Jane Dewar, EAO
Aider les élèves à raccrocher en crochetant
de Leanne Miller, EAO
«Regardez ce que j’ai trouvé hier soir», lance le grand et mince Tyler, alors qu’il entre dans la salle 126.
Il porte un jean, un chandail à capuchon, deux gros clous d’oreilles, probablement en faux diamants, et un écouteur-bouton dans une oreille. Avec enthousiasme, il sort deux pelotes de fil multicolore de son sac à dos pour les montrer à son enseignante et annonce : «Je veux faire des mitaines».
«C’est formidable, Ty, répond Jane Dewar, EAO. Je vais essayer de te trouver un patron dans Internet ce soir et tu pourras commencer à crocheter demain.»
Mme Dewar enseigne les arts à Tyler, un élève de 10e année. Celle qui se désigne elle-même comme la maman de l’école enseigne aussi le leadership et fait partie des cinq enseignants qui ont été nommés «Enseignant de l’année» dans le cadre des Prix du premier ministre pour l’excellence en enseignement en 2009-2010. La citation concernant son prix fait l’éloge de sa capacité de concrétiser le curriculum en créant des expériences authentiques, riches et motivantes pour ses élèves.
Mme Dewar a terminé sa dix-septième année d’enseignement au printemps dernier et a passé les dix dernières années à la Nantyr Shores Secondary School, à Innisfil, au sud de Barrie, dans le Simcoe County District School Board. Mme Dewar faisait partie de l’équipe qui a ouvert l’école secondaire polyvalente de 1 400 élèves en 2001. Elle avait commencé sa carrière au Toronto District School Board où elle enseignait les matières de base et les arts visuels en 7e et 8e année.
«Je ris tous les jours en travaillant; mon emploi est incomparable», dit Mme Dewar, qui a embrassé la profession enseignante plus tard dans la vie, après avoir été chasseuse de têtes.
«Ce qui est particulier à propos de l’enseignement, poursuit-elle, c’est que l’enseignant est le seul à savoir à quel point il fait du bon travail.»
Les élèves apprennent en fin de compte à utiliser l’art comme moyen de s’exprimer et d’examiner le monde.
Elle ajoute qu’elle pense chaque jour à quelque chose qu’elle aurait pu faire mieux. C’est pourquoi elle reste dans la profession.
«J’aurais pu créer un lien avec cet enfant. J’aurais pu mieux expliquer ce concept. J’aurais pu donner un autre exemple pour éclaircir ce point.»
Sa journée commence avec 24 garçons à risque, comme Tyler, dans le cours Urban Arts for Social Change, un cours alternatif de conception et d’art qu’elle a élaboré il y a deux ans.
«Nous avions trop de garçons à qui il manquait des crédits, qui étaient souvent absents et qui commençaient à décrocher, explique-t-elle. Il fallait faire quelque chose pour les motiver et les aider à réussir.»
On peut lire dans la description de son cours que les élèves explorent les arts de la rue, et les formes et concepts artistiques urbains en lien avec des questions de justice sociale. Le cours met l’accent sur les éléments et principes de la conception, sur le dessin d’observation à l’aide de divers moyens et techniques, et sur le développement d’une pensée créatrice et critique. Dans ce cours, qui aborde le processus créatif par l’expérimentation, les élèves apprennent en fin de compte à utiliser l’art comme moyen de s’exprimer et d’examiner le monde.
«Cette dernière phrase est celle qui est à la base du cours, dit Mme Dewar. «Je voulais concevoir un cours d’arts visuels qui donnerait à ces garçons, de jeunes hommes en réalité, une voix dans l’école en leur permettant d’abord de mieux se connaître. Ils ont besoin de voir que des adultes se soucient d’eux, qu’ils sont importants et que l’école peut être pertinente et utile pour eux.»
Jane Dewar, EAO, tisse des liens avec ses élèves et leur inculque des bases solides en design et en expression artistiques.
Grâce à des sujets comme «Le graffiti, art de la rue», «Planches à roulettes», «Exprime-toi : les pochoirs autocollants», «Dis quelque chose», «T-shirts» et «Guérilla artistique : bombes de fil», les élèves ont rapidement une meilleure connaissance d’eux-mêmes et de leur rôle dans la classe, dans l’école et dans la collectivité d’Innisfil.
Mme Dewar connaît le programme-cadre d’arts visuels de 10e année comme le fond de sa poche.
