Lévaluation des habiletés en lecture et en écriture
de Rosemarie Bahr
«Je crois que la seule chose que nous révèlent les tests traditionnels, cest
si lélève a lu le texte ou non, affirme Amy Leclaire. Évidemment, il arrive que
lélève lait lu mais ne lait pas compris. Cest alors un problème
de compréhension. Mais sil ne la pas lu, alors il va de soi quil
naura pas une bonne note. Et je ne crois pas quune évaluation de ce genre
permette vraiment de déterminer les progrès de lélève.»
Leclaire estime quil en va tout autrement du nouveau test dhabiletés
en lecture et écriture de 10e année. «Lélève qui
obtient un mauvais résultat connaît un problème concret au plan de
la compréhension, de lapprentissage ou de lécriture»,
dit-elle. Leclaire, qui enseigne langlais à lArnprior
District High School, compte parmi les centaines denseignantes
et denseignants de lOntario qui ont contribué à élaborer
le test.
Depuis deux ans, lOffice de la qualité et de la responsabilité
en éducation (OQRE) élabore le contenu et les modalités dun
test dhabiletés en lecture et écriture qui sera administré à
tous les élèves de 10e année de la province. Les 160 000 élèves
de 10e année de lOntario le passeront pour la première
fois en octobre prochain.
Rhéal Gauthier, qui enseigne le français à lÉcole secondaire De-La-Salle à
Ottawa, a travaillé deux fois à ce projet une fois à la notation et, plus
récemment, pour aider à trouver la police qui servira au texte. Il croit que les
enseignantes et enseignants ne devraient pas sinquiéter denseigner en
fonction du test : «Il est suffisamment général que les élèves devraient être
capables de faire ce que lon sattend deux.»
Pour Pauline Laing, codirectrice du test dhabiletés en lecture
et écriture de 10e année, ce projet était dune envergure
considérable. «Nous parlons constamment dévaluation et de limportance
de la faire correctement, dit-elle. Quand on constate tous les facteurs
dont il faut tenir compte pour élaborer une évaluation équitable,
on comprend les difficultés quil faut surmonter et tout le travail
attentif et les recherches quil faut faire. Rien nest
simple.»
SÉLECTION DES DOCUMENTS
Sil a été difficile de trouver le matériel approprié pour le
test en anglais, la tâche fut encore plus ardue en français. Cest ce que souligne
Mariette Carrier-Fraser, codirectrice du test en français. «Le test de lecture et
décriture nest évidemment pas une traduction de langlais au français.
Nous ne nous servons pas des mêmes textes ni des mêmes questions. Pourtant, nous voulons
mesurer les mêmes habiletés dans une langue comme dans lautre.»
Elle ajoute : «Tout le monde sait quen Ontario, il y a beaucoup plus de
matériel en anglais quen français. Nous avons cherché un peu partout, en France
et au Québec entre autres. Les textes trouvés ailleurs ont dû être adaptés aux
besoins de la communauté franco-ontarienne. Et ce sont des enseignantes et enseignants
qui les ont adaptés.»
La partie du test consacrée aux habiletés en lecture est conçue pour évaluer la
capacité des élèves de comprendre les idées et les informations explicitement
énoncées dans un passage et de faire des inférences, cest-à-dire de comprendre
le message fondamental que véhicule le texte. Les élèves devront également appliquer
ce quils lisent à leur vie personnelle et utiliser la structure et le contexte pour
saisir le sens de certains mots.
La partie consacrée aux habiletés en écriture permet de découvrir si les élèves
peuvent développer une idée principale et fournir des détails et une structure à
lappui, organiser leurs idées, respecter les règles de la syntaxe, de
lorthographe, de la grammaire et de la ponctuation et utiliser des mots appropriés,
définir leur public cible et adapter leur écriture à son intention.
«Ce test ne vise pas à faire échouer les jeunes, précise Carrier-Fraser.
Nous voulons leur donner loccasion de démontrer ce dont ils
sont capables.»
Les enseignantes et enseignants peuvent aider les élèves à se préparer au test en
accordant de limportance à la lecture et à lécriture dans toutes les
matières, daprès Laing. «Par exemple, en sciences, au lieu de dire simplement
"Lisez ceci et nous en parlerons ensuite", dites plutôt "Prenons le
premier paragraphe. Y a-t-il une phrase qui semble décrire le sujet de ce paragraphe?
Pouvez-vous relever trois mots qui semblent indiquer que lauteur a trois points à
développer?" Il sagit dinsister sur les habiletés en lecture, quelle
que soit la matière.»
