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Juin 1999

Une carrière taillée sur mesure pour les enseignantes et enseignants à la retraite


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Les conseils scolaires de la province cherchent désespérément des suppléants. C’est une bonne nouvelle pour les enseignantes et enseignants nouvellement retraités qui peuvent se tailler une carrière post-retraite sur mesure.

de Frann Harris

La vague de retraites chez ceux et celles qui ont enseigné aux baby-boomers a frappé les écoles de la province beaucoup plus tôt que prévu. Du jour au lendemain, la demande a dépassé l’offre, au grand dam de la plupart des conseils de la province, notamment au conseil de Peel, l’un des plus grands de l’Ontario, où l’on vit une «année d’enfer».

Peter Swalwell, directeur d’école à la retraite, explique qu’au cours d’une journée type, il n’est pas rare que les écoles de Peel soient à court de près de 200 enseignantes et enseignants. Comme de nombreux conseils, Peel a décidé de consacrer plus d’argent à l’embauche de suppléants.

La registrateure de l’Ordre, Margaret Wilson, a écrit récemment aux membres de l’Ordre qui ont pris leur retraite l’an dernier. Elle leur a rappelé que près de 50 pour cent des enseignantes et enseignants de la province auront atteint l’âge de la retraite d’ici 2010. Elle ajoute : «Je vous encourage fortement à envisager un retour en classe à temps partiel. Votre expérience n’a pas de prix. Ensemble, nous pouvons nous assurer que du personnel qualifié et bien formé seulement s’occupe de l’éducation des enfants ontariens.»

Qu’est-ce qui pousserait une enseignante ou un enseignant, qui prend un repos bien mérité après 35 ans de plans de cours et de formulaires en trois copies, à retourner en classe, même à temps partiel? Demandez-le à ceux et celles qui l’ont fait et ils vous répondront qu’ils en tirent des avantages tout en aidant les autres.

L’ENSEIGNEMENT SUR MESURE

L’enseignement sur mesure est le terme retenu par Linda Bell parce que la suppléance lui permet de choisir les écoles qu’elle veut, les jours et même les années qui lui plaisent. Enseignante d’immersion française dans la cinquantaine, Bell avait pris une retraite anticipée l’automne dernier, pour découvrir après coup qu’elle était vraiment trop jeune pour être à la retraite. Elle a trouvé le changement de rythme déroutant et a même traversé une période de deuil.

Très en demande comme enseignante d’immersion française d’expérience, Bell n’a pas tardé à être recrutée pour faire de la suppléance dans ses anciennes écoles de l’ancien conseil d’East York. En faisant de la suppléance deux ou trois jours par semaine pour ses collègues, la plupart des connaissances, elle combat l’isolation et la solitude. Elle a l’impression d’accomplir quelque chose, de faire un peu de gymnastique mentale, de s’occuper de sa famille... et de payer son golf et ses billets de théâtre.

Mais le plus important pour elle, souligne-t-elle, c’est que la suppléance lui permet de rattraper le manque à gagner entre le facteur 85 et le facteur 90. Ainsi, son revenu est presque égal à ce qu’il aurait été si elle avait continué de travailler pendant un certain temps. À 140 $ par jour, ce qui représente son salaire net approximatif, elle ne dépend de personne financièrement.

Bell aime bien ne pas avoir la responsabilité qui vient avec l’enseignement à plein temps : les bulletins, les réunions de personnel, la surveillance aux récréations, les réunions avec les parents et la préparation sans fin. Et elle aime pouvoir refuser un contrat si le cœur lui en dit.

Elle recommande aux autres retraités d’être bien honnêtes avec eux-mêmes et de ne pas retourner en classe par défaut ou pour ne pas avoir à affronter la réalité de la retraite. Car c’est une étape de la vie, une période où il est peut-être temps de relever de nouveaux défis plutôt que de répéter toujours les mêmes expériences. Son conseil : pensez bien à ce que vous voulez et pourquoi, puis faites-le.

LES CONSEILS À L’ÈRE DU CHANGEMENT

Ernest Morrison, surintendant des ressources humaines du Conseil scolaire de district Kawartha Pine Ridge, estime que son propre conseil devra tenir compte des besoins particuliers des enseignantes et enseignants retraités et même changer certaines politiques pour ne pas qu’ils aient l’impression d’être une solution de dernier recours.

Par exemple, explique-t-il, les retraités préféreraient sans doute des placements à plus long terme, plutôt qu’à court terme et un certain préavis plutôt qu’un appel à la dernière minute, surtout lorsque le téléphone sonne à six heures du matin. Au conseil scolaire de Morrison, on encouragera les retraités à envisager sérieusement la suppléance et on adoptera de nouvelles politiques qui tiennent compte de leurs besoins, comme le premier droit de refus.

