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Une journée dans la vie...
Marc Gélinas, Val Caron Confederation Secondary School Conseil scolaire du district de Rainbow Construction Certifié en 1991 Faculté d’éducation, Université d’Ottawa |
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de
Philippa Davies
Marc Gélinas enseigne la menuiserie et la construction à la Confederation Secondary School de Val Caron. À 7 h 50, après le départ de son épouse, qui déposera leur fille à la garderie avant de se rendre au travail, il monte dans sa camionnette Chevrolet noire. Il a grandi dans la «vallée», une région parsemée de villages essentiellement francophones située à environ une demi-heure de Sudbury, et ses parents habitent toujours dans les environs. Son père a été directeur d’école secondaire et a également dirigé un atelier de menuiserie. Sa mère demeurait le plus souvent à la maison avec les enfants. «Pour moi, il est très important de vivre et de travailler au même endroit. Les enfants à qui j’enseigne travaillent dans les épiceries et les stations-service que je fréquente.» L’école n’est qu’à cinq minutes de chez lui. Dès 8 h 5, Marc entre dans la salle du personnel, et à 8 h 10, il arrive dans la salle de classe. On aperçoit une plaque de bois faite à la main, où l’on peut lire le nom de l’équipe de l’école, les «Confederation Chargers».
Marc a commencé à faire de la suppléance à l’école secondaire de langue française locale à l’âge de 20 ans, alors qu’il étudiait encore à l’Université Laurentienne. Titulaire d’une permission intérimaire, il a été admis à un programme spécial de certificat en raison surtout de ses antécédents techniques. Il enseigne à Confederation depuis cinq ans. À 8 h 15, la cloche sonne. À 8 h 30, une dizaine d’élèves de 12e année sont arrivés. Une fille aux cheveux blonds repousse son tabouret et se dirige vers l’armoire. Elle y prend une règle quadrangulaire qu’elle vérifie avant de revenir à l’établi. Marc est debout au tableau. Il écrit : «L’entraxe des solives doit être de deux pouces». Le projet consiste à concevoir et à bâtir un modèle de terrasse avec des bouts de cèdre qu’une quincaillerie locale a donnés à Marc. Les jeunes sont en train d’élaborer leurs plans. «Bon, alors vous savez quoi faire.» Marc se déplace parmi les élèves qui travaillent à leurs plans en équipes de deux. Il les encourage dans leur travail tout en les poussant à apprendre. «Beau travail. C’est autoporteur, ou c’est fixé à la maison?», demande-t-il à une équipe en examinant son plan de terrasse. Un garçon à la barbe naissante se tourne vers son enseignant en levant les sourcils. «Il faut le savoir avant de commencer», sermonne Marc. Bon nombre de ces élèves travaillent avec Marc depuis la 9e ou la 10e année. Ils ont déjà connu des réussites, et ils ont établi avec leur enseignant une relation de confiance mutuelle. Ils ont bâti des boîtes, puis des coffrets, et peut-être aussi des coffres au trésor. «Monsieur, je ne sais plus où j’en suis», dit un élève. Marc passe le voir. «Marque l’emplacement de la solive de l’autre côté.» «Ah oui! Voilà!» s’exclame l’élève. Il a compris. La période suivante, à 9 h 30, est consacrée à la préparation. Marc rédige des directives pour son prochain groupe au sujet de l’évaluation des coûts des fournitures au moyen d’Internet. Prochaine activité au programme : une demi-heure à surveiller les élèves en retenue. À 11 h 5, Marc entre dans la salle de retenue et le directeur adjoint lui remet la fiche de présence. Deux élèves sont dans la salle; d’autres arrivent un peu plus tard. À 11 h 15, Nick signe la fiche. «Il y a une erreur dans mon nom; je ne devrais pas être obligé de rester», dit le petit garçon aux cheveux presque blancs. Josh arrive cinq bonnes minutes après Nick. Les autres