La réforme du bien-être de lenfance
et le Rapport Robins mettent en valeur les responsabilités des enseignants
de Laurent Joncas
Une semaine après la proclamation par le gouvernement de lOntario
des premières modifications significatives à la législation visant
la protection de lenfance depuis dix ans, une enquête judiciaire
entourant le manque flagrant de responsabilités de la part déducateurs
envers des élèves vulnérables recommandait dautres modifications
tout aussi importantes pour assurer la sécurité des enfants.
Depuis longtemps, les enseignantes et enseignants doivent signaler
sils soupçonnent des cas dagression des enfants. Les modifications
à la Loi sur les services à lenfance et à la famille
exigent des enseignantes et enseignants de signaler daprès des
motifs raisonnables toute situation qui porte à croire quun
enfant a besoin ou pourrait avoir besoin de la protection de la Société
daide à lenfance (SAE).
Ces modifications élargissent les motifs qui déterminent si un enfant
a besoin de protection, y compris lajout du concept de négligence
et labaissement du seuil de risque de maux ou de maux affectifs.
Elles permettent aussi que soit admise en preuve la conduite antérieure
dune personne à légard dun enfant dans une instance
portant sur la protection dun enfant.
La loi modifiée crée le devoir de faire rapport pour tous professionnels
et membres du public. Malgré les dispositions de toute autre loi,
une personne doit signaler, daprès des motifs raisonnables,
tout soupçon quun enfant a ou pourrait avoir besoin de protection.
Cela élargit lobligation professionnelle de faire rapport et
tient responsable toute personne qui soupçonne quun enfant a
besoin de protection. Auparavant, les dispositions limitaient lobligation
de faire rapport aux cas dagressions possibles.
13 MOTIFS
Lenseignante ou lenseignant doit signaler
ses soupçons à la SAE si lenfant :
- a subi des maux physiques infligés par la personne qui en est
responsable, ou causés par le défaut de cette personne de lui fournir
des soins, de subvenir à ses besoins, de le surveiller ou de le
protéger, ou encore causés par la négligence
- risque vraisemblablement de subir des maux physiques
- a subi une atteinte aux murs ou a été exploité sexuellement
- risque vraisemblablement de subir une atteinte aux murs
ou dêtre exploité sexuellement
- a besoin dun traitement médical quil ne reçoit pas
- a subi des maux affectifs et quil existe des motifs raisonnables
de croire quils résultent des actes, du défaut dagir
ou de la négligence dune personne en charge de cet enfant
- a subi des maux affectifs et quil ne reçoit pas les traitements
appropriés
- risque vraisemblablement de subir des maux affectifs et dont les
parents ou la personne responsable ne fournissent pas le traitement
ou les services pour remédier à ces maux
- souffre dun trouble qui, sil nest pas remédié,
peut gravement porter atteinte à son développement et dont les parents
ou la personne en charge ne fournissent pas le traitement
- a été abandonné
- est âgé de moins de 12 ans, a tué ou grièvement blessé une
autre personne ou causé des dommages importants aux biens dune
autre personne et dont les parents ou la personne en charge ne fournissent
pas les services ou le traitement nécessaire pour éviter la répétition
de ces actes
- est âgé de moins de 12 ans et a, à plusieurs reprises, blessé
une autre personne ou causé une perte ou des dommages aux biens
dune autre personne avec lencouragement de la personne
qui en est responsable ou en raison du défaut ou de lincapacité
de cette personne de surveiller lenfant convenablement.
Le devoir de signaler constitue une obligation constante. Si une
personne a déjà signalé le cas dun enfant et quelle a
dautres motifs raisonnables de croire quun enfant a ou
pourrait avoir besoin de protection, elle doit de nouveau en faire
rapport à la société daide à lenfance.
INTERDICTION DE DÉLÉGUER
Les modifications précisent aussi quun professionnel
ne peut déléguer lobligation de signaler à une autre personne.
En dautres termes, une enseignante ou un enseignant ne peut
pas compter sur la direction de lécole pour signaler ses inquiétudes
à la SAE, ou vice versa.
À la lumière de ces modifications et de lélargissement des
responsabilités, les enseignantes et enseignants en Ontario devront
bien connaître la Loi sur les services à lenfance et à la
famille sils veulent se conformer à leurs obligations en
vertu de la loi modifiée. Les membres de lOrdre doivent aussi
se rappeler que le paragraphe 1(27) du Règlement 437/97 pris
en application de la Loi sur lOrdre des enseignantes et des
enseignants de lOntario stipule que «le défaut de se conformer
aux obligations qui lui incombent aux termes de la Loi sur les
services à lenfance et à la famille» constitue une faute
professionnelle.
