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Les enseignantes et enseignants en herbe qui ont fait ce stage au Kenya chez les Kipsigis, et les membres de la faculté d’éducation de l’Université Nipissing qui les accompagnaient, utilisent, pour le décrire, des termes comme «accablant» et «frustrant», mais aussi «incroyable», «sensationnel», «fantastique» et «puissant». Une expérience marquante. Pendant trois semaines en février dernier, 18 étudiants en enseignement et trois membres de la faculté d’éducation de l’Université Nipissing ont fait un stage à l’école primaire Motony dans la région Maasai Mara du sud-ouest du Kenya. Le doyen de la faculté d’éducation, Ron Common, est fier du programme de stage en alternance qui, depuis 2003, offre aux étudiantes et étudiants, ainsi qu’aux membres de la faculté, la possibilité de faire un stage au Cameroun, en Chine et en Angleterre, en plus de stages en enseignement en plein air et dans les Premières nations du nord de l’Ontario. «Nous voulons offrir des expériences culturellement et linguistiquement différentes pour les aider à devenir des personnes et des enseignants plus expérimentés et bien équilibrés», explique M. Common. «Nous avons convenu d’offrir une variété de stages en alternance, affirme l’enseignante-associée, Lorraine Frost, qui a accompagné M. Common et les étudiants au Kenya. Ça les aide à gagner de l’assurance et à être plus créatifs et ingénieux dans leurs propres classes.» Pendant plusieurs années, une grande sécheresse a ravagé cette partie du Kenya, tout comme en Ouganda et en Éthiopie. Les lits des rivières sont à sec et la famine menace nombre de Kipsigis, bergers et pasteurs de tradition. Le gouvernement kényan finance l’éducation jusqu’au niveau Standard-8 (équivalent à la 8e année) et pour la plupart des habitants, les 500 $ qu’il en coûte pour fréquenter l’école secondaire la rendent hors d’atteinte. Quoiqu’il en soit, au niveau Standard-8, seul un petit nombre d’élèves ayant commencé au jardin d’enfants fréquente toujours l’école à ce niveau, puisque la vaste majorité la quitte pour aider leur famille à survivre.
Tout de même, les élèves de l’école primaire Motony ont enseigné une leçon de force et de joie à leurs visiteurs. «Ils nous ont accueillis les bras ouverts, ils appréciaient notre présence. Ils aiment être à l’école, déclare Melissa Grech, qui a enseigné à 38 élèves de niveau Standard-6 lors de son stage. Ils étaient joyeux chaque minute de la journée.» L’agence Libérons les enfants (voir ci-dessous) s’est occupée de la logistique et de l’hébergement des stagiaires. La nourriture et les conditions de vie étaient rudimentaires : ils dormaient sous des tentes, il n’y avait pas d’eau courante et l’alimentation électrique était sporadique. Dans l’école, du bois peint en noir servait de tableau, et les chèvres et les poulets se promenaient parfois sur le sol en terre battue des classes. Les ressources pédagogiques étaient rares. Des leçons apprisesLes stagiaires ont vite appris à se débrouiller et à inventer du matériel. Des bâtons et des cailloux servaient aux exercices de calcul. Ils ont inventé des chansons et des comptines pour aider les enfants à apprendre des notions mathématiques importantes, comme les soustractions avec emprunt : «Je ne peux enlever 9 de 2, alors j’emprunte 1 à 2». Cela vous donne une idée. «C'était très gratifiant pour nos stagiaires d’entendre les élèves chanter leurs chansons dans la cour d’école!», se rappelle Mme Frost. Sarah Nelles et son partenaire ont enseigné à 53 élèves de niveau Standard-5. «La gestion de classe ne pose aucun problème. Les enfants veulent être là. Ils sont extrêmement motivés à apprendre et valorisent l’éducation.» Mais il y avait d’autres problèmes pour Mme Nelles, comme devoir compenser pour le manque de matériel et le fait que les enfants commencent à apprendre l’anglais au niveau Standard-4. Pour donner une leçon sur les mammifères, son partenaire et elle-même ont mimé leurs caractéristiques. Bien qu’exigeante, la leçon fut un succès. «Le mime est universel, explique Mme Nelles. Le mime et beaucoup de répétitions les