«Jamais je n’abaisserai la barre, dit-elle. Ce cours ne vise pas à leur faciliter les choses. Je garde la barre haute tout en changeant le contenu afin de le rendre pertinent pour les élèves et ainsi les aider à dépasser cette barre.»
Elle explique les distinctions importantes entre «faire» et «apprendre». Dans le cours, les élèves doivent faire des recherches et dessiner des graffitis, concevoir et fabriquer des planches à roulettes, et disséminer des messages positifs dans toute l’école grâce aux arts de la rue. Ils apprennent à améliorer leur processus créatif par l’utilisation de la conception, des couleurs et des motifs comme moyens d’expression tout en collaborant avec les autres membres de leur groupe à l’aide de remue-méninges et de la résolution de problèmes. Le moyen est l’art, mais les résultats sont des objectifs d’apprentissage complexes et des compétences pour la vie.
John Phillips, EAO, dirige le travail de révision et de mise à jour des programmes-cadres en arts pour le Ministère depuis quatre ans. Pour lui, Mme Dewar contribue de manière importante à la composante sur les arts visuels. Elle a d’ailleurs été présentée dans une série de webémissions financées par le Ministère, qui illustrent l’enseignement exemplaire dans le domaine des arts.
«Même si les travaux que les jeunes produisent sont plutôt bons, dit M. Phillips, c’est leur motivation et leur engagement qui ressortent le plus.»
Mais ne croyez pas que ce cours soit une occasion de faire de l’artisanat ou des travaux inutiles, avertit M. Phillips. Ces élèves acquièrent de solides bases en conception et en expression artistiques. Dans sa classe, Mme Dewar modélise des valeurs importantes dans la formation du caractère, notamment le respect et le soutien mutuels, de même que le travail autonome et collaboratif.
«Ses élèves atteignent des objectifs d’apprentissage clairs. Il ne s’agit pas simplement de convaincre des garçons à faire du crochet.»
L’objectif, explique la directrice, Heather Hamilton, EAO, est d’étendre la réussite des garçons aux autres cours.
Ils choisissent des sujets et des activités qui les intéressent et les motivent et, rapidement, ils goûtent à la réussite. Peu après, ils viennent travailler à des projets à l’heure du midi et plusieurs arrivent même plus tôt le matin. Ce sont pourtant des garçons qui avaient de la difficulté à sortir du lit et à arriver à temps à l’école l’an dernier.
Les élèves apprennent à mieux se connaître et à communiquer leurs dons aux autres.
Angela Taylor, EAO, enseigne les arts dans la salle de classe à côté de celle de Mme Dewar depuis 2001. Elle admire la capacité de sa collègue à voir ses élèves d’un autre œil.
«Elle sait ce dont tous les élèves ont besoin pour fonctionner et réussir à l’école. Elle les met à l’aise. Grâce à elle, ils se sentent confiants et ils finissent par réussir. Elle met les choses en place une après l’autre.
«Elle est une source d’inspiration pour ses élèves, mais aussi pour ses collègues. Elle les encourage à essayer de nouvelles choses. Qu’elle enseigne les arts, les mathématiques, le leadership, ou qu’elle entraîne l’équipe de curling, elle est la même. Elle est vraiment quelqu’un qui agit, notre Mme Dewar!»
La citation relative au prix de Mme Dewar mentionne aussi son travail à titre de présidente de l’Ontario Society for Education through Art (OSEA). C’est par l’intermédiaire de l’OSEA qu’elle a travaillé au sein de l’équipe du Ministère qui a rédigé les programmes-cadres en arts et dans l’équipe de rédaction de Literacy GAINS pour élaborer l’enseignement différencié de la 7e à la 10e année.
«Il est important de réseauter, d’échanger et de promouvoir les intérêts des enseignants d’arts visuels de la province, affirme Mme Dewar. Si je peux aider à créer un curriculum novateur qui inclut la littératie dans nos programmes et qui permet à plus d’élèves de réussir, je pense que ça vaut la peine.»