«Il en va de même pour lécriture, poursuit-elle. Ne mettez pas de côté la
capacité dorganiser ses idées de façon logique et ne dites pas que les élèves
nont pas à écrire car vous leur enseignez les mathématiques. Il existe bien des
façons dintégrer lécriture dans toutes les matières. »
MISE À LESSAI DU TEST
Léquipe de lOQRE, avec la collaboration
des nombreux groupes du monde de léducation, sest employée
à distinguer les compétences qui devaient faire lobjet du test
et à rechercher des documents à utiliser. Elle a également déterminé
les types de questions à retenir et les formulations qui permettent
dobtenir les meilleures réponses possibles de la part des élèves.
Lélaboration des documents sest fait avec la collaboration
denseignantes et denseignants de toute la province. À létape du projet
pilote, lOQRE a diffusé des exemples de questions pour déterminer celles que les
élèves comprenaient. Deux mille sept cents élèves francophones et anglophones ont
participé à ce processus. LOQRE a ensuite mené une analyse approfondie, avec
laide dexperts de tout le pays, pour déterminer comment les élèves ont
répondu à chaque question.
«La mise à lessai nous a permis de déterminer quelles questions étaient trop
faciles ou trop difficiles. Nous avons modifié certains textes qui ne semblaient pas
adaptés aux capacités des jeunes, ajoute Carrier-Fraser. Jai moi-même relu le
tout et si nous ne comprenions pas une question, nous ne pouvions donc pas nous attendre
à ce que les élèves la comprennent. Il a donc fallu la modifier.»
Des changements ont été apportés au cours des trois séries de tests pilotes. Vers
la fin du processus, les changements étaient mineurs. Ce processus a également permis
dévaluer la logistique du test, cest-à-dire la façon dont il est
distribué, ramassé et noté.
La mise à lessai de mars, qui a fait intervenir 6 000 élèves, a permis
dévaluer lensemble du processus. On a pu ainsi déterminer si les directives
étaient claires, si lon avait prévu assez de temps et si les enveloppes étaient
faciles à sceller. Au bout du compte, selon Laing, cest le processus que lon
soumet à une analyse. Ensuite, on commencera à donner de la formation aux responsables
dans les écoles.
«Jai rencontré des directrices et directeurs décole francophones qui se
sont dit satisfaits du processus retenu étant donné que des enseignantes et des
enseignants travaillaient avec lOQRE pour sassurer que le matériel proposé
correspondait aux besoins des écoles de langue française», affirme Carrier-Fraser.
La prochaine étape consiste à établir des normes et la note de passage. Cette tâche
fera intervenir des éducatrices, des éducateurs et des intervenants dautres
secteurs qui sont disposés à se familiariser avec les caractéristiques et les
résultats recherchés. LOQRE recommandera les normes au ministère.
Laing précise que pendant la mise à lessai, on procédera également à
lélaboration dune politique concernant les élèves ayant des besoins
particuliers.
TEST DE LAN 2000 : PAS OBLIGATOIRE POUR
LOBTENTION DU DIPLÔME
À compter de 2001, le test de lecture et décriture
de 10e année comptera parmi les 32 exigences auxquelles
lélève devra satisfaire pour obtenir son diplôme. Les élèves
qui échoueront recevront une orientation claire pour les aider à saméliorer,
puis à reprendre le test. En mars, la ministre de lÉducation
a annoncé que les élèves qui suivent le premier test provincial doctobre
2000 ne seront pas tenus de le réussir pour obtenir leur diplôme,
et que sils échouent, ils nauront pas à le reprendre.
Selon Laing, lOQRE est satisfaite de cette décision. «Chacun aura la chance de
faire lexpérience du test dans son école, et le personnel enseignant pourra se
familiariser avec ce test», dit-elle. Le test doctobre sera évalué et les
résultats seront communiqués aux élèves.
LOQRE est à la recherche denviron 1 200 enseignantes
et enseignants disposés à faire la notation des tests. Il semble que
ce processus se déroulera sur une période de deux ou trois semaines;
on tentera de le diviser en unités dune semaine, de sorte que
certains enseignants et enseignantes nauront pas à sabsenter
plus longtemps de leur salle de classe.
Gauthier rassure ceux qui sinquiètent du contenu du test : «Il ny a rien
ici qui est lié à des apprentissages spécifiques. Il est question dévaluer les
habiletés et non les connaissances.»
LOQRE recherche des enseignantes et enseignants au travail ou à la retraite pour
faire la notation des tests. Pour participer, consulter le site web à www.eqao.com