ont aidés à comprendre.» Enseigner à de grands groupes pratiquement sans fournitures a forcé les stagiaires à user de compétences en communication et d’ingéniosité. Quelques phrases de base en langue kipsigis ont facilité la compréhension. «C'était le retour à la base, affirme Glyn Madill, qui a enseigné à 15 élèves de niveau Standard-8. Il n’y avait ni ordinateur ni magnétoscope. Comme je n’avais pas d’outils pédagogiques, tout est venu de moi. Il n’y avait que moi et mes élèves, et c'était fantastique.» Il devrait travailler dans une école secondaire du Rainbow District l’an prochain, et espère pouvoir y enseigner tout aussi librement. Puisque la langue d’enseignement est l’anglais, une langue seconde pour les élèves, les stagiaires devaient aussi trouver des moyens d’enseigner pour répondre aux divers niveaux de compréhension. Pour les élèves ayant une meilleure compréhension, les stagiaires pouvaient enseigner une histoire complète avec tous les thèmes qui l’accompagnaient. Pour les moins à l’aise, la même histoire servait à enseigner du vocabulaire et des exercices de compréhension de base. Apport de compétencesLes stagiaires canadiens ont enseigné chaque jour pendant trois semaines. Après les heures de classe, ils aidaient le personnel de Libérons les enfants à construire une nouvelle école. «Ce programme permet de mettre tout le monde au même niveau», avoue M. Common en riant. Les stagiaires de Nipissing ont aidé à finir l’école Motony et à nettoyer et décorer les classes en préparation de l’ouverture de la nouvelle école. «C'était fantastique, dit M. Madill. Les villageois accordent une grande importance à l’éducation, et respectent et apprécient à sa juste valeur le cadeau que cela représente pour leurs enfants.» Bien qu’il pense enseigner dans le nord de l’Ontario, M. Madill dit qu’il ne peut tourner la page. Une fois qu’il aura un poste, il prévoit passer un mois par année à travailler dans les écoles du Kenya et espère retourner dans la même région. Krista Thompson tient à continuer d’aider les Kényans qu’elle a rencontrés. «C'est beaucoup plus important de connaître les personnes qu’on aide», confie-t-elle. En tant qu’un des 18 étudiants de la faculté d’éducation, elle déclare : «Nous aurons 18 classes d’au moins 30 élèves et nous pourrons accomplir beaucoup de choses.» De fil en aiguilleM. Common remarque que les stagiaires qui ont vécu cette expérience ont une plus grande conscience sociale et une meilleure compréhension de leur rôle d’enseignant et de citoyen du monde. «Ils sont conscients que nous sommes très privilégiés au Canada, dit M. Common. Cette expérience les suivra toute la vie et touchera donc des milliers de jeunes dans leurs écoles.» Dans leur propre classe l’an prochain, ces nouveaux enseignants sensibiliseront leurs élèves aux problèmes mondiaux. Melissa Grech espère enseigner dans une classe élémentaire de Durham ou de Peterborough l’an prochain. Elle participe activement à la collecte de fonds de Libérons les enfants. D’autres stagiaires de programmes internationaux continueront d’enseigner à l’étranger après avoir reçu leur diplôme. Mme Frost mentionne qu’un ancien étudiant, qui s’était rendu au Cameroun pour son stage il y a deux ans, enseigne maintenant au Bangladesh aux enfants de la rue le soir et dans une école huppée offrant le baccalauréat international le jour. «Son emploi de jour lui permet de vivre sa passion», explique-t-elle. Après son expérience au Kenya, Mme Nelles veut aussi continuer d’enseigner à l’étranger, peut-être en Afrique ou en Asie. Elle a adoré travailler dans un milieu où l’éducation était très valorisée, tant par les élèves que les parents. «Je ne tiendrai plus jamais les choses pour acquises, jure-t-elle. Ces enfants ont compris l’essentiel. Ils valorisent ce qui est important : l’amour, l’amitié, la nourriture et l’éducation. Tout revient à ça et non au consommateurisme ou à la mode. Nous pouvons tous apprendre d’eux.» LibÉrons les enfantsCraig Kielburger, natif de Toronto, a fondé l’agence Libérons les enfants en 1995, alors qu’il avait 12 ans. Il a obtenu plus tard l’attention internationale