Vous pourrez en apprendre plus sur ces modifications dans le site
web du ministère des Services sociaux et communautaires à www.gov.on.ca/CSS/page/brochure/repchildabf.html ou communiquez avec le ministère pour obtenir
une copie de la brochure intitulée Signalement des mauvais traitements
et de la négligence à légard des enfants.
RAPPORT ROBINS
Une semaine seulement après la proclamation de ces
modifications, le juge Sydney Robins a rendu public un rapport exhaustif
intitulé Examen visant à identifier et à prévenir les cas dinconduite
sexuelle dans les écoles de lOntario qui compte plus de
100 recommandations. Robins a été nommé par le gouvernement provincial
pour recommander des moyens didentifier et de prévenir lagression
sexuelle, le harcèlement ou la violence dans les écoles de lOntario.
En tout, 39 recommandations du rapport Robins portent sur le
travail de lOrdre. Le personnel et les membres du conseil étudient
le rapport en vue de déterminer les meilleurs moyens de mettre en
uvre ses propositions pour mieux protéger les élèves.
Les recommandations sont vastes. Elles couvrent lobligation
des enseignantes et enseignants, des représentants scolaires et des
conseils, lutilisation de preuve des enfants dans les instances
disciplinaires, les programmes éducatifs à lintention du personnel
du SAE, des organismes denseignants et dautres partenaires
qui favoriseraient la compréhension des enjeux, la diffusion dinformation
sur linconduite sexuelle dans les programmes de formation initiale
et de perfectionnement professionnel, le filtrage des personnes voulant
sinscrire à la faculté déducation, le signalement à lOrdre
dinconduite sexuelle, lenquête sur linconduite sexuelle
et le besoin dune divulgation complète.
SIGNALEMENT À LORDRE
Actuellement, un conseil scolaire est tenu de signaler
sans délai à lOrdre quun membre de son personnel enseignant
a été trouvé coupable dattentat aux murs sur des mineurs
ou dautres infractions qui pourraient mettre les élèves à risque
et si, de lavis du conseil, la conduite ou les actions dune
enseignante ou dun enseignant devraient être étudiés par un
comité de lOrdre.
Il recommande aussi quun conseil soit tenu de signaler quun
membre de lOrdre est renvoyé, suspendu ou autrement discipliné
pour des raisons dinconduite sexuelle. Enfin, si un membre donne
sa démission pendant une enquête entourant des allégations dinconduite
sexuelle, le conseil doit aussi être tenu de signaler à lOrdre
les circonstances entourant sa démission.
Daprès Robins, ses recommandations visent à favoriser la sécurité
de lenfant, mais «non aux dépens des enseignantes et enseignants».
Il concède que de fausses accusations ont été portées et il recommande
une formation du personnel de la SAE, des fédérations denseignants
et dautres groupes sur les obligations de signaler afin de minimiser
les erreurs.
VÉRIFICATION DES CANDIDATS
Pour Robins, la vérification du casier judiciaire
ne représente quun aspect du filtrage de nouveaux employés.
Il recommande, avant de faire une offre demploi, de vérifier
le casier judiciaire, le dossier disciplinaire, les références auprès
danciens employeurs et de mener des entrevues serrées. Cet aspect
vise toute personne voulant occuper un poste en enseignement, un poste
dans une école plaçant la personne dans une position de confiance
ou dautorité et tous bénévoles qui ont des contacts fréquents
ou non supervisés avec les élèves.
En outre, Robins recommande que :
- la compétence des tribunaux dempêcher un contrevenant trouvé
coupable dentrer en contact avec des enfants âgés de moins
de 14 ans soit élargie aux jeunes âgés de moins de 18 ans
- lon explique et illustre plus abondamment le comportement
souhaitable dun enseignant avec ses élèves et que lon
offre une meilleure formation aux personnes qui travaillent dans
une école sur ce que lon entend par inconduite sexuelle
- le règlement sur la faute professionnelle pris en application
de la Loi sur lOrdre des enseignantes et des enseignants
de lOntario soit modifié pour inclure linconduite
sexuelle
- le code de déontologie de lOrdre soit modifié pour y inclure
que ses membres ne participent pas à des actes dinconduite
sexuelle, y compris sans toutefois sy limiter, lagression
sexuelle, le harcèlement ou une relation avec un élève ou un ancien
élève âgé de moins de 18 ans ou encore toute conduite visant
à établir ce type de relation
- lobligation pour lenseignante ou lenseignant
dinformer un collègue quil existe un rapport défavorable
sur lui ne sapplique pas à un rapport sur une inconduite sexuelle
soupçonnée
- tout membre de lOrdre ait lobligation de protéger
les élèves en intervenant dans les cas dinconduite sexuelle
possible ou dallégation dinconduite sexuelle.
Vous pouvez vous procurer le rapport Robins à Publications Ontario
au 880 rue Bay, Toronto ou en téléphonant au 416-326-5300 ou
sans frais en Ontario au 1-800-668-9938.