d’Avis Glaze
Quand on m’a demandée de parler de mon
rôle à la Commission royale sur l’éducation et des résultats de notre travail
dans Pour parler profession, j’ai pris le parti de me concentrer sur l’une de
mes préoccupations à titre d’éducatrice aujourd’hui, soit les enseignantes et
enseignants. Plus particulièrement, je m’intéresse à ce que la société pense
d’eux, à leur vie quotidienne à l’école et au rôle essentiel qu’ils
jouent dans les changements significatifs apportés à l’éducation.
Après avoir écouté des centaines
d’Ontariennes et d’Ontariens nous faire part de leur vision de l’éducation
en Ontario, nous en sommes arrivés à la conclusion que le système avait besoin
d’un renouvellement dans l’esprit de l’amélioration continue. Nous avons
conclu que des interventions stratégiques clés s’avéraient nécessaires pour
accélérer le processus de changement et pour agir à titre de leviers de transformation.
Dans le rapport de la Commission, Pour
l’amour d’apprendre, nous avons répertorié quatre moteurs ou leviers de
changements : l’éducation de la petite enfance, la professionnalisation et la
mise en valeur de l’enseignant, l’éducation de la communauté et
l’informatique. Nous avons formulé 167 recommandations. Il semblait que des projets
stratégiques clés pouvaient changer, au plan qualitatif, les écoles, le type
d’apprentissage et le type d’enseignement qui sont au cœur d’un
système scolaire.
Nous avons dépeint l’image du système
scolaire que nous envisagions, soit un système simplement fondé sur la recherche. Nous
avons discuté des responsabilités principales et communes des écoles. Nous avons
relevé chez l’élève les caractéristiques personnelles, interpersonnelles et
professionnelles sous-jacentes à l’efficacité et communes chez un citoyen
responsable dans le nouveau millénaire.
Dans certains domaines, des mesures ont été
prises et des recommandations ont été ou sont mises en œuvre, notamment la
Commission de mise en œuvre, l’Office de la qualité et de la responsabilité en
éducation, les conseils d’école, l’Ordre des enseignantes et des enseignants,
un curriculum provincial, un bulletin provincial, la réforme du financement de
l’éducation, la réforme des études secondaires, l’utilisation accrue de
l’informatique, la formation à l’enseignement, l’étude de la formation
dans les collèges communautaires, la réforme de la formation des apprentis et des
modifications à l’éducation de l’enfance en difficulté et au processus du
CIPR.
La réforme des études secondaires va bon
train. Enseignants-guides, service communautaire, élargissement de l’éducation à
la carrière et coopérative, test sur les connaissances de base, programme de quatre ans,
évaluation des préalables et plan d’éducation annuel, et ce ne sont là que
quelques-unes de nos suggestions. On met davantage l’accent sur l’orientation et
le counselling et tout particulièrement sur la prestation des programmes et sur la
transparence, tous des points dont il était question dans Des choix qui mènent à
l’action.
DEMEURER OPTIMISTE
Je suis très satisfaite de ces mesures et
j’espère qu’un jour d’autres recommandations, comme celles liées à
l’éducation de la petite enfance, à l’éducation des adultes, à la formation
à l’enseignement, à l’équité, à l’exercice physique quotidien, à la
charte des parents, à l’acquisition d’une troisième langue, à la coordination
interministérielle des services à l’enfance et à la rémunération juste pour les
conseillers scolaires seront elles aussi mises en œuvre.
La création de l’Ordre représente une
grande source de fierté. La registrateure, le conseil et le personnel méritent des
éloges. Ceux qui ont eu le plaisir de visiter les bureaux de l’Ordre ont remarqué
la qualité et la diversité de son personnel et le professionnalisme de son
fonctionnement et des locaux, et tout cela en une période de temps relativement brève.
Chapeau!
C’est là un hommage à la profession.
C’est à cela que s’attendaient les commissaires. La création de l’Ordre
comme organisme d’autoréglementation signifie que la profession enseignante est à
un tournant de son histoire et ce, tout particulièrement par rapport à d’autres
professions.
J’encourage l’Ordre à continuer
d’améliorer et de protéger les normes de la profession et à défendre la cause de
l’éducation. Il faut également continuer à relever le défi principal, soit faire
en sorte que tous les éducateurs et éducatrices du système en viennent à comprendre et
à reconnaître les avantages offerts par l’Ordre à ses membres et à la profession
enseignante.