quand il est parti en croisade contre la main-d’œuvre enfantine, en dénonçant l’exploitation des enfants dans le monde en développement. Aujourd’hui, Craig et son frère Marc gèrent l’agence. Libérons les enfants a construit plus de 400 écoles dans 23 pays, dont l’école primaire Motony, où s’est rendue une partie du groupe de Nipissing. L’agence offre ainsi la chance à 35 000 enfants, qui ne pourraient autrement pas aller à l’école, de la fréquenter. Récemment, Libérons les enfants a entamé la construction de cliniques et établi des projets pour donner accès à de l’eau potable. Au Kenya, l’année scolaire dure jusqu’à la fin juillet. Alors, même les personnes qui enseignent à temps plein en Ontario peuvent se porter volontaire dans des écoles pour participer à l’effort humanitaire de Libérons les enfants. En juin 2005, l’Université Nipissing a remis un doctorat honorifique aux frères Kielburger pour leur travail exemplaire. En avril 2006, la reine Silvia de Suède a présenté à Craig Kielburger le Prix des enfants du monde pour les droits de l’enfant. Un jury composé d’enfants de partout dans le monde a choisi le lauréat de ce prix fondé par Enfants du monde avec le soutien du gouvernement suédois et de plusieurs organismes humanitaires. Le site de Libérons les enfants est offert en anglais : www.freethechildren.org. Plans de leÇonsLe Toronto Star collabore avec Nipissing et Libérons les enfants pour encourager l’engagement des jeunes envers les problèmes mondiaux. Tous les deux jeudis, le Star publie un article rédigé par les frères Kielburger sur un nouveau sujet actuel et ses répercussions. Ils expliquent également comment les jeunes d’ici peuvent infuencer la vie des autres en choisissant d’être proactif. À l’aide du programme-cadre d’études sociales de 6e année et des articles des frères Kielburger, les étudiants du programme de formation à l’enseignement de Nipissing ont élaboré des plans de leçons. Des renseignements généraux, des liens vers les plans de leçon et des tribunes en ligne sont accessibles en anglais dans le site du quotidien. Programme alimentaire mondialLes repas du midi offerts à l’école primaire Motony sont fournis par le Programme alimentaire mondial des Nations Unies (PAM). L’objectif du programme est d’enrayer la famine et la pauvreté à l’échelle mondiale. Il fait la promotion de politiques et d’opérations qui aident directement les pauvres et les sous-alimentés. En tant qu’organisme d’aide alimentaire sous l’égide des Nations Unies, le Programme alimentaire mondial fournit la logistique nécessaire pour soutenir l’aide alimentaire, répond aux besoins en situation d’urgence et appuie le développement social et économique. ExpÉrience À l’ÉtrangerNipissing n’est pas la seule université à offrir des stages additionnels à l’extérieur des écoles financées par la province. Parmi les autres facultés d’éducation en Ontario, nommons celle de Queen’s et l’IEPO de l’Université de Toronto. À Queen’s, les étudiants doivent effectuer un stage en alternance de trois semaines à l’extérieur du système scolaire ordinaire en plus de leur stage de 13 semaines dans une école financée par la province. «Le printemps dernier, nous avons couvert toutes les régions du globe, sauf l’Antarctique, déclare Brian McAndrews, coordonnateur des stages à Queen’s. Environ 100 de nos 700 étudiants ont choisi de faire un stage à l’étranger.» À l’IEPO, les étudiants doivent faire un stage de cinq semaines qui complète leur programme. Bien que les étudiants puissent eux-mêmes choisir le lieu, ils doivent prouver qu’il est explicitement relié aux normes d’exercice de l’Ordre. Les stages se font habituellement dans les écoles de l’Ontario, mais ils peuvent aussi se faire dans d’autres lieux éducatifs, comme TVOntario, le Musée des beaux-arts de l’Ontario ou dans des écoles ailleurs dans le monde. Le printemps dernier, une centaine d’étudiants du programme de formation à l’enseignement de l’IEPO ont choisi de faire un stage à l’étranger, soit au Mexique, dans les Caraïbes, en Espagne, en France, au Kenya, au Swaziland, au Vietnam, en Australie et aux Émirats arabes unis. |