir une oreille attentive ou trouver de nouvelles idées. Ils sont tous très créatifs; ils s’entraident et appuient les élèves.» Les enseignantes et enseignants de Joyce accordent beaucoup d’importance à la langue parlée, étant donné que l’anglais n’est pas la langue maternelle de plus de 66 pour cent des élèves. La technologie est donc un bon moyen de rassembler les parents, les enfants et le personnel enseignant. Les mathématiques sont une autre matière importante. Peu importe la langue parlée à la maison, tous les parents ont des compétences en mathématiques et leur accordent de l’importance. C’est pourquoi M. Schmitt, comme nombre de ses collègues, s’efforce d’être un excellent enseignant de mathématiques qui motive ses élèves. À Joyce, règle générale, ça signifie avoir recours à de la technologie assez sophistiquée. La salle de classe de M. Schmitt comporte un tableau interactif et un projecteur à la fine pointe de la technologie, des ordinateurs bloc-notes Apple Notebook, une caméra de transmission de documents et – on ne saurait les oublier puisque les enfants les portent fièrement – des bracelets à clé USB qui leur permettent d’avoir avec eux leurs travaux scolaires, en tout temps. Ils branchent ces bracelets à n’importe quel ordinateur, à l’école ou ailleurs, et téléchargent facilement les documents sur lesquels ils sont en train de travailler.
«Les jeunes adorent la technologie, avoue M. Schmitt, en souriant. La plupart d’entre eux sont déjà des experts, alors pourquoi ne pas les laisser faire ce à quoi ils excellent? De plus, ils détestent la poussière de craie et se salir les mains. Moi aussi, d’ailleurs!» Vous avez peut-être vu des présentateurs de nouvelles se servir de tableaux interactifs à la télé. M. Schmitt est tout aussi futé et certains élèves le sont presque tout autant. Il prend rarement un bout de craie. D’ailleurs, on aurait du mal à en trouver dans sa classe. Un tableau interactif fonctionne à l’aide de l’affichage tactile et est connecté à un ordinateur et à un projecteur numérique. Du bout des doigts, M. Schmitt et ses élèves contrôlent les applications de l’ordinateur, écrivent des notes, affichent des tableaux et des images, font des recherches dans Internet, jouent à des jeux vidéo, regardent des DVD, utilisent des caméras de transmission de documents pour communiquer leur apprentissage aux autres d’une façon amusante, concrète, interactive et fort motivante. Se trouve également dans la classe un système d’amplification audio qui distribue le son uniformément pour que les élèves entendent clairement, où qu’ils soient. Le système comprend des haut-parleurs et un microphone portable à l’intention des élèves. On ne crie pas les réponses dans cette classe. Les enfants adorent le microphone et attendent patiemment leur tour avant de pouvoir le tenir et parler. C’est ainsi que M. Schmitt arrive à combiner la gestion de classe, la formation du caractère et l’intégration de la technologie. M. Schmitt croit qu’une telle technologie lui permet d’enseigner le curriculum plus efficacement. Le tableau interactif est accompagné de soutien en ligne, d’une banque d’images et de données innombrables, de ressources pédagogiques conçues en fonction du curriculum de l’Ontario, ainsi que d’outils de planification d’unités et de leçons. De façon encore plus importante, il croit que la technologie permet aux élèves d’utiliser les connaissances plutôt que de seulement les acquérir. «Ils mettent en pratique ce qu’ils sont en train d’apprendre. Ils communiquent et apprennent mieux. De plus, ils s’amusent tout en apprenant. On ne peut demander mieux.» L’an passé, M. Schmitt et sa collègue Wanda de Castro ont conclu un projet de deux ans qui visait à inclure la technologie des tableaux interactifs aux programmes-cadres de mathématiques de 3e et de 6e année. L’objectif était d’améliorer le rendement des élèves en fonction des résultats de l’OQRE, non seulement des élèves à Joyce, mais dans les 14 écoles élémentaires qui lui sont affiliées. Ils ont reçu une bourse pour les tableaux interactifs, et ont pu mettre 28 tableaux dans les salles de classe et former les pédagogues. En outre, ils ont formé 50 enseignants et directions d’école afin de renforcer leurs compétences en enseignement des mathématiques. Les pédagogues eux-mêmes avaient auparavant déclaré avoir des lacunes au chapitre des