flairent l’injustice. «Monsieur, monsieur, il doit rester plus longtemps parce qu’il est arrivé en retard.» «C’est vrai monsieur, ajoute un autre, ou nous devrions partir plus tôt.» «Inutile de discuter de ça pour le moment», dit Marc avec fermeté. «Est-ce que je peux partir, maintenant, monsieur? J’ai signé la fiche.» Il y a un silence. «Tout le monde peut partir, sauf Josh et Nick», annonce Marc quelques minutes plus tard. «S’il vous plaît, monsieur! Faisons un compromis. Je suis sûr que vous avez faim vous aussi.» «Non, en fait, j’ai déjà mangé», dit Marc. Josh n’arrive pas à se taire. «Je suivrai votre cours au prochain semestre, monsieur. J’aurai des cours pas mal intéressants. J’ai pris la menuiserie et le soudage.» «C’est bien, Josh, mais pourquoi n’essaies-tu pas de bien te tenir?» À 11 h 30, Josh s’en va. «Au revoir, monsieur. On se reverra bientôt.» «J’espère que non», répond Marc. «Moi aussi, j’espère que non!», dit Josh en souriant. Il enfile son sac à dos et sort d’un pas léger. À 11 h 35, Marc se rend à la cafétéria. Il a dix minutes pour manger. «Bonjour, ma chère», dit-il à la serveuse. «Bonjour, Marc.» «Il reste de la soupe?» «Non», dit-elle en soupirant. Marc prend une salade julienne dans un emballage de plastique et s’en va dans la salle du personnel.
Il y a un bruit d’enfer dans la classe. Des tambourinements émanant de quelques tables ponctuent les incessants «monsieur, monsieur!». Le groupe de dix garçons et de quatre filles passe ensuite dans la pièce d’à côté pour faire des recherches dans Internet et prendre des notes sur la sécurité. L’atmosphère est fébrile. Un sourire un peu forcé sur les lèvres, Marc parcourt la classe et vient en aide aux jeunes. Un garçon aux cheveux noirs, des lunettes de sécurité derrière la tête, ne tient pas en place. «Les quatre pattes par terre, s’il te plaît, Chris.» Ce dernier s’exécute, puis se penche à nouveau vers l’avant et fait lever sa chaise alors que Marc vérifie son travail. Il ne s’en rend peut-être même pas compte; une force irrésistible les anime, comme les bulles d’air qui remontent à la surface de l’eau. La discipline parvient à les contenir, mais leur énergie débordante nécessite des efforts constants. «Plus de 3 000 jeunes se blessent au travail chaque année. Vous voyez ça?», demande Marc. «C’est parce qu’ils sont stupides», répond quelqu’un. «Ça n’a pas d’importance. Prenez-en note.» «Vous faites du bon travail, dit Marc, c’est bien.» Mais à la fin du cours, plusieurs garçons n’ont rien écrit dans leur calepin. Toute une différence entre ce groupe et la classe de 12e année. Le groupe retourne au laboratoire de menuiserie. Les jeunes font preuve d’un calme étonnant en attendant le son de la cloche. Un garçon portant une chemise hawaïenne trop grande pour lui commence à passer le balai. «Chou-chou», lui lance avec mépris un de ses camarades. Le garçon n’a plus envie de balayer. «De toute façon, ça ne marche pas», dit-il à part lui. «Monsieur, ce balai ne ramasse rien!» La sonnerie retentit; il est 14 h 30. Les jeunes sortent dans un vacarme qui s’amplifie dans les couloirs. Marc a terminé sa journée d’enseignement; il apporte les fiches de présence au bureau et se verse un verre d’eau dans la salle du personnel. À 14 h 40, les ventilateurs se mettent en marche et Marc commence à tailler du cèdre en bâtonnets d’un demi-pouce pour la classe de 12e année, qui fabriquera des modèles de terrasses demain matin. Marc est fier de ses élèves et de leurs réalisations, mais le meilleur témoignage de son succès est moins tangible. Il s’agit des coffrets, des photos et des notes amicales de ses élèves, qui ont su démontrer leur confiance, leur créativité et leurs compétences avec une finesse insoupçonnée. Marc Gélinas
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