Apprendre par le leadership
Mme Dewar enseigne aussi le leadership aux élèves du cycle supérieur, mais ce sont les élèves qui dirigent tout et elle ne fait que leur faciliter le travail. Les élèves apprennent à mieux se connaître et à communiquer leurs dons aux autres. Ils organisent des événements majeurs à l’école, ce qui assure à l’école une culture et une communauté d’élèves positifs. Les «lumières du mercredi soir» en sont un bon exemple. Chacune des cinq écoles du Simcoe District School Board organise une partie de football en soirée par saison. Pour Mme Dewar, c’est une occasion de convier les parents à l’école pour établir des liens avec les élèves de l’élémentaire et leurs parents, les voisins de l’école et d’autres membres de la communauté. Selon elle, cet événement permet de montrer à quel point les adolescents sont formidables.
Les élèves de son cours de leadership se sont divisés eux-mêmes en groupes pendant la première semaine de l’année scolaire, puis ils ont organisé la soirée de football du 6 octobre, en prévoyant notamment de la nourriture, des concours, la sécurité, les spectacles et les concessions de vente. Ils ont trouvé plusieurs entreprises locales pour les commanditer, ont exigé deux dollars pour l’entrée et ont amassé plus de 5 000 $ pour des œuvres de charité.
La classe a donné 1 000 $ à la campagne de financement Opération Héros de la Base Borden qui vise à verser des bourses d’études postsecondaires à des membres des familles des militaires canadiens. La classe a aussi donné 500 $ pour créer une bourse d’études postsecondaires qui sera versée à un élève de Nantyr Shores. La classe est même parvenue à recueillir assez d’argent pour que toute l’école puisse profiter d’une semaine spéciale d’activités afin d’aider à combattre la grisaille de novembre. Le reste de l’argent recueilli a été donné au programme de football.
Aujourd’hui, la classe de leadership se prépare à l’événement Spin 4 Kids, tenu le vendredi, durant lequel les élèves qui ont trouvé des commanditaires pédalent sur des vélos stationnaires toute la soirée. L’événement comprend des jeux, des prix, de la musique, du chant et de la danse, en plus d’une vente aux enchères d’œuvres d’art. Le but des élèves est de recueillir 20 000 $ pour soutenir les activités parallèles au programme de l’école et la construction du nouveau centre anticancéreux régional Simcoe-Muskoka de l’hôpital Royal Victoria. Ils ont aussi consacré à ces causes dix pour cent de l’argent récolté à la partie de football.
«Être dans la classe de Mme Dewar, c’est comme être au camp d’été, dit Daniel. Bien sûr, on est à l’école et on travaille chaque jour, mais c’est du travail comme dans la vraie vie : éthique, prise de décisions, organisation, planification, communication, collecte de fonds, travail d’équipe et travaux scolaires. Elle est la femme la plus formidable au monde.» Matt était dans le cours d’arts urbains de Mme Dewar l’an dernier; il se distingue maintenant dans son cours de leadership.
«L’an dernier, en arts, elle m’a montré qui je suis et ce que je devais changer pour réussir à l’école. Je vois l’école différemment maintenant et je vois que le fait de travailler m’aide. Je le fais pour moi et personne d’autre.»
Les bulletins de mi-semestre sortent aujourd’hui et, dans la classe d’arts de 10e année, 24 garçons se pressent autour du bureau de Mme Dewar. «Je ne peux pas dessiner, mais j’ai la meilleure note de la classe, dit Tyler. C’est la première fois que j’ai 90.»
Quand on lui demande comment il se sent, il répond : «C’est pas mal motivant».
Quand Mme Dewar lui demande s’il pense pouvoir obtenir d’aussi bonnes notes dans d’autres cours, il s’arrête un instant pour réfléchir : «Oui, je pense que je peux.»
Appréciation des élèves
- Quand les garçons ont appris que Jane Dewar avait remporté l’un des Prix du premier ministre pour l’excellence en enseignement, ils n’étaient pas surpris. Ils ont applaudi, puis les questions ont fusé.
- «Alors, ça veut dire qu’elle est l’une des meilleures enseignantes en Ontario?» Oui.
- «Pouvez-vous écrire sur ce qui la rend si fantastique?» Bien sûr.
- «Ça veut dire que d’autres enseignants devraient lui ressembler?» Oui.
- «Les enseignants veulent toujours qu’on les respecte, mais Mme Dewar nous montre qu’elle nous respecte en nous proposant des projets qui nous intéressent. Nous la respectons en retour.»
- «On se sent chez nous dans sa classe. On peut être nous-mêmes, travailler à l’ordinateur, écouter de la musique, parler et faire notre travail. Avoir tout ça dans une classe, c’est formidable. Ensuite, quand elle nous enseigne quelque chose au tableau, nous l’écoutons parce que nous la respectons.»