ÉLÉMENT LE PLUS IMPORTANT
Dans Pour l’amour d’apprendre, les
commissaires ont parlé des enseignantes et enseignants avec passion, de leur
professionnalisme et de leur formation continue. C’est, à notre avis,
l’élément le plus important de toute amélioration possible de la qualité de
l’éducation. Nous avons relevé les caractéristiques d’un bon enseignant,
parlé des enseignantes et enseignants comme de nos héros et suggéré qu’ils
doivent être les héros de tout le monde.
Il nous a semblé que bon nombre d’entre
eux ne sentaient aucune reconnaissance, aucun respect, qu’ils se voyaient comme la
cible d’attaques de toutes parts. Nous avons parlé des raisons qui les ont incités
à choisir cette profession et de leur dévouement envers les élèves. Nous nous sommes
demandé comment ils pouvaient faire aussi bien leur travail compte tenu de tous les
problèmes à régler quotidiennement, du sérieux de leur responsabilité, des nouvelles
obligations qu’on leur impose sans cesse, du besoin difficile de demeurer à jour
dans les matières qu’ils enseignent et sur la recherche récente.
Avec tout cela, nous croyons que les
enseignantes et enseignants de l’Ontario méritent notre appui et notre
reconnaissance pour leur dévouement et leurs réalisations.
Certains pays choisissent de montrer leur
reconnaissance pour les enseignantes et enseignants par des mots, mais aussi par des
moyens concrets. À Taiwan, par exemple, le personnel enseignant des écoles
élémentaires et secondaires ne paie pas d’impôt. Il ne faudrait tout de même pas
présumer que des mesures externes seulement contribueront à améliorer
l’éducation.
Par ailleurs, les élèves nous ont dit de
manière non équivoque que certains enseignants et enseignantes étaient insensibles,
mécaniques, inflexibles, qu’ils refusaient toute responsabilité, que certains
avaient «pris leur retraite au travail». Même si une seule personne correspond à ce
portrait, c’est déjà trop. Mais nous savons aussi, d’après notre expérience,
que cette description ne vise qu’une petite minorité.
Étant donné l’importance que nous
accordons à la transparence en éducation tout au long du rapport, nous suggérons que
les éducatrices et éducateurs soient plus responsables par rapport à chaque élève qui
échappe au système.
COMPÉTENCE ET VOLONTÉ
À titre de membres d’une profession,
nous ne pouvons pas laisser le moral des troupes fléchir sans réagir, ce qui est une
réalité en certains endroits. Il nous arrive parfois de nous sentir comme Sisyphe
condamné à pousser un rocher jusqu’au sommet d’une montagne pour voir le
rocher retomber et ainsi recommencer sans fin. Ni le cynisme ni le désespoir ne sauront y
faire.
À la veille du millénaire, il faut en
profiter pour se faire connaître et se rappeler que les deux éléments clés de
l’amélioration du système sont la compétence et la volonté. Si nous attendons les
conditions idéales, nous n’accomplirons rien. Je suis persuadée que nous avons
l’expertise requise pour aider nos élèves à atteindre de nouveaux sommets.
Pourtant, le public, les politiciens et les
décideurs doivent faire attention. Récemment, deux éducateurs américains renommés se
sont demandé pourquoi le mouvement de réforme avait si lamentablement échoué aux
États-Unis et ce, malgré les milliards de dollars engloutis en éducation depuis le
«mouvement de l’excellence» des années 80. Ils ont suggéré qu’il est faux
de croire que les enseignantes et enseignants sont réticents aux changements et
qu’il est essentiel de prendre conseil auprès des personnes qui connaissent le mieux
l’éducation avant de prendre des décisions visant son amélioration.
Comme les commissaires, ils ont conclu que
gouvernements et décideurs partout dans le monde ne tiennent pas compte du point de vue
des enseignantes et enseignants sans lesquels aucun changement ne se fera en éducation.
Or, pour obtenir l’appui du public, nous
devons prouver que nous sommes prêts à participer à cette vague de changements et à
les accepter, à laisser de côté nos intérêts personnels et à nous concentrer sur les
autres. Mais nous ne pouvons y arriver seuls. Il est nécessaire de créer des alliances
avec tous les groupes intéressés pour créer le système que nous désirons.
J’encourage les éducatrices et
éducateurs à se concentrer sur la transparence sous toutes ses formes, à penser
d’abord aux résultats, à défendre les enfants qui vivent dans la pauvreté, à
respecter le droit des parents à participer pleinement à l’éducation de leurs
enfants et à nous assurer que les écoles répondent vraiment aux besoins des enfants. Il
faut comme les Nations unies exhorter les autres à faire en sorte que les enfants aient
droit aux ressources d’une nation, que les temps soient durs ou difficiles.