«Rien n’est comme avant. Le marché appartient au vendeur», explique Morrison qui vient d’expédier une lettre aux nouveaux retraités les invitant à revenir en classe à l’occasion pour combler des postes vacants au conseil pendant la prochaine année scolaire. Bien qu’il prévoit une réaction généralement favorable à sa lettre, il sait fort bien que certaines personnes parmi les nouveaux retraités s’ennuient de l’enseignement, tandis que d’autres n’y pensent plus du tout.

En fin de compte, dit Morrison, c’est une belle façon d’arrondir les fins de mois, surtout lorsque ce revenu s’ajoute aux prestations de retraite.

Ce revenu supplémentaire est l’une des choses qui attire le plus Bob Greenham à la suppléance, même si son tarif quotidien est moins de la moitié de ce qu’il était avant sa retraite et que son contrat de travail ne comprend ni vacances ni congés de maladie.

LES ÉLÈVES ONT TOUT À GAGNER

Depuis octobre, il enseigne régulièrement à l’école de Toronto où il occupait le poste de chef des services d’orientation avant de prendre sa retraite. Il aime mettre en pratique des compétences qu’il a mis des années à acquérir, sans oublier l’interaction avec les élèves et ses collègues et l’occasion de se tenir au courant des nouveautés. Grand amateur d’histoire et de cuisine, Greenham pense que les élèves ont tout à gagner d’être aux côtés d’enseignants qui les exposent à leurs intérêts personnels et à leur enthousiasme.

Mais il sait que la suppléance n’a pas que de bons côtés. C’est parfois difficile, surtout lorsqu’une classe particulièrement odieuse vous traite d’imbécile ou lorsque vous vous présentez pour enseigner à la charmante classe A, mais que le directeur vous oriente plutôt vers l’horrible classe B. Greenham aime l’enseignement, et il veut que cela reste ainsi. En limitant ses jours de suppléance à deux ou trois par semaine, il conserve son impression de liberté.

Marcelle Cardinal aime la souplesse et la liberté qu’offre la suppléance. Elle dit de façon pince-sans-rire que la suppléance lui rappelle constamment comment c’est bon d’être à la retraite. Spécialiste en français au Québec et comptant 35 ans d’expérience, cette retraitée de 64 ans vient de déménager dans la région de Peterborough pour se rapprocher de sa famille.

Depuis 18 mois, à raison de deux ou trois jours par semaine, Cardinal fait de la suppléance pour les conseils scolaires catholiques et publics de son district. Elle enseigne une gamme de matières, habituellement le français, du jardin à la 12e année. Et même si elle n’aime pas qu’on lui demande de faire de la surveillance pendant la récréation au beau milieu de l’hiver un jour où, par hasard, elle a oublié son chapeau, ou qu’elle déteste se perdre dans une nouvelle école, elle aime bien faire un travail où sa compétence ne fait pas de doute, sans parler de ce revenu modeste, mais qui lui permet de gâter ses enfants et ses petits-enfants.

Cardinal ne s’ennuie pas des responsabilités de l’enseignement à temps plein, mais elle regrette de ne pas goûter à la satisfaction que procure l’enseignement à long terme, de ne pas avoir l’occasion de bien connaître les jeunes et de les voir apprendre et s’épanouir.

L’ENSEIGNEMENT À TEMPS PARTIEL ÉTAIT PRÉVU

C’est justement pour cette raison que Bob Noppe n’accepte que les contrats de suppléance à long terme, c’est-à-dire ceux d’au moins trois semaines. Cet enseignant de mathématiques et de physique affirme que l’enseignement à temps partiel faisait partie de ses intentions au moment de sa retraite en 1995. Il n’avait pas du tout envie d’abandonner complètement l’enseignement et il s’imaginait s’ennuyer à mourir à regarder ses murs à longueur de journée.

Maintenant, plutôt que de s’asseoir chez lui à ne rien faire, Noppe achète et vend les propriétés des autres, alliant une carrière d’enseignant à temps partiel à une carrière d’agent immobilier. Noppe estime que la suppléance qu’il fait en mathématiques et en physique à son ancienne école secondaire de Peel présente peu de désavantages, hormis le fait qu’il doit se lever très tôt le matin et, sur une note plus sérieuse, qu’il a moins de temps à consacrer à ses loisirs. Mais il est heureux de pouvoir rester vif en entretenant ses relations avec ses collègues et près des valeurs et des questions qui touchent le développement et l’éducation des adolescents.

Pendant des années, ces quatre enseignantes et enseignants à la retraite ont consacré énormément de temps à l’épanouissement et au développement des jeunes. Maintenant ils bénéficient de plus temps pour réaliser leurs propres rêves tout en partageant leur expérience avec les jeunes. Si vous tentez l’expérience de la suppléance, peut-être y verrez-vous aussi beaucoup d’avantages pour vous-mêmes et pour les générations à venir.