- «Elle tient compte de nos intérêts quand elle prépare ses cours et cela nous permet de nous améliorer.»
- «C’est pour ce cours que je me lève le matin. Avant de quitter la classe de Mme Dewar, je respire profondément et je peux passer à travers le reste de la journée.»
Document à distribuer : l’art urbain comme outil de changement social
Ressources en arts
Apprendre grâce aux arts
Le Service des programmes d’études Canada (CSC) a reçu une subvention d’un million de dollars du ministère de l’Éducation pour concevoir des webémissions qui illustrent l’enseignement exemplaire dans toutes les matières, en français et en anglais. On trouve aussi des ressources élaborées par des enseignants et conformes aux programmes-cadres, notamment les lignes directrices relatives aux arts, qui ont été révisées récemment.
Pour plus de renseignements, visitez www.curriculum.org/index2f.shtml (français) ou www.curriculum.org/index2.shtml (anglais).
CODE, OMEA et OSEA
Le Ministère a également donné un million de dollars à trois associations artistiques pour qu’elles élaborent du matériel de soutien au curriculum, notamment du matériel reproductible. Consultez ces ressources à :
- Council of Ontario Drama and Dance Educators (code.on.ca/resource)
Ontario Music Educators’ Association (www.omea.on.ca/resources.php)
Ontario Society for Education through Art (www.osea.on.ca/publications.html)
Exemples de matériel de perfectionnement professionnel sur l’enseignement différencié (7e à 10e année)
Cet ensemble de matériel de soutien au perfectionnement professionnel, qui provient de l’équipe EduGAINS du Ministère, inclut des ateliers en plusieurs parties, des présentations vidéo, des fichiers à imprimer, des vidéoclips et des cheminements pédagogiques interactifs en ligne. Ces ressources reflètent les stratégies en matière de littératie et d’évaluation dans diverses matières, dont les arts visuels. Pour plus de renseignements, visitez edugains.ca/newsite/di/dilearningexamples.htm.
Prix du premier ministre pour l’excellence en enseignement
Toutes les personnes employées par les écoles ou les conseils scolaires financés par les fonds publics de l’Ontario sont éligibles aux Prix du premier ministre pour l’excellence en enseignement. Vous pouvez nommer des enseignantes ou enseignants, membres du personnel de soutien, directions d’école, directions adjointes, agentes ou agents de supervision, directions de l’éducation et bien d’autres.
Il y a six catégories de prix, rendant hommage à un éventail de personnes et de talents :
- Enseignant de l’année : Tous les enseignants certifiés des écoles élémentaires et secondaires, y compris les suppléants, les enseignants à temps partiel et ceux qui sont à la retraite depuis moins d’un an.
- Nouvel enseignant de l’année : Tous les enseignants certifiés des écoles élémentaires et secondaires, y compris les enseignants à temps partiel et les suppléants, qui sont dans leurs trois premières années d’enseignement.
- Excellence du personnel de soutien : Tous les membres du personnel de soutien des écoles et des conseils (p. ex., assistant en éducation, secrétaire, bibliotechnicien, concierge), y compris les suppléants, les employés à temps partiel et ceux qui sont à la retraite depuis moins d’un an.
- Excellence en leadership : Tous les enseignants certifiés des écoles élémentaires et secondaires, y compris les suppléants, les enseignants à temps partiel et ceux qui sont à la retraite depuis moins d’un an. Toutes les directions d’école, directions adjointes, agentes et agents de supervision, et directions de l’éducation certifiés, y compris les enseignants à temps partiel et ceux qui sont à la retraite depuis moins d’un an.
- Carrière exceptionnelle : Tous les éducateurs certifiés comptant au moins 25 années d’expérience, y compris les suppléants, les enseignants à temps partiel et ceux qui sont à la retraite depuis moins d’un an.
- Équipe de l’année : Une équipe composée de deux à dix personnes qui ont travaillé ensemble pour réaliser un objectif commun. Les équipes peuvent comprendre des enseignants, des membres du personnel de soutien ou les deux. Ces personnes peuvent travailler dans la même école ou le même conseil, ou dans différents conseils et écoles.
Pour obtenir de plus amples renseignements, consultez le site www.edu.gov.on.ca/prixenseignement/FAQs.html.