connaissances mathématiques, des ressources et des stratégies efficaces. «La formation du caractère est importante pour nous apprendre à nous débrouiller dans la vie.» En fin de compte, de nombreux enseignants, y compris la plupart de ceux à Joyce, ont suivi un cours menant à une qualification additionnelle en mathématiques. M. Schmitt, en plus de son baccalauréat et de sa maîtrise en musique, possède les qualifications de spécialiste en mathématiques aux cycles primaire et moyen. Les résultats? Neuf écoles ont obtenu de meilleurs résultats à l’examen de mathématiques de l’OQRE, toutes les écoles ont connu davantage de motivation et de participation chez les élèves et les enseignants; en effet, plusieurs d’entre eux étaient pour la première fois plus enthousiastes, confiants et créatifs par rapport à l’enseignement des mathématiques. De quoi a l’air une leçon de mathématiques dans la classe de M. Schmitt? Aujourd’hui, les élèves sont assis près du tableau interactif, leur Senteos en main (appareil sans fil qui sert à répondre aux questions sans lever la main ni parler). Ils entrent leurs réponses et M. Schmitt vérifie qui a bien répondu. Voilà un autre appareil technologique qui contribue à la bonne gestion de classe. Le tableau interactif affiche une énorme règle avec une ligne dessus. «Combien mesure cette ligne?», demande M. Schmitt. Il attend patiemment pendant que les élèves entrent leur réponse. Du bout du doigt, il vérifie qui n’a pas répondu et note le nom des élèves qui éprouvent des difficultés en vue de travailler individuellement avec eux. Puis, il demande à Nahom d’expliquer comment il a obtenu sa réponse. Les enfants sont tous enthousiastes à l’idée d’expliquer leur logique. Il existe plusieurs explications correctes. La plupart ont l’occasion d’écrire sur le tableau interactif, de déplacer la ligne à l’étude et d’utiliser la technologie. Les élèves sont maintenant des experts et ils adorent ça. En fait, la leçon est une révision, car aujourd’hui, il y a un test. Après une séance de 15 minutes, les enfants retournent à leur place. Ce type de leçon convient à tous les types d’apprenants (kinesthésiques, visuels, auditifs et verbaux). Les enfants ont tous participé et répondu au test avec assurance. Que pensent les enfants des méthodes d’enseignement de M. Schmitt? Norman est en 4e année. Plus tôt aujourd’hui, il a fait une rapide présentation en études sociales. Les enfants sont en train de travailler à un grand projet qui intègre une recherche sur une province ou un territoire à l’étude de leur roman. Norman voulait montrer ce qu’il avait accompli jusqu’à maintenant et M. Schmitt a à cœur d’informer les élèves de leurs progrès. Debout devant le tableau interactif, le garçon branche son bracelet à clé USB dans l’ordinateur portatif sans hésiter. Puis, il contrôle le tableau interactif, transmet des renseignements et présente des images et des photos de plantes et d’animaux du Nunavut. «Avec M. Schmitt, c’est agréable d’apprendre, explique Norman. Son système d’apprentissage est pratique et amusant. Il nous apprend aussi à être aimables envers les autres. La formation du caractère est importante pour nous apprendre à nous débrouiller dans la vie.»
Victoria est en 5e année. «Il est créatif. Au lieu d’utiliser seulement des livres, nous utilisons la technologie et ça nous aide à mieux nous souvenir de ce que nous apprenons.» Winnie aime le fait qu’il intègre diverses matières aux projets, comme les études sociales à une étude de roman. «C’est plus amusant et plus intéressant quand les matières que nous étudions sont liées à autre chose.» Patricia, élève de 4e année, explique qu’elle et ses camarades de classe sont plus intelligents parce que M. Schmitt utilise différentes méthodes d’enseignement. «On s’en souviendra toujours quand on sera adultes parce que nous l’avons si bien appris.» Ce groupe d’élèves de neuf et dix ans s’exprime très bien. Et ils adorent le désordre qu’est l’apprentissage. Tout comme leur enseignant. «Je crois que nous apprenons par les émotions, qu’elles fixent ce que nous apprenons dans notre esprit. J’essaie d’enseigner par les émotions positives. Tout ce que je fais, le travail au sein du comité, la formation en technologie, la collaboration avec mes collègues, est fondé sur les moyens de faire avancer nos élèves, de les aider à mieux apprendre tout en s’amusant.» |