Le marché de l’emploi devient plus difficile pour les nouveaux enseignants. Mais comme le démontre notre étude sur la transition à l’enseignement de 2011, ils font aussi face à d’autres défis.
de Frank McIntyre
Plus que jamais, un grand nombre de nouveaux pédagogues restent sans emploi durant leur première année de carrière. Nombre de ceux qui enseignent sont sous-employés, ce qui signifie qu’ils ne travaillent pas suffisamment en tant qu’enseignants. C’est pourquoi ils sont de plus en plus nombreux à accepter un autre type de travail, surtout de façon provisoire, car ils demeurent résolus à faire carrière dans la profession.
Parmi les diplômés de 2010 qui ont cherché un emploi en enseignement durant l’année scolaire 2010-2011, un sur trois a déclaré n’avoir eu aucun succès, n’ayant même pas réussi à obtenir des journées de suppléance. L’étude sur la transition à l’enseignement de 2011 précise également que près de la moitié des personnes qui ont trouvé un emploi en enseignement n’ont toutefois pas obtenu autant de travail qu’elles le souhaitaient.
J’ai été chanceux, j’ai été embauché par deux conseils scolaires au début de l’année. Cependant, en raison du recrutement excédentaire de suppléants, je n’ai réussi à travailler que deux ou trois jours par semaine en tout dans les deux conseils scolaires.
Enseignant suppléant aux cycles intermédiaire et supérieur,
diplômé en 2010, sud-ouest de l’Ontario
Le taux combiné de chômage et de sous-emploi en première année de carrière chez les membres de l’Ordre au cours de l’année suivant l’obtention de leur diplôme a grimpé de 30 % en 2006 à 67 % aujourd’hui, tandis que le taux de chômage a décuplé, passant de 3 % à 30 %.
La plupart des personnes qui ont connu un certain succès dans leur recherche d’emploi faisaient de la suppléance à la journée ou cumulaient emploi à temps partiel et emploi contractuel de durée limitée, souvent dans plus d’une école. Le premier emploi de trois personnes sur cinq a été de la suppléance à la journée et, à la fin de l’année, 39 % d’entre elles avaient obtenu un contrat de durée limitée et 38 % étaient encore sur la liste de suppléance à la journée.
Moins du quart des enseignants (23 %) qui ont trouvé un travail dans leur domaine ont obtenu un poste régulier, soit moins de la moitié (47 %) des nouveaux diplômés ayant déclaré détenir un emploi régulier il y a six ans, et bien moins que les 70 % de 2001, au cœur de la dernière pénurie d’enseignants.
De tous les enseignants en première année de carrière, y compris ceux qui n’ont pas d’emploi, seulement un diplômé de 2010 sur huit actuellement sur le marché de l’emploi (13 %) a déclaré occuper un poste régulier; un de ces postes sur quatre est dans une école indépendante.
Manque d’emplois tant à l’élémentaire qu’au secondaire
Les enseignantes et enseignants de tous les cycles sont maintenant touchés par le rétrécissement du marché du travail. Le chômage a augmenté et s’étend maintenant à plus d’un enseignant sur quatre pour chaque type d’agrément.
Taux d’emploi en 2010-2011 par cycle
résultats |
primaire |
moyen |
intermédiaire |
éducation technologique |
poste régulier |
20 % |
24 % |
25 % |
40 % |
suppléance à |
42 % |
44 % |
27 % |
31 % |
sans emploi |
39 % |
25 % |
30 % |
27 % |
sous-employés |
46 % |
54 % |
45 % |
54 % |
Ce sont les pédagogues qualifiés pour enseigner aux cycles primaire et moyen qui connaissent le taux de chômage le plus élevé – plus de deux sur cinq d’entre eux n’ont pas trouvé d’emploi en enseignement.
Le marché du travail ontarien s’est également rétréci pour les enseignants en éducation technologique cette année : trois sur dix n’ont pas d’emploi et plus de la moitié de ceux qui en ont sont sous-employés. Leur taux d’obtention d’un poste régulier demeure toutefois plus ou moins supérieur à celui des autres pédagogues.
Les pédagogues des cycles intermédiaire et supérieur connaissent maintenant un succès mitigé durant leur première année : le tiers n’a pas trouvé d’emploi, le quart seulement a obtenu un emploi régulier et près de la moitié de ceux qui ont trouvé un poste en enseignement ont dit avoir été sous-employés pendant cette année.
Le milieu de l’enseignement est actuellement très concurrentiel. Les nouveaux enseignants font concurrence à des enseignants chevronnés. Je déteste le dire, mais il semble que les relations soient plus importantes que les qualifications pour obtenir un emploi.
Diplômée en informatique, cycles intermédiaire et supérieur, 2010,
sans emploi, est de l’Ontario
Nombre de nouveaux enseignants quittent la province ou travaillent dans un autre domaine
Environ un enseignant en première année de carrière sur cinq (19 %) a cherché un poste en enseignement dans une autre province ou à l’étranger, et un sur dix enseignait à l’extérieur de l’Ontario à la fin de l’année.
J’ai été obligée de déménager parce que je ne pouvais pas payer mon loyer et rembourser mon prêt étudiant avec mon emploi au salaire minimum de l’Ontario. Je sais que la plupart de mes condisciples sont dans la même position que moi, bon nombre ayant un emploi faiblement rémunéré dans la vente au détail.
Diplômée de 2009, deuxième carrière,
sans emploi, est de l’Ontario
Diplômée de 2010, géographie et anglais, cycles intermédiaire et supérieur
Un plus grand nombre de pédagogues en première année de carrière travaillent maintenant dans un domaine autre que l’enseignement, soit au lieu d’enseigner, soit en plus d’enseigner à temps partiel ou de faire de la suppléance. Le nombre de nouveaux enseignants qui travaillent dans un autre domaine a grimpé en flèche au cours des quatre dernières années, passant de 6 % à 22 %.
La plupart d’entre eux demeurent cependant déterminés à enseigner : neuf sur dix croient que leur carrière sera établie d’ici les cinq prochaines années.
Les emplois permanents se font attendre
La période d’attente pour obtenir un poste régulier s’allonge. Les sondages menés en 2011 auprès des diplômés de 2006 à 2010 témoignent d’un nombre supérieur d’enseignants sans emploi ou sous-employés que les sondages précédents.
Je m’attendais à faire de la suppléance pendant plusieurs années, mais je ne m’attendais pas à être incapable de m’inscrire sur une liste de suppléants. Il y a beaucoup trop de diplômés et pas suffisamment de postes.
Diplômée de 2009, deuxième carrière,
sans emploi, est de l’Ontario
Entre 2006 et 2011 :
- le taux de sous-emploi et de chômage des enseignants en première année de carrière est passé de 30 % à 67 %
- ...en deuxième année de carrière, de 20 à 61 %
- ...en troisième année de carrière, de 13 à 43 %
- ...en quatrième année de carrière, de 8 à 32 %
- ...en cinquième année de carrière, de 6 à 28 %.
En outre, le rapport du sondage réalisé en 2011 auprès des diplômés de 2006, 2007 et 2008 révèle que le chômage a été de cinq à sept fois plus fréquent pour ces personnes au cours des premières années de carrière que pour celles qui ont obtenu leur diplôme en 2000, c’est-à-dire dans le marché de l’emploi robuste du début de la dernière décennie.
Le marché est lent pour les pédagogues francophones, mais meilleur que pour les anglophones
De nombreux pédagogues francophones ressentent maintenant les effets d’un marché de l’emploi défavorable.
Le taux de chômage des diplômés des programmes de formation à l’enseignement en français s’est élevé de 14 % à 22 % en 2011. Dans le cas des personnes qui sont employées, le sous-emploi est passé de 28 % à 36 %. De plus, seulement une de ces personnes sur cinq a obtenu un emploi régulier en enseignement.
Les enseignants de français langue seconde ont eu plus de succès dans leur recherche d’un emploi régulier et peu d’entre eux sont en chômage. Par contre, un bon nombre doivent maintenant accepter un emploi à temps partiel durant la première année.
Malgré le déclin du taux d’emploi des pédagogues francophones au cours des trois dernières années, leurs résultats demeurent supérieurs à ceux des pédagogues de langue anglaise.
Résultats d’emploi de 2011
des pédagogues francophones et anglophones
|
diplômés d’un programme en français |
enseignants de français langue seconde |
enseignants anglophones |
sans emploi |
22 % |
6 % |
33 % |
sous-employés |
36 % |
35 % |
51 % |
contrats réguliers |
22 % |
35 % |
21 % |
Les possibilités d’emploi des enseignants néo-canadiens sont très limitées
Les enseignantes et enseignants qui ont immigré au Canada et obtenu l’autorisation d’enseigner en Ontario ont dû relever des défis considérables pour trouver un emploi tout au long des dix dernières années. Les résultats de leur recherche d’emploi se sont détériorés davantage quand la pénurie d’enseignants a pris fin au milieu de la dernière décennie.
Maintenant, la plupart des néo-Canadiens demeurent sans emploi durant l’année qui suit l’obtention de leur autorisation d’enseigner en Ontario, et trois sur quatre déclarent ne pas avoir trouvé d’emploi en enseignement, même pas de suppléance à la journée. Le taux de chômage de ce groupe a augmenté par rapport aux 68 % de 2010 et il est maintenant du double du taux de 36 % de 2007. Parmi les néo-Canadiens qui déclarent avoir trouvé du travail en tant qu’enseignant (un sur quatre), près de la moitié (49 %) de ce groupe se déclare sous-employée.
Compte tenu de mes antécédents scolaires et de mon expérience ainsi que des matières que j’enseigne, je croyais qu’il serait beaucoup plus facile de trouver au moins un poste de suppléance.
Enseignante du sud-ouest de l’Ontario,
plus de cinq années d’expérience en enseignement des sciences et desmathématiques en Macédoine
Les écoles indépendantes représentent une importante source d’emploi pour les pédagogues néo-canadiens. Elles ont fourni 45 % de tous les emplois que les néo-Canadiens ont obtenus et presque tous les emplois réguliers qu’une faible minorité d’entre eux occupaient à la fin de l’année.
Notre sondage
L’étude sur la transition à l’enseignement des nouveaux pédagogues durant l’année scolaire 2010-2011 examine le succès de l’intégration professionnelle et l’expérience en enseignement des diplômés de 2000 à 2010 ainsi que des enseignants formés à l’extérieur de la province et agréés en Ontario en 2009 et en 2010. On a utilisé des sondages en ligne auprès de vastes échantillons de chacun de ces groupes.
En tout, 6 566 enseignants ont répondu. Les taux de réponse varient de 23 % à 48 % des échantillons, avec un taux moyen de réponse de 37 %. Le taux d’exactitude varie entre 2,2 % et 4,3 %, soit 19 fois sur 20.
L’étude est rendue possible grâce à une subvention du ministère de l’éducation de l’Ontario. Ce rapport ne reflète pas nécessairement les politiques, opinions et exigences du Ministère.
La version intégrale de cette étude est disponible dans le site web de l’Ordre.
Plus de diplômés de l’Ontario en 2011
En 2011, plus de diplômés d’un programme de l’Ontario ont obtenu le titre EAO qu’au cours des années précédentes, soit 9 247 nouveaux enseignants, ce qui dépasse le nombre de 2008, année record précédente.
Les programmes des collèges frontaliers spécifiquement conçus pour les Ontariennes et Ontariens continuent de perdre de la popularité. En effet, le nombre de nouveaux diplômés a dégringolé à 675 en 2011, soit une baisse de plus de 60 % comparativement au record de 2006, lequel était de 1 744 diplômés.
Le nombre de nouveaux enseignants provenant d’autres provinces continue aussi à décliner. L’an dernier, moins d’Ontariens dotés d’un diplôme en enseignement obtenu en Australie ont reçu l’autorisation d’enseigner en Ontario. Voilà une raison importante de la baisse des nouveaux enseignants formés à l’étranger.
Dans l’ensemble, le nombre annuel de nouveaux enseignants agréés en Ontario a baissé de plus de 1 500 comparé au record de 2008, mais demeure près de 3 000 au-dessus du niveau de 1999.
année d’obtention du diplôme |
diplômés de l’Ontario |
diplômés des collèges frontaliers |
autres provinces |
autres pays |
total des nouveaux enseignants |
1999 |
5 931 |
431 |
1 142 |
805 |
8 309 |
2008 |
9 130 |
1 494 |
408 |
1 716 |
12 748 |
2010 |
9 024 |
1 048 |
395 |
1 371 |
11 838 |
2011 |
9 247 |
675 |
245 |
1 059 |
11 226 |
On demande une formation plus concrète
Les diplômés des facultés d’éducation de l’Ontario accordent énormément de valeur aux stages qui les préparent à la salle de classe et recommandent que l’on augmente le temps d’enseignement supervisé.
Près de neuf diplômés de 2010 sur dix ont dit que les stages constituent une excellente ou une bonne préparation à une carrière en enseignement et plus de la moitié ont dit qu’ils sont excellents. La majorité a également évalué de façon positive les cours de formation à l’enseignement, bien que les notes attribuées à cet égard soient bien inférieures à celles accordées aux stages. Ces évaluations demeurent les mêmes chez les pédagogues en deuxième année de carrière, selon les diplômés de 2009.
Non seulement les nouveaux enseignants apprécient-ils leur expérience de stage, mais pour eux, la prolongation de la période de stage et un supplément de formation pratique sont les grandes priorités pour renforcer la formation en enseignement en Ontario.
Parmi les six grandes priorités, quatre traitent du fait que les étudiantes et étudiants en enseignement devraient passer plus de temps dans la salle de classe – on devrait consacrer plus de temps au stage et plus de temps à l’enseignement durant le stage, offrir plus d’occasions d’être observé par des enseignants expérimentés durant le stage et fournir davantage d’encadrement et de commentaires sur cet enseignement. Les deux autres priorités retenues parmi les plus importantes ont trait à l’expérience pratique de l’enseignement; une attention accrue à la gestion de classe ainsi qu’à la mesure et à l’évaluation.